Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog d'André Boyer

APRÉS YORKTOWN

28 Avril 2021 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

REDDITION DE CORNWALLIS

REDDITION DE CORNWALLIS

Le blocus reprend aussitôt après le départ de la flotte anglaise. Grasse débarque deux mille cinq cents marins pour renforcer les trois mille deux cents hommes de Saint-Simon. Le 9 septembre, arrive Barras de Saint-Laurent avec ses douze vaisseaux et frégates accompagnés des dix-huit transports chargés de l’artillerie et des munitions pour le siège.

 

À New York, Clinton reste sans réaction, car il ne comprend pas la destination prise par Rochambeau et Washington. Lorsqu'il se décidera enfin un mois plus tard, le 17 octobre, à envoyer sept mille hommes en renfort vers le sud, il sera trop tard.

Cornwallis, qui n’a plus rien à̀ espérer de la mer, se retranche au bout de la presqu’ile, dans la petite bourgade de Yorktown. Le 29 septembre, les coalisés, onze mille Français et seulement trois mille six cents  Américains et commencent le siège. Washington doit laisser le commandement effectif aux Français. La place forte anglaise ne résiste pas au feu conjugué de l’artillerie terrestre et des pièces de marine et Cornwallis, qui n’a pratiquement plus de munitions et de vivres capitule sans conditions le 19 octobre 1781. Cette éclatante victoire laisse aux Franco-Américains deux-cent-quatorze canons, vingt-deux étendards et huit mille prisonniers.  

Pour être au plus près de l’histoire, La bataille de Yorktown n’est ni une victoire américaine obtenue par Washington, ni une victoire terrestre obtenue par Rochambeau, mais une victoire navale française remportée par l’amiral De Grasse.  Elle se traduit par la prise de deux-cent-quatorze canons, vingt-deux étendards et huit mille prisonniers.  

Une fois la victoire acquise, Grasse rembarque ses troupes et lève l’ancre pour les Antilles le 4 novembre, pour les Antilles. Le 26 novembre, Bouillé débarque sur l’île de Saint-Eustache, territoire néerlandais, force la garnison anglaise à la capitulation et restitue aux Néerlandais trois millions du butin accumulé par  Rodney.  

Par ailleurs, dans l’Atlantique,  Suffren a surpris le 16 avril au Cap-Vert, les forces de Johnstone au mouillage et leur a infligé de sérieux dégâts, ce qui lui permet d’arriver le premier au Cap, en juin 1781, d’y débarquer des troupes, de sauver la colonie néerlandaise de l’invasion anglaise et de maintenir ouverte la route des Indes.

En Méditerranée, la flotte française a également manœuvré avec succès au profit de l’Espagne comme après la prise de la Floride. Le 19 août, une flotte de vingt vaisseaux français sous les ordres de Guichen, rejointe par cinquante-et-un navires de transports de troupes espagnols et leurs dix-huit vaisseaux d’escorte, deux vaisseaux de bombardement et plus de vingt navires auxiliaires a débarqué́ une forte armée pour s’emparer de la base anglaise de Minorque. L’opération a parfaitement réussie, s’accompagnant de la saisie de plusieurs frégates, encore que la citadelle, assiégée par le duc de Crillon, tiendra jusqu’en janvier 1782.

Si 1781 apparaît comme une année de victoire, la flotte française atteint cette année-là les limites de ses possibilités, en raison des progrès techniques de la Royal Navy qui introduit l’utilisation du cuivre pour doubler les carènes dés 1775, ce qui lui permet  d’accélérer la vitesse des navires et de les protéger des algues, des coquillages et des vers. Il s’y ajoute la nouveauté de la caronade, apparue  en 1774 aux forges Caron, en Ecosse. Son feu déverse un torrent de boulets de tout calibre ou de mitraille qui balaye le pont adverse et pénètre jusque dans les entrailles du navire. L’arme a été adoptée par la Navy en 1779 sans que les Français ne réagissent.

Aux limites techniques de la Marine Royale en retard par rapport à la Royal Navy, s'joutent des limites financières. Louis XVI accorde à la flotte et au financement de ce conflit des crédits presque illimités. Le budget de la Marine passe de 17,7 millions de livres en 1774 à 189 millions de livres en 1782, bien au-dessus du budget de l’armée de terre.

Lors de la troisième année de guerre, la gestion de Sartine est discutée et les rapports avec Necker, le ministre des Finances, tournent peu à peu à l’aigre. La crise ministérielle éclate en septembre 1780 lorsque le trésorier payeur général de la Marine est mis en cause pour des emprunts émis sans accord du Ministère des Finances. Sartine est renvoyé le 13 octobre 1780, remplacé par De Castries qui va conduire la guerre à son terme victorieux.

Le financement du conflit se pose dans les mêmes termes au Royaume Uni et en France. Les deux pays ont recours à l’emprunt, mais les Anglais le finance en partie par l’augmentation de la fiscalité, tandis que les seconds y renoncent, sachant que cette augmentation ne serait pas acceptée alors que la Noblesse et le Clergé y échappent. Un rapport remis au roi en mars 1782 estime le coût des cinq années de guerre à un milliard deux cents millions de livres tournois, financés par des emprunts quasiment impossibles à rembourser et  qui seront l’une des grandes causes de la Révolution française.

 

La victoire de Yorktown ne signe donc pas la fin des hostilités. Le conflit va se poursuivre avec une haute intensité pendant toute l’année 1782 et au-delà̀ avec une Marine Royale qui va souffrir. 

À SUIVRE

 

Lire la suite

CONSERVER L'HÉGÉMONIE MONDIALE

24 Avril 2021 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

CONSERVER L'HÉGÉMONIE MONDIALE

Dans l’effort permanent que livre le pouvoir et ses medias pour conditionner l’opinion, pas un jour ne passe sans une campagne ou une pique contre la Russie, la Chine, ou les deux à la fois si l’occasion se présente.  

 

Il est parfaitement clair que la Russie et Chine indisposent les États-Unis et la constellation de ses pays vassaux, dont la France.

À en croire les medias qui relaient la parole officielle, la Russie et la Chine seraient des menaces militaires pour les Etats-Unis et leurs « alliés ». Pourtant, on ne peut ignorer que les deux pays sont encerclés, Chine comme Russie, et que leurs forces militaires sont sur la défensive face à des forces de combat et des missiles de l’OTAN à la frontière de la Russie tandis que les bases et la marine de guerre états-uniennes enserrent la Chine.

En revanche, aucune base russe ou chinoise n’est implantée au Mexique ou au Canada. Il est vrai que la Russie a annexé la Crimée, annexion entérinée par un vote à 96,8 % de ses habitants tandis que l’on occulte le renversement par les États-Unis du président ukrainien élu pour livrer l’Ukraine à des extrémistes russophobes, menacer la Russie par le sud et fermer sa base navale de Sébastopol.

On accuse les deux pays de ne pas partager nos valeurs, comme si ces dernières devaient être automatiquement universelles. Cette tarte à la crème du réquisitoire sur les valeurs veut ignorer que la majorité du monde n’est pas occidentale et l’est de moins en moins pour des raisons bêtement démographiques, qu’elle n’est pas en devoir de l’être et que le prosélytisme au nom de la civilisation est un instrument de colonisation usé jusqu’à la corde.

En pratique, il s’agit de motifs utilisés pour s’ingérer dans les affaires intérieures d’autrui : imaginons les cris d’orfraie que pousseraient nos médias si la Russie et la Chine se mettaient à faire des tares des sociétés occidentales leur cheval de bataille.

Mais sur le fond, les relations internationales sont basées sur des réalités, le bruit connexe n’étant que spectacle, leurre et diversion pour occuper la galerie.

Le différend avec la Russie tient fondamentalement à son refus de l’uni polarité états-unienne et à l’exemple qu’elle donne au monde en défendant le principe de la souveraineté nationale. Le tort de la Chine est d’avoir une économie qui fait ombrage à celle des États-Unis et de constituer le pivot d’une mondialisation de substitution à la mondialisation américano-centrée. La Russie et la Chine sont vitupérées en vue d’empêcher d’autres pays de se rapprocher d’elles, selon leurs intérêts. Elles sont aussi coupables d’avoir un armement qui rend hasardeuse toute tentative de les soumettre par la force.

En somme,l’opposition à la Russie est géopolitique, celle à la Chine, géoéconomique. Le reste n’est que du vent.

Le monde a connu un scénario analogue avant 1914. Impérialisme dominant du XIXe siècle, la Grande-Bretagne se voyait concurrencée par l’Allemagne, nouvelle prétendante à la suprématie. Aussi le conflit principal de la Première Guerre mondiale réside t-il dans l’affrontement entre une puissance en déclin relatif et une autre en voie de la supplanter.

Le transfert des hégémonies est toujours douloureux. Il  s’effectue en fonction des capacités économiques et du verdict des armes. C’est ainsi que la Grande-Bretagne s’est imposée depuis le XVIIIe siècle aux dépens des Pays-Bas et de la France.

Tout en ayant des ressemblances avec celle de 1914, la configuration actuelle est différente. D’un côté, la Russie rend inatteignable l’hégémonie universelle pour les États-Unis, mais elle-même n’a pas les moyens de dominer le monde, comme pouvait les avoir l’Allemagne de 1914. D’un autre côté, la Chine a les attributs d’une puissance mondiale, mais elle n’a pas besoin de guerre pour réussir puisque son économie est sur une trajectoire qui y mène naturellement. Elle a plutôt intérêt à éviter les hostilités.

Il faut en conclure que les instigateurs d’un éventuel conflit seraient forcément états-uniens, comme leurs innombrables agressions verbales, économiques et militaires contre la Russie et la Chine le montrent clairement.  De plus, les Etats-Unis savent que le seul moyen de maintenir leur domination mondiale est militaire, puisque la dynamique historique leur est défavorable.

Va-t-on logiquement vers une guerre, voulue par les États-Unis et leurs vassaux, dont la France ? Oui, parce que les conditions géopolitiques sont réunies pour y conduire à brève échéance, mais nous ne savons pas quelle forme dominante elle prendra.

La guerre atomique généralisée est théoriquement impossible parce que les Russes et les Chinois sont en mesure de riposter et de détruire l’agresseur. D’un autre côté, si les Etats-Unis ne freinent pas la Chine, ils vont rapidement être réduits à l’impuissance. Leurs actions actuelles consistant à harceler la Russie et la Chine par des blocus, des campagnes de déstabilisations, des sanctions et de la désinformation n’ont  de sens que si elles se prolongent demain par l’emploi de moyens plus puissants, avec pour objectif final de détruire la puissance de la Chine.

Les militaires font toujours des plans. Ils ne vont pas s’attaquer aux deux pays ensemble. Ils vont certainement commencer par s’en prendre à la Russie. La destruction de l’Europe, et en particulier de l’Allemagne, concurrente des Etats-Unis et complice de la Chine, ne leur fait pas peur, s’ils obtiennent en échange la résipiscence de la Russie. Après cette première « victoire » qui montrerait à la Chine, jusqu’où les Etats-Unis sont capables d’aller, ils se tourneront vers le dernier protagoniste pour l’achever. C’est un plan possible, il y en a certainement d’autres, comme la guerre de l’espace par exemple.

Je n’écris pas ces lignes pour faire peur, mais tout simplement parce que cela me paraît une évidence, si vous acceptez le postulat que les Etats-Unis, dans la droite ligne de la Grande-Bretagne, n’accepteront jamais de céder leur leadership et si vous constatez, comme moi, qu’ils sont en train de le perdre.

Reste à examiner le rôle de la France. Tout la pousse aujourd’hui à n’être qu’un pion dans le jeu stratégique américain, mais sa situation politique est instable, elle pourrait bien sortir du jeu et imposer aux États-Unis une acceptation du déclin qu’ils subissent.

 

Or, pour des raisons culturelles et militaires, la France est le seul pays à garder ce pouvoir en Europe, comme elle a été la seule, dans d’autres conditions stratégiques, à imposer à la Grande-Bretagne la création des États-Unis. 

 

Lire la suite

APOLOGIE DU COMBAT

18 Avril 2021 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

APOLOGIE DU COMBAT

Il s’agit d’une histoire à prétention philosophique, qui signifie que le combat est inhérent à l’être humain et même à tout être vivant. Il suffit d’un rêve à vouloir réaliser, d’une idée à poursuivre, d’un principe à poursuivre, et peu importe que le succès soit au bout du combat ou non. Car, lorsqu’on s’arrête de combattre, l’on meurt.

L’histoire est la suivante : une centurie romaine traverse les Alpes pour atteindre ces villages riants ou les attendent le bonheur, l’abandon et le repos, mais elle est guettée par des barbares impitoyables.

Au moment du récit, les soldats romains dont il est question vont se retrouver au contact de l’ennemi. Sur les cent quatre vingt hommes qui marchent dans la neige, beaucoup vont mourir là. Ils seront plus nombreux encore à agoniser dans les tranchées gelées de la voie romaine qui n’est déjà plus par endroits qu’une piste. S’ils en sortent vivants, ils feront face plus loin à d’autres barbares. C’est un combat éternel, sans trêve et sans espoir de victoire : qu’ils parviennent à franchir les Alpes et les barbares l’y suivront. Sur le moment, la situation peut être décrite ainsi : 

 

Sous la pluie glacée, luisent les casques et les boucliers bosselés, les pointes des lances. La lune, à travers les nuages intermittents, révèle les masses des restes des 3 centuries, à peine cent quatre vingt hommes fatigués, blessés, déterminés.

Le souffle du vent se joint au martèlement lourd et lent des pas de la troupe. Il n'y a pas d'autres bruits sur le chemin glacés qu'ils suivent sans interrogations. La troupe est compacte, elle est prête à l'inévitable combat, qui l'attend là‑bas au détour des rochers, ou à la sortie de l'épaisse forêt verte de sapins, ou au débouché de la clairière, derrière la chaumière en apparence abandonnée. Ses estafettes lui ont rapporté les regroupements d'archers, la convergence des flots de cavaliers, les cris des barbares, la préparation des couteaux, des massues, des lances et des flèches, la joie sauvage du prochain massacre, du pillage et de la victoire.

Déterminés, les trois centuries avancent, prêtes à combattre sur trois fronts et à passer au travers du quatrième. Elles ne craignent que l'encerclement, c'est pourquoi elles avancent, dans l'espoir de dissocier les assauts des barbares. Elles connaissent toutes les figures de combat, elles savent tous les traquenards, elles les craignent et les préparent à la fois. Elles laisseront des morts, seront peut être ensevelies. Elles ne s'intéressent à rien d'autre qu'à marcher et combattre, avec ou sans espoir de passer.

Car ici est la croisée des chemins. Jusqu'à la prochaine, jusqu'à la dernière défaite ou victoire.  Mais, en attendant, dans la nuit froide, dans la montagne, au milieu des cris des barbares, sous la menace des feux qui rougeoient sur les sommets, dans les ternes odeurs de l'automne finissant, les soldats imaginent le calme magnifique des villes italiennes de l'autre côté des Alpes, les campaniles qui sonnent, les odeurs de soupe et la chaleur des bêtes. Ils n'osent penser à l'amour tiède des compagnes, aux sourires indulgents de celles qui leur pardonneront tout parce qu'elles les aiment vivants.

Mais ils chassent les rêves importuns qui les affaiblissent. Ils serrent les dents, le combat vaut mieux, la marche épuisante est la bienvenue. Des années ils les ont attendus, ces combats et ces marches, cantonnés dans un marasme imposé. Pendant des mois, dans leurs petits fortins, derrière les pieux et les fossés, ils ont vu les menaces et les grimaces des cavaliers aux peaux de loup. Ils ont attendu indéfiniment l'assaut qui n'est jamais venu, tandis qu'au loin brûlaient les forts et les corps de leurs camarades,

Ce sont des rescapés : ils sont partis avant la fin que les barbares leur promettaient, avec l'ordre de repli général de la légion de Germanie. C'est pourquoi ils ont trois raisons d'être heureux : rescapés, faisant face enfin, et avec au fond des yeux, le rêve insensé et pourtant non parfaitement impossible d'une image de bonheur.

 

Tapis dans les fossés, piques cachées, grelottant dans des peaux décousues, affamés, les muscles bandés, les autres les attendent.

Lire la suite

VEILLÉE D'ARMES EN ALGÉRIE

13 Avril 2021 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

VEILLÉE D'ARMES EN ALGÉRIE

Le lancement de l’INSCAE a commencé en 1988 pour moi, avec des missions qui se sont déroulées durant cinq ans. Mais durant ces années-là, j’ai mené bien d’autres actions universitaires.

 

Mon enseignement et mon projet de création d’un IAE m’avait poussé à écrire un article, « Enseigner la gestion en Chine » qui avait été publié dans la Revue Française de Gestion en 1986, mes interventions en Afrique à publier en 1987 « Priorité du Macro-Markéting Africain :les moyens d'action » dans la Revue Française de Marketing.

En outre, mon travail avec Kristian Palda avait entrainé toute une série de publications sur les choix publics, notamment dans le domaine de l’innovation et un article que j’ai déjà signalé sur les décisions dans les collectivités locales, qui me tenait particulièrement à cœur parce qu’il était lié à mes fonctions de conseiller municipal à Puget-Théniers.  

En 1988-1989, je me contentais de travaux dans la même veine, proposant des communications sur la gestion publique, sur la Côte d'Ivoire, sur le Marketing des Services Publics au congrès de l’AFM à Clermont, sur l’éthique des organisations à Casablanca  qui se tenait dans la remarquable Bibliothèque offerte à la ville de Casablanca par le roi d’Arabie Saoudite et j’utilisais mon expérience chinoise pour proposer un document de recherche sur la consommation familiale des chinois, document qui fut publié mais qui n’eut, à tort à mon avis, aucun succès.

Ce rappel pour écrire que je ne me contentais pas de me promener ici et là, en Chine, au Canada, à Madagascar ou au Maghreb, mais que j’effectuais aussi mon travail de recherche, sans compter mon enseignement qui m’a conduit à cette époque en Syrie.

Cependant l’année 1989 allait se révéler extraordinairement riche, avant même le printemps de Pékin et  la chute du Mur de Berlin. Dés le début 1989 en effet, j’étais impliqué par l’entremise de la FNEGE sur trois fronts, avec une formation organisée en Algérie, le lancement d’une école en Bulgarie et le recrutement de nos étudiants en Chine.

Commençons par l’opération la plus proche et d’ailleurs la première par ordre chronologique, l’Algérie, qui allait durer pour moi de 1989 à 1992, avant que le programme ne soit rapatrié en France pour cause de guerre civile. Je présente cette action d’un trait afin de conserver l’unité d’action de ce récit avant de traiter successivement de la Bulgarie et de la Chine.

Si je connais mieux le Maroc, je n’étais pas complètement étranger à l’Algérie à laquelle je m’intéressais beaucoup, notamment par le biais d’une thèse que je dirigeais sur son agriculture. J’avais également donné un cours sur place (ce n’était pas encore le temps des cours en distanciel) au CNAT (le Centre National d’Assistance Technique) à Alger en 1986. Cela ne m’avait laissé aucun souvenir particulier, sauf que j’avais bien remarqué qu’Alger était bien la plus belle ville française après Paris du point de vue architectural, compte tenu des extraordinaires perspectives qu’offrait la baie.

En 1988, le CNAT, cet important organisme de formation étatique, obtint un contrat pour organiser un cycle de formation à la gestion au sein du Ministère de l’Équipement algérien et proposa à la FNEGE de l’organiser, qui me mandata à son tour.

Ce fut une grande expérience. Bien sûr, les ingénieurs et cadres du CNAT ne savaient rien, ou faisaient semblant de ne rien savoir car ce n’était pas « politically correct » de savoir quelque chose, de la gestion capitaliste que nous étions chargé leur enseigner.

 

Mais le plus interessant était ailleurs, au cœur du couple infernal où je venais d’être propulsé, du fait des rôles que jouaient avec application les partenaires français et algériens.

 

À SUIVRE

Lire la suite

VICTOIRE NAVALE DEVANT CHESAPEAKE

8 Avril 2021 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

VICTOIRE NAVALE DEVANT CHESAPEAKE

Grasse quitte Brest le 22 mars 1781. Le 28 avril, il arrive sans encombre à la Martinique, avec presque un mois d'avance sur le temps habituel de traversée. En face, se trouvent deux des meilleurs amiraux anglais, Rodney et Hood. Ce dernier, avec dix-huit vaisseaux, fait le blocus de Fort-Royal. Après quatre heures de canonnade, l’Anglais fuit et Grasse lui donne la chasse durant 30 lieues à l’ouest de Sainte-Lucie.

 

Le blocus levé́, Grasse entre à Fort Royal avec le convoi, puis passe à l’offensive de concert avec le gouverneur des îles, le marquis de Bouillé. Ils tentent un coup de main sur Sainte-Lucie qui échoue, mais prennent ensuite Tobago. On constate par ailleurs que toute la région s’anime d’une intense activité́ militaire, indépendamment de l’arrivée des forces du comte de Grasse.

Le 25 avril, La Motte-Picquet appareille de Brest avec six vaisseaux et trois frégates. Le 1er mai, il intercepte le gros convoi de Rodney chargé du pillage de Saint-Eustache : vingt-deux navires richement chargés sont capturés. Peu après, la Floride est visée par les Franco-Espagnols. Avec quatre vaisseaux et deux frégates, le chef d’escadre de Monteil, à la demande du gouverneur de Louisiane, vient soutenir l’attaque du poste anglais de Pensacola aux cotés de dix navires espagnols. Les troupes espagnoles renforcées de 700 Français s’emparent la place le 9 mai. C’est une belle victoire qui prive les Anglais de base dans le golfe du Mexique.

Sur les côtes américaines, on tente aussi l’offensive malgré́ l’absence de renforts. Les deux escadres, française et britannique, sont à̀ parité́. Ternay, décédé́ pendant l’hiver, a été́ remplacé par Destouches. Rochambeau et Destouches, sollicités par Washington, acceptent de tenter une opération dans le sud contre une petite armée anglaise retranchée à Portsmouth, en Virginie, une attaque qui échoue.

Le 5 juillet, Grasse appareille pour Saint Domingue en escortant un gros convoi qui doit ensuite partir pour la métropole. À ce moment, Grasse n’a pas d’ordres précis pour la suite des opérations, mais il est sollicité par Washington et Rochambeau qui lui proposent un plan qui relève d’un véritable coup de dés : attaquer et encercler les huit mille hommes de Cornwallis qui stationnent dans la péninsule de Yorktown (Virginie) en combinant une marche forcée des troupes franco-américaines avec un blocus naval qui doit tenir la Royal Navy au loin.

Grasse accepte ce plan audacieux, prend en main toute l’opération et en augmente les moyens. Il emprunte sous sa signature 500 000 piastres à des banquiers espagnols et fait embarquer les sept régiments destines à attaquer la Jamaïque, avec un petit corps de dragons et d’artilleurs : 3 200 hommes en tout, avec du matériel de siège, des canons et des mortiers. Le moral, stimulé par les victoires précédentes est très élevé́. L'escadre se sent forte au point de couper au travers des écueils du canal de Bahamas, jusqu'alors inconnu des flottes françaises.

Grasse joue alors sur les distances maritimes qui séparent les
différents théât
res d’opération pour créer la surprise, une surprise comme les Anglais aiment à en créer, afin d'obtenir une supériorité́ décisive face à̀ un ennemi qui ne s’y attend pas. Les troupes de Rochambeau, très éloignées de Yorktown, entament une marche vers le sud de plus de six cent km en laissant de côté́ l’armée anglaise de New York, alors que les quelques centaines de cavaliers de La Fayette et du général Waine remontent vers la baie jusqu’à̀ Williamsburg.

Mais l’essentiel vient de la mer : le 30 août, les vingt-huit navires de ligne et les quatre frégates de Grasse se présentent à l’entrée de la Chesapeake et jettent l'ancre dans la baie de Lynnhaven. Le débarquement des troupes commence aussitôt, sous les ordres du marquis de Saint-Simon. La situation des Français reste pendant plusieurs jours extrêmement aventureuse, car avec 8 000 soldats réguliers et 9 000 Américains loyalistes, Cornwallis dispose de forces très supérieures. L’armée de Rochambeau est encore loin, mais Grasse envoie quatre navires bloquer les rivières James et York.

Pour marcher plus rapidement, les troupes de Rochambeau ont laissé́ leur matériel lourd à Newport. Celui-ci est confié́ à la petite escadre de Barras de Saint-Laurent qui a pris la relève de Destouches et reçoit la tache délicate de transporter le matériel sans se faire repérer par l’escadre anglaise de New York qui, au printemps, avait fait échouer la tentative de Destouches.

Le 5 septembre, alors que l’opération de débarquement n’est pas encore achevée, une flotte se présente à l’horizon : ce sont les pavillons des Anglais Hood et Graves qui apparaissent, avec vingt vaisseaux et sept frégates. Pour ne pas se laisser enfermer dans la baie, Grasse stoppe aussitôt le débarquement, laisse filer les ancres et engage le combat avant que l’escadre anglaise ne bloque la baie entre les caps Charles et Henry. Il dispose de plus de vaisseaux que les amiraux anglais, même en n'engageant que vingt-quatre de ses vingt-huit vaisseaux et si plus de mille marins n'ont pas eu le temps de rembarquer.

Pour sa part, Hood, sûr de lui car il est du côté́ du vent, laisse passer sa chance en attendant que les Français se déploient pour ouvrir le feu. À cette première erreur s’ajoute une confusion dans la compréhension des signaux : l’avant-garde anglaise s’éloigne de son centre et de son arrière-garde alors que les Français commencent à tirer. Après quatre heures de canonnade, la nuit tombante sépare les combattants alors que la bataille est considérée comme indécise, même si l’escadre anglaise compte six vaisseaux très abimés.

Hood et Graves restent encore au large jusqu’au 9 septembre tandis que Grasse cherche à reprendre le combat, mais les deux chefs anglais finissent par rentrer sur New York pour réparer.

 

Cette retraite signe la victoire française à la bataille de la baie de Chesapeake. La nasse de Yorktown est désormais fermée : Cornwallis ne peut plus attendre aucun secours de la mer.

 

À SUIVRE

Lire la suite

VERS UNE MONDIALISATION DISTANCIELLE

3 Avril 2021 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

VERS UNE MONDIALISATION DISTANCIELLE

La pandémie a fini par révéler un changement fondamental dans le processus de la mondialisation qu’il me semble temps de prendre en compte.

  

Il est certes difficile de prévoir ce qui va se passer à la fin de la crise de la Covid, encore que l’on commence à entrevoir qu’elle n’est pas près de s’achever et que le retour au statu quo ante relève de plus en plus du vœu pieu.

On peut s’intéresser aussi bien à l’aspect psychosociologique de la crise et ses effets sur les attitudes et les comportements qu’à ses aspects économiques avec ses risques de faillites ou à son influence sur l’éducation de nos enfants.

Mais il existe aussi un aspect international de la crise avec la disparition des citoyens du monde. Nous avons vu, dès les premières alertes début 2020, chacun rentrer dare-dare dans son pays. C’est que, du jour au lendemain, les touristes sont passés du statut d’heureux voyageurs nomades, célébrés en leur temps par Jacques Attali comme étant l’avenir (heureux) des Bobos, à celui d’étrangers indésirables.

Et ils n’ont pas l’air d’être près de revenir ces touristes qui étaient si bienvenus il y a une éternité, enfin presque, je veux écrire avant le début 2020 lorsque la mondialisation heureuse s’est évaporée dans l’air vicié par la Covid-2019.

Depuis, ces touristes sont tous redevenus des étrangers indésirables dès qu’ils s’aventurent hors du sol national. Prenez le cas de deux pays qui me sont chers, le Maroc et le Canada. Le premier adore les touristes, mais il ne peut pas accepter qu’ils importent l’épidémie de Covid chez lui, compte tenu de ses capacités hospitalières limitées. Alors du jour au lendemain, il vient de fermer ses lignes aériennes avec la France, sa principale liaison aérienne internationale. Désormais, comment voulez-vous vous rendre dans un pays dont vous ne connaissez pas la date à laquelle il vous permettra de revenir chez vous ? Adieu les touristes.  

Quant au Canada, depuis le 21 février 2021, son gouvernement a publié officiellement l’avis suivant sur le site Internet de son ambassade à Paris :

« Pour protéger les Canadiens contre la COVID-19, le premier ministre a annoncé des restrictions de voyage qui limitent les déplacements en direction du Canada. La plupart des ressortissants étrangers ne peuvent pas se rendre au Canada, même s’ils possèdent un visa de visiteur valide ou une autorisation de voyage électronique (AVE). Ces restrictions interdisent la majorité des voyages non essentiels (discrétionnaires) pour se rendre au Canada».

C’est clair : dehors les visiteurs étrangers.

Si vous croyez que toutes ces restrictions vont disparaitre du jour au lendemain lorsque tout le monde sera vacciné, vous risquez d’attendre longtemps, justement le temps qu’il faudra pour que tout le monde soit vacciné. Et il en faudra du temps, avec les retards, les rechutes, les variants du coronavirus, les mises à jour des vaccins, les rappels de vaccination et les contre-indications vaccinales.

Ce n’est pas de sitôt que le ciel international se révèlera d’un bleu profond, sans aucun nuage à l’horizon. D’autant plus que les nuages, loin de les ignorer comme autrefois, on les guettera pour prendre  des précautions nécessaires, souvent excessives, en commençant par bloquer le tourisme à coup de passeports vaccinatoires, de tests PCR voire de quelques petites quarantaines désespérantes.

Je n’ai mentionné que les obstacles au tourisme, mais il ne faut pas oublier l’impact à long terme sur les étudiants et les hommes d’affaires. Nous avions tous pris l’habitude d’envoyer nos étudiants dans tous les coins du monde apprendre une autre langue que ce maudit français, qu’ils ne connaissent plus trop d’ailleurs, afin qu’ils comprennent que leur avenir était le monde. Mais Erasmus, les accords entre universités, les séjours linguistiques, tout cela a volé en éclats.

Que l’on revienne au statu quo ante est de plus en plus improbable devant la réticence des universités à accueillir des étudiants de passage, soupçonnés d’apporter leur charge virale, d’autant plus que la parade est toute trouvée : vous êtes les bienvenus à condition de suivre les cours en distanciel. En d’autres termes, bienvenue à Los Angeles, ou même à Londres, à condition que vous suiviez nos cours de chez vous, dans la banlieue parisienne.

Adieu le dépaysement, adieu la découverte d'une autre manière de vivre, adieu L'Auberge Espagnole.

Quant aux hommes d’affaires, combien sont désormais prêts à affronter tous les obstacles bureaucratiques pour aller passer une semaine en Australie où ils risquent à tout moment d’être mis en quarantaine dans un hôtel, alors qu’il leur suffit d’allumer leur ordinateur au bureau pour contacter leurs interlocuteurs ?

 

Le monde n’a pas disparu avec la Covid-2019, mais ce sera désormais bien difficile de le toucher du doigt ou de s’y immerger. Il restera à le regarder au fond des yeux, derrière notre ordinateur.

 

Oui, elle réapparaitra à l’écran la mondialisation, hors de portée de nos sens. Se cachant, elle nous intéressera de moins en moins comme de vulgaires séries de Netflix, elle ne sera bientôt plus à la mode avant de disparaître derrière nos écrans éteints et sa déchéance nous obligera enfin à regarder autour de nous, de tous nos sens…

Lire la suite