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Le blog d'André Boyer

LA RESTAURATION DE QUOI?

28 Octobre 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

LA RESTAURATION DE QUOI?

JOSEPH DE VILLÈLE, TOULOUSAIN ET PRÉSIDENT DU CONSEIL DES MINISTRES DE LOUIS XVIII ET CHARLES X

 

Souvent les gouvernements en difficulté à l’intérieur,comme celui de Villèle, cherchent à accroître leur prestige grâce à leur politique étrangère.

 

À ce titre, le gouvernement Villèle réussit son intervention en Espagne destinée à rétablir le roi Ferdinand VII sur le trône d’Espagne. Il profite de ce succès et des bons résultats budgétaires, puisque les budgets des années 1823 à 1826 sont excédentaires pour dissoudre la chambre des députés. 

Lors des élections qui suivent en mars 1824, la victoire des royalistes est totale, au point d’être supérieure au résultat qui avait été atteint par la Chambre Introuvable. Dix neuf libéraux seulement sont élus face à quatre-vingts ultraroyalistes et trois cent trente et un candidats ministériels soutenant Villèle. On l’appelle alors « La Chambre retrouvée », par référence à «  La Chambre introuvable ».

L’opposition au gouvernement bascule d’un coup de sa gauche à sa droite. Le 6 juin 1824, Chateaubriand, qui fait partie des ultras, est renvoyé du gouvernement, ce qui l'incite à livrer une guerre implacable à Villèle avec l’appui du Journal des Débats. La Chambre dénonce la censure de la presse.

C’est alors que Louis XVIII meurt le 16 septembre 1824.

Charles X lui succède. Il confirme Villèle, mais supprime la censure, ce qui lui vaut une grande popularité dans la presse libérale. Mais deux mois plus tard, la même presse le voue aux gémonies lorsqu’il annonce des mesures en faveur des émigrés et de l’Eglise, ainsi que son intention d’être sacré à Reims.

Le 20 avril 1825 est promulguée une loi symbolique qui punit le sacrilège des églises, mais qui ne sera jamais appliquée. Le 27 avril, le gouvernement fait promulguer une loi qui indemnise en partie les immigrés. Cette loi, appelée le  « milliard des immigrés », soulève les passions aux  deux extrêmes de l’échiquier  politique.

Le sacre de Charles X a lieu le 29 mai. Le Roi est dénoncé comme l’otage des congrégations et, tandis que l’Église rêve de reconquête spirituelle, les manifestations hostiles à son égard se multiplient.

Le Concordat de 1801 abrogé, puis rétabli en raison de l’hostilité des Chambres, révèle la persistance chez les députés d’un esprit gallican. De plus, on constate des profanations et des manifestations hostiles aux missionnaires et  aux jésuites. En février 1826, des évêques sont amenés à protester contre les persécutions dont ils sont victimes, tandis que la gauche accuse les jésuites de vouloir fomenter une contre-révolution. En mai 1826 à Rouen, une manifestation contre les missionnaires tourne à l’émeute.

Cette hostilité à la restauration du prestige de l’Église est relayée notamment par Casimir Perier. Ce dernier, fils d’un riche négociant, est devenu régent de la Banque de France, qui a le monopole d’émission mais qui est alors une banque privée. Élu député de Paris, il est l’un des orateurs de l’opposition libérale. Il prendra la tête du gouvernement après 1830.

Les défaites parlementaires se multiplient pour Villèle en 1826-1827, comme l’échec du projet de loi sur le droit d’aînesse ou celui d’une nouvelle loi sur la presse. En février 1827, la Chambre des Pairs met en demeure le gouvernement d’appliquer les lois qui s’opposent au retour des jésuites. L’atmosphère politique se tend. Lors d’une revue, des gardes nationaux conspuent Villèle en présence du roi, qui dissout aussitôt la garde nationale de Paris. La censure des journaux est rétablie le 24 juin et Villèle tente de reprendre la main en faisant dissoudre la Chambre le 5 novembre 1827.

 

Ce quitte ou double se retourne contre lui, car les élections sont  favorables aux libéraux qui obtiennent 170 sièges, à égalité avec les députés qui soutiennent le ministère. Pour leur part les ultras gardent 80 députés. 

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LE CANADA DANS LES BRAS DE TRUDEAU

25 Octobre 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

LE CANADA DANS LES BRAS DE TRUDEAU

DÉCONTRACTÉ, ENJÔLEUR, PREMIER MINISTRE

Trudeau est de retour, enfin pas Pierre Elliot, décédé en 2000, mais Justin, 43 ans, son fils aîné. Il a remporté lundi 19 octobre dernier les élections fédérales canadiennes, son Parti libéral obtenant 184 sièges sur les 338 que comptera le prochain Parlement Canadien.

 

Les conservateurs, au pouvoir depuis dix ans sous la direction de Stephen Harper, formeront pour leur part l'opposition officielle avec 99 députés. Ils conservent le cœur de leur électorat dans l’Ouest et le Centre du Canada. Le NPD, social-démocrate, qui avait obtenu le statut d’opposition officielle à l'élection précédente, le perd cette fois ci puisqu’il n'a que 44 députés.

Le Bloc québécois a pour sa part fait élire 10 députés, et le Parti vert a conservé l'unique siège qu'il détenait, celui de sa chef Elizabeth May.

Le résultat de ce vote s’explique sans aucun doute par l’usure politique de Stephen Harper et  à un moindre degré par celle du Parti Conservateur. Si le Premier Ministre avait su laisser sa place un an auparavant, le Parti Conservateur aurait sans doute obtenu plus de députés.

Le NPD avait un programme social-démocrate d’autant plus agressif que son leader, Thomas Mulcair n’a pas le sens des nuances. Il s’est prononcé nettement pour le port du niqab lors des cérémonies de citoyenneté canadienne, port qui a été ensuite autorisé par la Cour Fédérale alors qu’une large majorité de Canadiens, et encore plus de Québécois, y sont jusqu’ici opposés. Cette position a fait basculer les votes de la ville de Québec du NPD vers le Parti Conservateur et Justin Trudeau a pu tranquillement prendre la même position sur le niqab, tout en s’abritant derrière les déclarations tonitruantes de Thomas Mulcair.

Le Bloc Québécois, de centre-gauche n’obtient que 10 députés alors que le Québec a élu 40 députés libéraux sur les 78 qui le représentent à Ottawa.

Au cours des six élections fédérales de 1993 à 2011, le Bloc Québécois avait toujours remporté la majorité des sièges impartis au Québec. Mais en 2011, il s’est effondré avec seulement quatre sièges. Ce deuxième échec provoque une crise et une remise en question au sein des indépendantistes qu’il représente au niveau fédéral. Si 40% des Québécois soutiennent toujours l’indépendance du Québec, les objectifs et la stratégie des partis qui sont censés les représenter font l’objet d’intenses débats chez les militants.

Le résultat, c’est donc que les Canadiens des provinces de l’Est se sont raccrochés au sourire prometteur de Justin Trudeau. Jeune, déterminé (il y a trois ans, n’a t-il pas mis KO le sénateur conservateur Patrick Brazeau, donné pourtant favori, lors d'un combat de boxe à l'occasion d'un gala de bienfaisance?), Justin séduit la majorité molle des citoyens compassionnels car Il a un programme fait pour plaire, même à nos bobos.

Jugez-en :

Il promet de recourir au déficit budgétaire fédéral. Sur le coup, cela fera du bien et au bout d’un moment il faudra faire l’inverse.

Il rétablira le registre sur la possession d’armes à feu, supprimé par Stephan Harper. Cela ne mange pas de pain.

Il légalisera la possession de marijuana. Ça, il le fera et l’on verra les résultats après.

Il souhaite améliorer, vieille lune, les liens avec les Amérindiens.

Il défendra les Canadiens moyens contre les Canadiens riches. On verra.

Il ira à la conférence COP21, avec l’objectif de réduire le COau Canada. Excellente intention, difficile à mettre en pratique.

Il arrêtera ses « frappes aériennes » contre l’Etat Islamique. Parce qu’il y avait des frappes canadiennes ?

 

Bref, du vent pour amuser les gogos. Mais l’on ne sait pas encore si Justin gouvernera vraiment ou s’il deviendra rapidement l’un des plus mauvais premiers ministres du Canada. 

 

L'avenir le dira, mais, pour ma part, j’ai l’intuition qu’il sera rapidement détesté une fois le charme de son sourire évanoui, car le temps des dirigeants compassionnels me semble révolu, à observer les déconvenues du couple Merkel-Hollande.

 

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RÉPUBLICAINS CONTRE ROYALISTES

21 Octobre 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

RÉPUBLICAINS CONTRE ROYALISTES

LA ROMANTIQUE ET COURAGEUSE DUCHESSE DE BERRY

À partir d’octobre 1816, Le Président du Conseil des Ministres, Elie Decazes cherche, sur les instructions du Roi Louis XVIII, une voie moyenne entre les républicains et les monarchistes.

 

Il fait promulguer la loi Lainé du 5 février 1817 qui vise à affaiblir l’influence des grands propriétaires fonciers sur les collèges d’arrondissements au profit des classes moyennes des villes. En outre, il impose progressivement des lois plus libérales en matière de presse, et une loi sur le recrutement militaire (10 mars 1818) qui incorpore les anciens militaires de l’Empire au sein de légions de vétérans, malgré l’opposition des ultras qui y voient un complot révolutionnaire.

Pendant ce temps, les républicains et les bonapartistes rassemblés se signalent par des manifestations et des tentatives d’attentats : en avril 1816, la police arrête des fédérés qui voulaient introduire des barils de poudre aux Tuileries par les égouts ; en juin 1816, un mouvement insurrectionnel visant à écarter les bourbons éclate à Grenoble ; à Lyon en juin 1817, des manifestations ont lieu aux cris de « Vive Napoléon II ! »

En outre, l’opposition républicaine et bonapartiste gagne progressivement des siéges à l’Assemblée. Dés le 20 septembre 1817, les républicains, qui se cachent dans un comité dit des « indépendants » contrôlent 25 siéges. Les membres proéminents de ce comité, Benjamin Constant, Laffitte et Guizot, guerroient contre le Gouvernement à propos de la liberté de la presse.

L’assassinat du Duc de Berry, le 13 février 1820, change la donne en remettant en selle le parti des ultras. Il a été poignardé par un ouvrier républicain qui voulait éteindre la race des Bourbons, mais la duchesse de Berry donne néanmoins naissance à un fils le 29 septembre 1820, le futur comte de Chambord, appelé « l’enfant du miracle » par les royalistes.

Decazes est contraint de céder la place à Richelieu qui pratique une politique plus droitière. Une loi de sûreté générale est prorogée qui permet de mettre en état d’arrestation pendant trois mois les individus soupçonnés de complot contre l’État (26 mars 1820). Les libéraux protestent.

La censure est rétablie; une nouvelle loi, dite du double vote, accroît le pouvoir des personnes les plus imposés, puisque aux 258 députés élus par les collèges départementaux s’ajoutent 172 nouveaux députés élus par le quart des députés les plus imposés, qui gardent leur droit de vote dans le premier collège : ils votent deux fois.

Une tentative d’insurrection est déjouée le 19 août 1820. Cette conspiration, dite « du Bazar », entraîne l’arrestation de 138 conjurés, composés de républicains et de bonapartistes. Effet de cette conspiration ou de la nouvelle loi électorale, les ultras remportent très largement les élections de novembre 1820, puisque, sur les 223 sièges à pourvoir, les libéraux n’en obtiennent que 35.

Villèle prend alors la direction du gouvernement et des finances, qu’il conservera jusqu’en 1827. Les attentats et conspirations se poursuivent : le 27 janvier 1821.un petit baril de poudre est découvert prés des appartements du roi. Deux conjurés fondent la société secrète de la Charbonnerie, destinée à renverser les Bourbons, qui organise, au début du mois de janvier 1821 une tentative d’insurrection générale. D’autres tentatives organisées par la Charbonnerie échouent, l’une à Saumur dirigée par le général Berton, l’autre à La Rochelle où quatre sergents arrêtés livrent l’organisation de la Charbonnerie.

 

Cependant, malgré ces mouvements insurrectionnels qui se développent dans le sud de l’Europe, le gouvernement Villèle gouverne et connaît des succès à l’étranger. 

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LE GRAND JEU

15 Octobre 2015 , Rédigé par André Boyer

LE GRAND JEU

LE BOMBARDIER TACTIQUE RUSSE SU-34

L’intervention de l’aviation russe dans le bourbier syrien a bouleversé la donne stratégique au Moyen-Orient et mis à jour les calculs des différents acteurs de ce « grand jeu » qui a fait plus de deux cent quarante mille victimes et des millions de réfugiés  en quatre années et demi de guerre.

 

Avec seulement 34 bombardiers tactiques SU-24M et SU-34, 12 avions d’attaque SU-25, 7 hélicoptères d’attaque MI-24 et un nombre inconnu de chasseurs SU-30, l’aviation russe a renversé l’équilibre des forces. En quelques jours, on a découvert qu’un groupe aérien déterminé et renseigné pouvait affaiblir rapidement la résistance de troupes semi équipées et diversement organisées qui doivent dorénavant faire face à la contre offensive de l’armée syrienne.

Les Etats-Unis, la France, la Turquie et tous les alliés en ont été mortifiés, mais ils ont dû se contenter d’accuser la Russie de ne pas s’attaquer à l’EI. En l'occurence, ils se trouvent placés dans une situation impossible, puisque la Russie a le droit et la cohérence pour elle en intervenant en Syrie à la demande de son gouvernement légitime. Que peuvent lui reprocher des États qui y sont présents dans l’illégalité ? Tout au plus de soutenir un gouvernement qu’elles accusent d’être trop brutalement répressif, mais comme il est l’adversaire de l’EI qui le dépasse largement en violence, l’argument peut être retourné.

De plus les deux cent quarante mille morts de la guerre syrienne ne sont pas tous des victimes de Bachar El Assad, loin de là. Selon l’OSDH qui estime que ce sont des chiffres minima, au 19 mars 2015 les forces du régime syrien comptaient 84409 morts alors que les diverses forces d’opposition, islamiques ou non, en dénombraient 73544 auxquels s’ajoutaient 8000 morts pour les forces de l’EI. De plus, 111624 civils avaient payé de leur vie leur présence sur le terrain. On pourrait donc reprocher aux Etats-Unis et à leurs alliés, en encourageant et en armant les rebelles, d’être comptable au même titre que l’État syrien de ces deux cent quarante mille morts.

Au-delà des arguments politiques pour les naïfs, les uns se réclamant des Droits de l’Homme et les autres de la Légalité, il reste que la situation  stratégique est chamboulée.

On voit désormais clairement que les Etats-Unis et leurs affidés visaient à la disparition du régime syrien pour le remplacer par un État à dominante sunnite qui aurait été leur obligé. Ils en auraient tiré l’avantage d’affaiblir la Russie et l’Iran, mais aussi de récupérer accessoirement l’exploitation de l’énorme champ gazier et pétrolier situé au large de la Méditerranée Orientale, de l’Egypte à la Turquie et à la Grèce, en passant par la Syrie, qui a été curieusement découvert peu avant le début de la guerre.

Cet enjeu stratégique justifiait à leurs yeux la prolongation de la guerre et l'existence provisoire de l’Etat Islamique tant que ce dernier contribuait à ce dessein en affaiblissant Assad.

Une fois le régime syrien tombé, ils auraient pu même s’offrir les gants de s’attaquer sérieusement à l’EI, ce qui leur aurait permis de « démontrer » que ce renversement était bien la condition sine qua non de son éradication. En d'autres termes, ils rêvaient d'obtenir à la fois le beurre (la Syrie et ses champs gaziers) et l’argent du beurre (la justification morale a posteriori de leur stratégie).

Mais voilà que la Russie, avec l’aide de l’Iran, s’est décidée à contrer directement ce plan. Elle s’appuie sur les régimes alliés de la Syrie et de l’Irak qui échappe de plus en plus à l'influence américaine. Ces forces combinées ont probablement les moyens de bousculer les diverses troupes des opposants, en premier lieu dans le triangle Lattaquié Homs Alep, avant de se retourner vers d’autres zones moins névralgiques. Les Etats-Unis n’ont plus que le choix de livrer des armes aux rebelles, sans doute en vain, ou d’attaquer directement les troupes syriennes et iraniennes en affrontant l’aviation russe, ce qui constituerait une escalade considérable pour un enjeu somme toute secondaire.

Il est plus probable qu’ils vont devoir traiter avec la Russie et faire leur deuil du contrôle de la Syrie, mais il s’agit clairement de l’échec d’une stratégie fondée sur la sous-estimation de la volonté russe de leur résister et qui les avait pourtant déjà conduit à s’embourber en Ukraine.

Accessoirement, le révélateur syrien nous montre bien que toute propagande, qui s’appuie fatalement sur de grands idéaux comme les Droits de l’Homme, n’est qu’un outil stratégique destiné à modifier les rapports de force en faveur de celui qui les invoque. L’outil a été utilisé en Afghanistan, en Irak, au Kosovo et en Libye avec des « succès » divers en termes de morts et de chaos qui rendent incertains les progrès en termes de Droits de l’Homme dans ces pays, encore que les bénéfices, pour ceux qui les invoqaient, devaient sans doute se situer ailleurs.   

 

Mais cette fois-ci, cela n’a pas marché et du coup le gaz et le pétrole syriens resteront russes…

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LES ULTRAS FACE AU POUVOIR CENTRALISÉ

14 Octobre 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

LES ULTRAS FACE AU POUVOIR CENTRALISÉ

ÉLIE DECAZES DEFEND LE POUVOIR CENTRAL CONTRE LES ULTRAS

 

Le résultat politique des Cent Jours fut de favoriser l’arrivée des ultras à la Chambre.

 

Fouché et Talleyrand furent balayés par une Chambre presque totalement royaliste, élue selon un régime censitaire qui n’accordait le droit de vote qu’à environ un électeur sur cent citoyens. Le 14 août 1814, les ultras obtiennent 350 députés sur  les 402 siéges de ce qui constitue la « Chambre introuvable » selon la propre expression de Louis XVIII.

Le nombre d’électeurs avait fortement régressé par rapport aux divers électorats de la période 1791-1814 : cent mille français payant au moins 300 francs de contribution avaient le droit de vote, et quinze mille d’entre eux étaient éligibles parce qu’ils  payaient au moins 1000 francs de contribution. Compte tenu de l’usage qui avait été fait jusque-là du suffrage universel, personne ne se scandalisait du système à l’époque.

Il y eut 48000 votants sur les 72000 électeurs de l’époque, ce qui est une proportion remarquablement élevée par rapport à celles qui avaient cours durant la période révolutionnaire. On condamne aujourd’hui l’excès de royalisme de ces députés, leur cléricalisme, leur zèle en faveur de l'aristocratie et du clergé, mais il faut reconnaître qu’ils avaient eu de quoi être traumatisés par les événements du quart de siècle précèdent.

Ils prononcèrent le bannissement des Conventionnels qui avaient voté la mort de Louis XVI, mais d’autres qu’eux n’auraient pas hésité à les guillotiner. Cette Chambre ne dura guère plus d’un an, jusqu’à ce qu’elle soit dissoute par Louis XVIII qui la trouvait trop réactionnaire.

Pour la diriger, Louis XVIII fit nominalement appel au constructeur d’Odessa, le duc de Richelieu qui avait la confiance des alliés, mais c’est Élie Decazes qui se chargea de la politique intérieure. 

Les ultras de l’Assemblée rêvaient d’un État décentralisé qui s’appuierait sur une aristocratie indépendante. Ils engagèrent aussitôt une guérilla parlementaire contre le gouvernement qui se heurta de front à l’État qui, monarchiste ou républicain, se refuse toujours à abandonner une partie de ses pouvoirs à quelque groupe que ce soit.

Lors du débat sur l’amnistie, présentée par le roi en janvier 1816, l’assemblée imposa le bannissement de 38 régicides ayant occupé des fonctions publiques. C’est à cette occasion que monsieur de Béthisy prononça l’apostrophe « Vive le roi quand même ! ».

Finalement, le 5 septembre 1816, Louis XVIII se résolut à dissoudre la « Chambre introuvable », cédant aux conseils de Decazes et aux pressions des alliés. Malgré le soutien de Chateaubriand qui plaida pour le parlementarisme dans la brochure intitulée « De la monarchie selon la Carte » que fit saisir le gouvernement le 18 septembre 1816, les ultras furent battus le 4 octobre 1816 avec l’aide des préfets par les élus favorables au gouvernement. 92 ultras seulement furent élus contre 146 en faveur du Ministère. Ce sont encore les députés ultra, bien libéraux par certains aspects, qui demandèrent la levée de la censure le 2 décembre 1816.

 

Le Président du Conseil des Ministres, Elie Decazes, prit la tête du quatrième ministère de Louis XVIII en s’efforçant de suivre une politique de compromis autour d’un pouvoir fort qui visait à réconcilier la France républicaine et la France monarchiste.

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CRISE DE L'AUTORITÉ, CRISE DE LA TRANSMISSION

11 Octobre 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

CRISE DE L'AUTORITÉ, CRISE DE LA TRANSMISSION

DIDEROT REMPLACE L'AUTORITÉ PAR LA RAISON

 

Nous vivons une « crise » de l’autorité qui touche non seulement la sphère politique mais aussi la famille, l’école, le pouvoir judiciaire et bien sûr l’entreprise.

 

L’autorité ne peut être réintroduite, car il est impossible de retrouver un paradigme perdu et si l’on songe à le faire par la force, ce serait un contresens puisque l’autorité exclut le recours à la contrainte.

L’autorité exclut également d’user de la persuasion qui présuppose une relation entre égaux. La persuasion ne s’impose que dans un monde où prévaut l’accord des volontés individuelles et ou ne subsiste que l’arbitraire des subjectivités, réglé par les échanges contractuels.

La relation d’autorité est-elle donc devenue définitivement obsolète ? Il est vrai que l’acception traditionnelle de  l’autorité n’a plus cours, si cela signifie que l’autorité est transmise par la tradition. Il est vrai aussi que la crise de l’autorité est consubstantielle à l’avènement de la modernité.

Si diverses que soient les définitions de la « modernité », on s’accorde au moins sur l’idée qu’elle se caractérise par un mouvement d’arrachement à la tradition. Dès lors, qu’est ce qui permet à un pouvoir et plus généralement à une institution de prétendre à la reconnaissance de sa légitimité, si la source de l’autorité est déconnectée de la tradition ?

La modernité a-t-elle donc inventé une nouvelle figure de la transcendance à moins que cette dernière est disparu et avec elle l’autorité en général ?

À cet égard, il faut citer l’article « Autorité » de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert : « Qu’importe que d’autres aient pensé de même ou autrement que nous, pourvu que nous pensions juste, selon les règles du bon sens et conformément à la vérité ? » . C’est ce qu ‘écrira également Kant dans le § 40 de sa Critique de la faculté de juger : « penser par soi-même », « sans préjugés ». Penser par soi-même, n’admettre aucune autorité : l’ultime source de toute autorité, ce n’est pas la tradition mais la raison.

 

Si l’autorité ne peut plus prendre appui sur le passé en tant que tel, la crise de l’autorité comme rupture du fil de la tradition est une crise de la temporalité.

Cette crise affecte significativement l’éducation. Autrefois, il allait de soi que les enfants, nouveaux venus dans un monde qui leur préexiste, ne pouvaient y être introduits que par leurs prédécesseurs adultes, parents et éducateurs, qui assumaient la double responsabilité du développement de l’enfant et du maintien ou de la continuité du monde. Or nous sommes aujourd’hui dans la situation où cette double exigence doit s’exercer dans un monde dont la consistance n’est plus structurée par l’autorité ni retenue par la tradition.

Déjà, Chateaubriand usait, dans les Mémoires d’outre-tombe, d’une formule saisissante : « le monde actuel, le monde sans autorité consacrée, semble placé entre deux impossibilités : l’impossibilité du passé et l’impossibilité de l’avenir ».

 

Ainsi la perte de l’autorité proviendrait non seulement de la défection du passé mais aussi de celle du futur…

 

À suivre

 

À partir de l’ouvrage de Myriam Revault d’Allonnes, Le pouvoir des commencements, Essai sur l’autorité, Seuil, 2006.

 

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