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Le blog d'André Boyer

COBALT STRATÉGIQUE II

28 Mars 2018 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

COBALT STRATÉGIQUE II

Bien sûr, les dirigeants de la RD du Congo n’ignorent rien de l'importance stratégique du cobalt.

 

Il y a quelques semaines, le président de la RD Congo, Joseph Kabila, a reçu les sept grands patrons des géants miniers qui extraient le cobalt, avant de promulguer le 9 mars dernier, le nouveau Code minier. Ce dernier multiplie par cinq la taxe sur le cobalt qui passe de 2 % à 10 %. D’autres mesures sont en préparation, comme une taxe sur les superprofits et la fin d’une clause de stabilité des prix pour les contrats de dix ans.

La RDC, véritable scandale géologique avec son cuivre, son cobalt, son coltan (80% des réserves mondiales) et ses diamants, mais aussi deuxième plus grand pays d’Afrique avec 2,3 millions de km2 et 90 millions d’habitants, détient désormais un pouvoir considérable sur un monde de plus en plus friand de ses minerais.

Mais c’est un pouvoir que le pouvoir financier mondial n’a aucune intention de le lui abandonner, terrifié qu’il est par les risques de pénurie, comme celle du tantale issu du coltan qui avait autrefois empêché la fabrication de la PlayStation2 de Sony en quantité suffisante. Quelle catastrophe si les chaines de production automobiles devaient s’arrêter par pénurie de cobalt ! Quel scandale financier s’ils leur fallait abandonner une part significative de la valeur ajoutée provenant de l'extraction du cobalt à la population de la RD du Congo !

Aussi les patrons des grandes sociétés minières se sont-ils déplacés à Kinshasa pour s’assurer que l’extraction et l’exportation du cobalt se feraient à l’avenir sans incidents et en quantité suffisante. Mais pour cela, il faut qu’ils aient à Kinshasa un pouvoir à leur main.

Or, ils pensent que Joseph Kabila n’est plus l’homme de la situation et son quintuplement des taxes sur le cobalt ne les a ni satisfaits, ni rassurés, si bien que ce pourrait bien être le dernier cadeau de Kabila à sa population.

Car, comme par hasard, la pression des ONG aux ordres ne fait que s’accroitre pour dénoncer les conditions de travail dans les mines. Le vertueux fond d'investissement Hermes vient même de suggérer aux industriels d’utiliser la technique de la blockchain (vous voyez jusqu’où se niche la blockchain !) pour suivre le cobalt depuis son extraction jusqu'à son application industrielle, afin de rejeter le cobalt extrait dans des conditions inacceptables pour les opinions publiques occidentales.

Les opinions publiques occidentales! Retenez cela. N’est ce pas un moyen détourné d’accuser Kabila d’impéritie ou de complicité avec ces pratiques ? D’ailleurs, lorsque Joseph Kabila a reçue le 27 octobre 2017 à Kinshasa Nikki Haley, la douce ambassadrice américaine auprès des Nations Unies, cette dernière n'y est pas allée par quatre chemins: elle lui a fait savoir que les Etats-Unis souhaitaient qu’il organise, dans le calme bien sûr, son départ du pouvoir pour la fin de l’année 2018.

C’est ce qu’il semble qu’il fera, en échange de garanties qui sont en cours de négociation avec les puissances occidentales et la Chine, car il faut que la RDC se montre raisonnable en acceptant d’être gérée par les grands pays industriels qui, justement parce qu'ils sont grands, ne plaisantent pas avec leurs intérêts économiques. Sinon...

Ainsi, à cause du cobalt et des autres minerais qu’elle possède, la RD du Congo est devenue progressivement un pays sous tutelle des grandes puissances, occidentales et chinoises, qui vont jusqu’à choisir l’identité de ses futurs dirigeants et leur mode de gouvernance.

Je doute que cela fonctionne harmonieusement.

 

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COBALT STRATÉGIQUE I

25 Mars 2018 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

COBALT STRATÉGIQUE I

 

Le prix de la tonne de cobalt a augmenté de plus de 70% pendant l’année 2017 et il vient de battre un record en mars 2018 à la Bourse des métaux de Londres, à 84 000 dollars la tonne.

 

Ce n’est pas étonnant, car le cobalt est un élément essentiel de la fabrication des batteries ion-lithium utilisées pour les téléphones mobiles et surtout pour les voitures électriques. Aussi, pressentant le risque d’une forte augmentation des prix dans l’avenir, les géants de l'industrie mondiale comme Apple, Samsung, Volkswagen ou Tesla essaient, sans succès jusqu’ici, de négocier des conditions d’achat du cobalt à prix fixes.

En effet, le virage de l'industrie automobile mondiale vers les véhicules électriques, qui laisse prévoir qu'ils pourraient représenter la moitié des ventes mondiales à l'horizon 2050, a placé le cobalt au centre de l’actualité.

Or les deux tiers du cobalt mondial proviennent des mines de la République démocratique du Congo (RDC) qui détient à elle seule la moitié des réserves mondiales connues de cobalt, soit  7 millions de tonnes qui pourraient être épuisées en moins d’un siècle, le reste des réserves étant réparties entre l’Australie (20%), Cuba (14%), la Russie et le Canada (7% chacun) et la Nouvelle-Calédonie (6%).

La stratégie de Volkswagen est révélatrice de l’inquiétude des constructeurs automobiles quant au risque de pénurie et d’envolée du prix du cobalt. L’entreprise  a prévu de produire 3 millions de véhicules électriques d'ici 2025. Pour se rapprocher des mines de cobalt, elle vient d’annoncer l’installation d’une usine automobile au Rwanda. De plus, elle a lancé un appel d'offres aux différents producteurs de cobalt dans le monde afin que ces derniers lui soumettent des propositions pour lui livrer régulièrement du cobalt sur une période de 10 ans à compter de 2019. Selon les  analystes du secteur, les besoins de Volkswagen devraient se situer entre 24 000 et 36 000 tonnes par an, soit la totalité de la production actuelle de la RDC, sachant que chaque batterie dans une automobile électrique utilise entre 8 à 12 kg de cobalt. Par ailleurs, l'industrie chinoise s'est emparée d'une bonne partie de l'activité de transformation du cobalt brut produit par les mines de la RD du Congo.

Vous voyez apparaître ici les différentes composantes de la question de la pénurie des matières premières engendrée par la robotisation de l’humanité.

 

On observe donc une demande de plus en plus forte de cobalt, ce qui provoquera une hausse constante des prix avec une position dominante de la RDC  sur ce marché, qui devrait pouvoir en tirer avantage...

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L'ALCHIMIE DE LA FISSION NUCLÈAIRE

21 Mars 2018 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

L'ALCHIMIE DE LA FISSION NUCLÈAIRE

 

Le phénomène de fission nucléaire est un phénomène naturel que l’on peut provoquer artificiellement dans un réacteur nucléaire, avec la double difficulté de l’entretenir et de le contrôler à la fois.

 

La fission nucléaire, brisant des noyaux fissiles, génère de nouveaux noyaux dont certains sont fissiles et d’autres non. Ainsi, un réacteur à uranium naturel produit du plutonium sous deux formes (deux isotopes) le plutonium 239 et le plutonium 241 qui sont tous deux fissiles par des neutrons thermiques (qui ont été ralentis) et qui de ce fait peuvent continuer à alimenter un réacteur nucléaire.

Ils peuvent même être utilisés pour fabriquer une bombe atomique : l'un des objectifs du projet Manhattan au cours de la Seconde Guerre mondiale était d’obtenir suffisamment de plutonium pour fabriquer une bombe nucléaire, celle qui a détruit Nagasaki. En revanche, la première bombe, larguée sur Hiroshima, contenait de l’uranium enrichi.

On peut donc continuer à produire de l’énergie avec du plutonium comme produit de la fission, alors que le matériau originel, l’uranium 235, est complétement utilisé. Malheureusement la fission ne produit pas que des plutoniums 239 et 241, qui sont fissiles, mais aussi du plutonium 240 qui lui est trop fissile, ce qui oblige à l’éliminer en partie pour éviter l’explosion.

Au total, un bon réacteur nucléaire est un réacteur qui produit plus de matière fissile qu'il n'en consomme. Il faut pour cela utiliser de l'uranium 233, dans un réacteur à neutrons thermique ou du plutonium 239, dans un réacteur à neutrons rapides.

Comme un réacteur nucléaire sert à produire de la chaleur, on peut le décrire comme une sorte de chaudière qui se caractérise par son combustible, son fluide de refroidissement, son modérateur de fission et sa protection extérieure :

  • Le combustible est le plus souvent du dioxyde d'uranium ou un oxyde mixte d'uranium et de plutonium.
  • Le refroidissement du réacteur est assuré par un fluide caloporteur qui circule à grande vitesse au contact des éléments de combustible. Dans les réacteurs thermiques, on utilise soit du gaz (dioxyde de carbone ou hélium sous pression), soit de l'eau ordinaire, soit de l'eau lourde (constituée des mêmes éléments chimiques que l’eau ordinaire, mais dont les atomes d’hydrogène sont des isotopes lourds). Dans les réacteurs à neutrons rapides, on utilise comme moyen de refroidissement des métaux fondus tels que le sodium, parce que ces réacteurs ne permettent pas l'emploi de noyaux légers.
  • Le fluide caloporteur contenu dans un premier circuit s'échauffe dans le cœur et cède sa chaleur à un autre fluide, souvent de l'eau ordinaire, qui circule dans un deuxième circuit et actionne une turbine à vapeur pour la production d'électricité. Le choix du liquide caloporteur détermine en grande partie les options techniques fondamentales du réacteur qui caractérisent les filières de réacteurs.
  • Les modérateurs de fission (les refroidisseurs de neutrons) usuels sont l'eau ordinaire, l'eau lourde qui est plus chère, et le graphite qui possède un plus faible pouvoir de refroidissement que les deux premiers. Aussi l’eau ordinaire est-elle mise en œuvre dans 85% des réacteurs industriels en exploitation.
  • Un réflecteur est un matériau destiné à réduire les fuites neutroniques hors du coeur. Pour les réacteurs à neutrons rapides, on y ajoute  une couverture d'uranium naturel ou appauvri visant à profiter d'une partie des neutrons qui s'échappent du coeur pour produire du plutonium à des fins de surgénération.
  • Mais malgré ces deux obstacles, il sort du coeur un flux de neutrons rapides, de neutrons lents et de rayonnements gamma (rayons de photons à haute fréquence). S'il est relativement aisé d'arrêter les neutrons lents avec des corps absorbants, de fortes épaisseurs de blindage sont en revanche nécessaires pour se protéger des neutrons rapides et des rayons gamma. Pour cela, on utilise généralement du béton, lui-même parfois protégé par un bouclier en acier refroidi pour en limiter l'échauffement.

 

L’ensemble du système « réacteur nucléaire » est coiffé par un système de contrôle-commande du réacteur, mais on conçoit aisément que les équilibres instables des centrales nucléaires inquiètent, ce qui fait que l’expérience acquise lors de la construction et surtout de l'exploitation des centrales nucléaires constitue un élément essentiel de la relative « sureté » de ces centrales.

 

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QUELQUES COMPLEXITÉS SÉNÉGALAISES

18 Mars 2018 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

QUELQUES COMPLEXITÉS SÉNÉGALAISES

 

Je n’étais pas certain, en effet, que mes cours soient d’une utilité directe pour les étudiants qui les suivaient.

 

Surtout lorsque les Sénégalais, toujours fort inventifs en matière de vocabulaire, appelaient « Maitrisards » les étudiants qui obtenaient la Maitrise sans trouver de travail et ces Maitrisards constituaient une majorité. Que faire avec eux ? On évitait de se poser la question.

D’un autre côté, on savait qu’il était crucial pour les étudiantes de ne pas interrompre leurs études, en particulier parce qu’elles étaient enceintes. Si elles n’avortaient pas, elles se trouvaient contraintes de retourner dans leurs familles pour accoucher et attendre ensuite qu’un homme veuille bien les épouser quand même, malgré l’enfant. Je vous laisse imaginer leur sort, sachant que les esclaves, cela existe encore, même si le mot est désormais tabou.  

D’ailleurs, à l’époque, ce terme n’était pas si tabou que cela. Je me souviens d’un de mes assistants sénégalais qui se plaignait d’être harcelé par les esclaves de son père. Ils prétendaient être pris en charge par lui, puisqu’il était le fils de leur maitre. Je me souviens aussi d’un cours que j’ai donné à Nouakchott en 1982. La Mauritanie avait  officiellement aboli l’esclavage une première fois en 1981 et l’a aboli à plusieurs reprises ensuite. Les bâtiments de la Faculté de Droit de Nouakchott étaient alors en cours de construction et c’étaient des esclaves qui travaillaient, un comble pour une Faculté de Droit.

Ces sociétés de l’Ouest Africain avaient donc des caractéristiques qui m’étonnaient. J’ai appris depuis que tout ce qui est raconté en France sur le reste du monde est doublement déformé par le prisme culturel et par le parti pris idéologique, si bien que j’attends de visiter le pays et de rencontrer ses habitants pour commencer à me faire une opinion.

Vu de prés, j’ai aussi compris qu’il fallait nuancer l’idée que l’on pouvait se faire des Sénégalais, vus de loin.

Même si les façons de se vêtir, de célébrer les différents événements de la vie,  même si la musique et la philosophie de la vie peuvent être communs et même si l'islam concerne 95 % de sa population, le Sénégal est constitué par des populations diverses. 

Certes, les Wolofs constituent le groupe social le plus important, pratiquement la moitié des Sénégalais et il impose sa langue à tous : ce groupe appuie aussi son influence sur deux confréries religieuses, les Mourides et les Tidjanes, dont vous voyez des représentants à l’étranger sous la forme de vendeurs de sacs et autres babioles. Vous ne voyez alors que la partie apparente de ces très puissantes confréries, États dans les Ètats de l’Ouest Africain.

Mais les Wolofs cohabitent avec d’autres populations, les Peuls et les Toucouleurs, qui rassemblent à peu prés le quart de la population, les Sérères, 15 % de la population, avec d'importantes communautés chrétiennes, encore que l'islam soit majoritaire chez eux. Enfin les Diolas, 4% à peine de la population, sont concentrés dans le sud du pays, en Casamance, et ont souvent été en révolte contre le pouvoir central. Bien sûr, il faut ajouter à ce patchwork des communautés plus réduites, les Africains originaires d'autres pays du continent qui sont souvent haoussas, la communauté marocaine, les Maliens, les Maures, les Libanais et bien sûr les Français.

Au Sénégal, il est tout de même utile de comprendre qui est votre interlocuteur, wolof ou non et s’il est wolof, de comprendre à partir de son nom à quelle caste il appartient, s’il est proche des Tidjanes ou plutôt des Mourides. Et s’il n’est pas wolof, quels sont ses rapports avec eux ?

Ainsi, je me souviens d’avoir assisté à une réunion d’un parti proche des Diolas de Casamance, dont je connaissais le chef et son épouse. Normalement, en tant que Français, coopérant de surcroit,  je n’aurais pas dû y assister, car les Diolas ont pour position de base de contester tous les colonialismes, à commencer par celui de la France, afin de pouvoir, car c’est leur but, contester le colonialisme qu’ils subissent selon eux de la part du gouvernement sénégalais en général et des wolofs en particuliers.

Ce fut une réunion intéressante.

Elle se déroulait dans un vieux cinéma de quartier et les militants criaient en diola des slogans apparemment assez violents. Puis certains montèrent sur scène. Je compris qu’ils étaient hostiles à la colonisation du pays par la France lorsque je les vis mimer l’exécution d’un coopérant français par pendaison.

Et moi, j’étais le seul coopérant français présent dans la salle et avant que je ne commence à m’inquiéter pour ma peau, ils sont venus nombreux m’expliquer avec un grand et franc sourire que c’était juste une représentation symbolique, rien de plus.

 

Dans cette  petite scène, une bonne partie de la vie collective sénégalaise s’exprimait : on protestait, on le manifestait, mais en même temps on cohabitait et on se respectait.

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LE RAPPORT DE FORCE À QUÉBEC (1759)

13 Mars 2018 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

LE RAPPORT DE FORCE À QUÉBEC (1759)

 

 

Les troupes françaises qui défendaient Québec étaient au nombre de dix huit ou dix neuf  mille hommes, plus nombreuses que celles de Wolfe qui comptaient onze mille hommes.

 

L’homme qui dirigeait l’ensemble des troupes, à Québec et dans toute la nouvelle France, s’appelait Louis Joseph de Montcalm-Gozon, marquis de Saint Véran.  En 1759, il était âgé de quarante sept ans et il avait plus de trois décennies de carrière militaire derrière lui. (je présente sa biographie dans les billet suivants). Son aide de camp était le célèbre Louis Antoine de Bougainville (dont je présenterai la biographie après celle de Montcalm).

Les troupes dont il disposait étaient les suivantes :

  • Tout d’abord deux mille quatre cent troupes régulières, provenant de cinq Régiments, de Béarn, de La Sarre, de Guyenne, de Languedoc et de Royal-Roussillon avec un petit détachement d’Artillerie Royale.
  • Ensuite deux mille cent marins, dont mille quatre cent affectés à l’artillerie de marine transportée sur terre.
  • Puis mille cent soldats des Compagnies franches de la Marine, composées de soldats professionnels cantonnés en Nouvelle-France, dont ils étaient le plus souvent originaires. 
  • Il s’y ajoutait plus de dix mille miliciens issus de l’ensemble des hommes valides de la Nouvelle-France, âgés de 16 à 60 ans. Cinq mille six cent miliciens provenaient de la région de Québec ; ils avaient été rejoints par quatre mille deux cent miliciens de Montréal et mille cent venant de Trois-Rivières. La Milice avait aussi à sa disposition un corps de cavalerie, grande nouveauté en Amérique du Nord, constitué de deux cent Canadiens volontaires, divisé en deux compagnies chargées de suivre le positionnement ennemi et le combattre.
  • Les Amérindiens, au nombre de mille huit cent, participaient aussi à la défense de la Nouvelle-France, des Abénaquis, des Micmacs, des Malécites, des Outaouais, des Poutouétamis, des Renards et des Hurons.

C’était donc presque vingt mille hommes qui participaient à la défense de Québec et jamais une aussi grande masse de troupes n’avait été rassemblée en un seul lieu dans la Nouvelle-France. Ces troupes à terre étaient appuyées par la Marine Royale qui disposait de huit frégates, de seize bateaux de transport armés, de vingt canonnières, de huit brûlots et de cent vingt radeaux utilisés comme brûlots.

Face à eux, les troupes britanniques étaient dirigées par le Major General James Wolfe, trente deux ans (dont je présenterai la biographie après celle de Bougainville). Il avait été chargé du siège de Québec par le commandant en chef de l’armée britannique en Amérique du Nord, Jeffery Armherst (le bourreau des indiens). James Wolfe était assisté par trois brigadiers généraux, Robert Monckton, commandant en second, Georges Towhnsend, commandant en troisième et James Murray, commandant en quatrième.

Les Britanniques avaient rassemblé environ onze mille hommes y compris deux mille Royal Marines et six cent Rangers. Ils s’appuyaient sur une flotte considérable, quarante neuf vaisseaux de guerre armés par treize mille cinq cent marins et cent trente sept vaisseaux marchands manœuvrés par quatre mille cinq cent marins plus cent trente barques de débarquement.  

Les fortifications de la ville de Québec, élaborées depuis 1745 par l’ingénieur Chaussegros de Léry, formaient un triangle. Les deux premiers côtés, le long de la rivière Saint-Charles et du fleuve, étaient protégés par une falaise abrupte renforcée par un parapet. Le troisième côté, allant du Cap Diamant à la rivière Saint-Charles, était ouvert sur les Plaines. Aussi y avait-on construit un mur de 10 mètres de haut appuyé par six bastions, eux-mêmes soutenues par deux redoutes, Dauphine et du Bourreau.

Pour autant, Montcalm avait fait compléter ces fortifications par plusieurs ouvrages temporaires : une palissade qui fermait la Haute-Ville sur le sommet de la falaise et plusieurs batteries en Haute et Basse-Ville.

En se fondant sur l’expérience des sièges antérieurs de Québec, Montcalm avait établit un camp fortifié à Beauport où il posta la majorité de ses troupes, entre les rivières Saint-Charles et Montmorency. Il installa une seconde ligne défensive le long de la rive est de la rivière Saint-Charles, auquel il ajouta un ouvrage sur  la rive ouest de la rivière afin d'en bloquer l'accès.

 

En outre, à l’ouest de la ville, Montcalm fit construire la batterie de Samos au-dessus de l’Anse-Au-Foulon, par où vinrent finalement les troupes de Wolfe…

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ALEP II: LA GHOUTA ORIENTALE

9 Mars 2018 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

ALEP II: LA GHOUTA ORIENTALE

L’offensive de l’armée syrienne contre les groupes armés installés dans la banlieue de Damas a fait réapparaitre  les éléments de langages classiques des medias sur le conflit syrien : pertes civiles, bombardements aveugles, soupçons d’attaques chimiques…   

 

Le temps passe mais le langage reste, niant toujours une bonne moitié de la réalité. Il faut convenir que nous ne sommes pas aidés par les medias. À Alep, ils s’obstinaient à s’appuyer sur les témoignages des militants salafistes, qui n’avaient pas de termes assez durs contre les massacres de la population civile provenant des bombardements des aviations syriennes et russes. Il a fallu attendre qu’ils quittent Alep pour découvrir les massacres auxquels ces mêmes militants salafistes se livraient contre la population civile.   

Pour la Ghouta, comme pour Alep, nos medias s’appuient fortement sur l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) qui annonce de jour en jour 200 puis 300, 400, 500 morts dont 60, 80, 100 enfants.

Or, ils savent comme moi que cette organisation, installée à Londres et dirigée par un opposant au régime syrien, est financée par le Qatar et plus curieusement par l’UE. Ils savent aussi que personne ne connaît ses sources sur le terrain. Mais pour les journalistes, peu importe sa crédibilité, l’avantage du site est de donner des chiffres, ce qui fournit un appui aux commentaires journalistiques et puis le nom d’Observatoire syrien des droits de l'homme est parfait : « Observatoire », ça fait objectif, « syrien », ça fait neutre et « Droits de l’Homme », ça fait politiquement correct.

Il n’en faut pas plus pour que les communiqués de l’OSDH soient repris par les principales agences de presse, AFP, AP et Reuters et donc par la plupart des médias. Mais curieusement, pour l’OSDH et les journalistes bien pensants, les hommes ne meurent que dans les zones occupées par l’opposition. Dans les zones contrôlées par le régime syrien, ce n’est apparemment que luxe, calme et volupté. Car, à en croire les medias européens et américains, les bombardements quotidiens au mortier par les opposants ne provoquent aucun mort civil dans le centre ville de Damas.

En tout cas, ça ne vaut pas la peine d’en parler. Pourquoi ? Parce que c’est contreproductif ?  

De plus, les civils devraient logiquement chercher à quitter les zones bombardées pour se réfugier dans des zones plus sûres. Qui les empêchent de quitter les zones de combat ? L’armée syrienne ou les rebelles ?

Les medias ne se posent pas la question.

Si l’on revient à Alep, qu’est devenue la ville depuis que l’armée syrienne l’a reprise ? Très peu de reportages sur ce sujet. Or de nombreux réfugiés sont revenus dans leurs maisons, une partie des infrastructures a été restaurée et une petite reprise d’activité industrielle et commerciale s’amorce.

Tout cela ne mérite pas d’être écrit parce que la ville est sous le contrôle du régime syrien ?

Pour revenir à la Ghouta orientale, que va t-il se passer ? Malgré l’averse médiatique que nous allons subir ces prochaines semaines en France, en Europe et en Amérique du Nord, la zone va être progressivement reprise par l’armée syrienne et la population va reprendre ensuite une vie à peu prés normale à Damas et dans sa banlieue.

Faut-il souhaiter l’inverse, le maximum de bombardements, le maximum de refugiés, le maximum de morts  afin de gêner, voire d’affaiblir le régime ?

Tout sauf Assad ?  C’est ça ?

C’est en tout cas le point de vue des Etats-Unis.

En effet, pour l’année prochaine, le Ministre de la Défense américain, James Mattis vient de demander trois cent millions de dollars au Sénat (cf. son rapport au Sénat) pour toutes sortes de dépenses militaires destinées à compléter l’équipement des soixante mille hommes de l’ASL, l’Armée Syrienne Libre, qu’ils sont en train de rassembler.

Quel media l’a mentionné, pour s’en réjouir ou le déplorer ?

Ce n’est pourtant pas rien : James Mattis a prévu de leur fournir, entre autres, et uniquement pour 2019, 25000 fusils d’assaut Kalachnikov, 2000 mitrailleuses, 400 lance-roquettes, 95 fusils de précision, 15 millions de cartouches pour les fusils, 5 millions de cartouches pour les mitrailleuses, 7000 obus à éclats, 4000 mines éclairantes et je vous passe les détails. Il aussi prévu de verser en moyenne 300 $ par mois à dix mille de ces hommes, qu’on a du mal à ne pas qualifier de mercenaires.

De quoi permettre aux Etats-Unis, qui ont déployé environ 2000 militaires en Syrie, de s’y maintenir à moindres frais (zéro mort américain) tout en entretenant sans fin la guerre en Syrie.

 

Que tous les Syriens périssent pourvu qu’Assad s’en aille, voilà l’objectif ?

Parfait.

 

NB : la Ghouta veut dire l’oasis en français. No comment.

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LES RÉACTEURS NUCLÉAIRES

6 Mars 2018 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

LES RÉACTEURS NUCLÉAIRES

 

Les réacteurs nucléaires sont en pleine évolution, dans un futur caractérisé par la croissance démographique et une évolution des styles de vie des sociétés humaines qui font la part de plus en plus belle à la consommation de l’électricité.

 

Regardons donc froidement, ce qui est un paradoxe compte-tenu du sujet, comment fonctionne un réacteur nucléaire pour comprendre comment les centrales vont évoluer et pourquoi elles vont se multiplier, malgré les risques.

Tout part du phénomène naturel de la radioactivité.  Certains atomes sont stables, d’autres sont instables ce qui se traduit par l’expulsion de particules et d’une grande quantité d’énergie qui permet à ces derniers d’atteindre une plus grande stabilité. Cette recherche de stabilité, que l’on appelle « réaction nucléaire », concerne donc les atomes les plus instables, des atomes lourds contenant de nombreux protons et neutrons.

La fission nucléaire est la division d’un atome lourd en deux ou plusieurs parties. Elle a été décrite pour la première fois le 17 décembre 1938 par deux chimistes berlinois. Par la suite, les physiciens ont cherché à provoquer cette réaction nucléaire tout en la contrôlant à l’intérieur d’une enceinte, ce que l’on appelle le cœur d’un réacteur nucléaire.

Le principe d’un réacteur nucléaire consiste à envoyer des neutrons percuter des atomes lourds pour provoquer leur fission. Car, lorsque l'un de ces atomes lourds capture un neutron, il devient encore plus instable, ce qui accroit sa tendance à se diviser en deux (ou plus) noyaux principaux. Mais cette fission entraine la libération de quelques neutrons, qui a leur tour peuvent percuter d’autres noyaux, provoquant, ou non, leur fission qui peuvent à leur tour fissionner.

On se trouve alors devant une réaction en chaîne qui, si on ne la freine pas, peut devenir incontrôlable et se transformer en explosion nucléaire. Trois types d’accidents conduisent à cette explosion, la perte de contrôle de la fission, appelée accident de criticité, la fusion du cœur par surchauffe et la perte totale du refroidissement.

Aussi le pilotage d'un réacteur nucléaire repose t-il sur un équilibre entre le maintien d'une masse critique (ou suffisante) de matériau fissile au coeur du réacteur pour que la réaction en chaine est lieu et son contrôle pour éviter l’explosion.

Tout un ensemble de techniques sont mises en œuvre pour parvenir à cet équilibre. La réaction en chaine est entretenue par un réflecteur de neutrons, tandis que le contrôle de la réaction s'effectue à l'aide d’un matériau qui absorbe les neutrons. Ce matériau est composé de barres de contrôle qui peuvent être introduites ou retirées du cœur du réacteur selon les besoins,  tout en évitant aussi que les sous produits de la fission n'étouffent le processus.

C’est tout un équilibre, délicat.

Mais à la base, pour qu’il y ait une réaction en chaine, il faut que les atomes lourds, que l’on appelle des noyaux fertiles, capturent les neutrons. Pour cela, la vitesse des neutrons ne doit pas être trop grande, sans quoi ils sont difficilement capturés par les noyaux. 

Du coup, dans la majorité des réacteurs, on cherche à ralentir les neutrons en les refroidissant dans ce que l’on appelle des réacteurs thermiques.  Mais il existe aussi des réacteurs à neutrons rapides qui ne fonctionnent qu’avec des atomes lourds particuliers, les noyaux fissiles, qui sont  capables de capturer même des neutrons rapides. Seuls quelques matériaux nucléaires ont cette capacité, comme le plutonium 239.  

 

Les réacteurs à neutrons rapides ont l’avantage d’être plus efficients que les réacteurs thermiques, mais ils sont plus difficiles à contrôler. C’est pourquoi on a tout d'abord développé des réacteurs thermiques, qui constituent la quasi totalité des réacteurs actuels.

 

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ENSEIGNER À DAKAR

1 Mars 2018 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

ENSEIGNER À DAKAR

 

Après ces prémisses, vinrent le début des cours et ma raison d’être à Dakar s’en trouva justifiée, ou presque.   

 

Vers le début de novembre 1980, les cours commencèrent. Pour le premier semestre, on m’avait attribué deux cours de trente heures chacun, ce qui correspondait à deux heures de cours par jour du lundi au mercredi,  qui avaient lieu soit de huit heures à dix heures, soit de dix heures à midi. Ce n’était pas écrasant et je me suis souvent retrouvé le mercredi à dix heures du matin me demandant ce que je pourrais bien faire d’utile jusqu’au lundi suivant.

Les réponses vinrent progressivement, comme je l’ai observé précédemment…

Mes deux premiers cours concernaient la comptabilité analytique en 2eme année de Maitrise de Sciences Économique et de Gestion et l’économétrie en 4emeannée. Le semestre d’aprés, j’aurai à traiter du marketing et des techniques quantitatives de gestion. Ces deux premiers cours furent des découvertes à des titres divers. En effet, les deux cours se situaient aux frontières de mes compétences et j’avais d’ailleurs expressément demandé de ne pas être chargé d’enseigner le cours de comptabilité analytique. Mais enfin j’étais officiellement professeur en Sciences de Gestion, de toutes les sciences de gestion, et je m’attelais à la tâche.

Le grand amphi  rassemblait jusqu’à mille deux cent étudiants qui venaient pour la plupart au cours de comptabilité analytique. Ils étaient calmes et respectueux, j’avais un micro puissant, tout allait bien, officiellement.

Cependant, je me souviens d’un jour de grève générale où ils n’étaient plus que quatre, au lieu d’un millier, dans le grand amphi. Trois devant moi, une étudiante loin au fond. Je pensais qu’elle était venue pour la climatisation, ou pour toute autre raison. Je coupais le micro. L’étudiante protesta. Je lui rappelai qu’elle pouvait se rapprocher. Elle ne réagit pas avant dix bonnes minutes avant de finalement obtempérer en me donnant raison, avec un grand sourire. Ce délai m’étonna.

Mais je ne tardai pas à comprendre le message: il  subsistait des difficultés de communication entre les étudiants et moi. Cela  se traduisit par 40% de notes éliminatoires à la fin du semestre. La réaction de l’administration universitaire fut parfaite : elle supprima le principe des notes éliminatoires et elle me déchargea de ce cours. Tout le monde était content.

L’examen relatif au cours d’économétrie acheva de m’instruire sur la nécessité de m’adapter au contexte, et non l’inverse. Un de mes excellents collègues, Philippe Engelhard, enseignant expérimenté à Dakar, longtemps détaché à l’Enda, une ONG basée au Sénégal, auteur d’un ouvrage prémonitoire, L’Homme Mondial, donc un expert des rapports entre étudiants sénégalais et enseignants français, me conseilla d’afficher dés la fin de l’épreuve sur le tableau placé devant la salle des professeurs le corrigé de l’examen. D’après lui, cela plairait aux étudiants. J’écrivis donc soigneusement ce corrigé et en placarda les feuillets, fier de moi.

Quelle ne fut ma surprise de voir ces feuillets arrachés et moi-même pris à partie par des étudiants survoltés, qui, après m’avoir bousculé, se détournèrent heureusement de ma personne pour courir en foule réclamer justice auprès du Doyen Ibou Diaité, un collègue sénégalais heureusement fort expérimenté.

Ce dernier les invita calmement à rédiger une réclamation, ce qu’ils firent. Dans la lettre adressée aux autorités, ils contestaient à la fois la forme et le fond de mon corrigé, car d’une part ils prétendaient que cet affichage rapide était destiné à les démoraliser pour la suite des examens et que d’autre part le contenu du corrigé était manifestement erroné.

La réclamation suivit son cours. Elle fut transmise du Doyen au Recteur, qui l'adressa au Ministre de l’Enseignement Supérieur, qui la porta à la Primature (fonction de Premier Ministre) qui à son tour la fit monter jusqu’au Cabinet du Président de la République, Abdou Diouf. Ce cabinet, refuge d’énarques ne sachant que faire de ce brûlot, entreprit de faire redescendre la note selon la même voie afin que le principal intéressé, moi-même, présente sa défense.

Le  bienveillant Doyen Diaité me convoqua, nota précisément ma réponse orale (« Que des conne..., tout ça ! »), renvoya la réclamation enrichie de mon commentaire le long du circuit hiérarchique et on en n’entendit plus jamais parler.

Il est vrai qu’il y avait alors belle lurette que tout le monde, à commencer par les étudiants, avait oublié l’incident, mais j’avais appris au passage que ces derniers, généralement forts respectueux, n’étaient ni dans les conditions ni dans l’état d’esprit de mes étudiants français.

 

Je ne serai utile dans mes fonctions que si je parvenais à m’adapter au contexte sans capituler sur le fond, à savoir remplir la fonction dont j’étais chargé, transmettre mes connaissances. Mais lesquelles et en quoi leur seraient-elles utiles ?

 

À SUIVRE

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