Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog d'André Boyer

COMMENT SORTIR DE LA CRISE GRECQUE?

29 Janvier 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

COMMENT SORTIR DE LA CRISE GRECQUE?

LES GRECS ONT SU DANS LE PASSÉ TRANCHER LE NOEUD GORDIEN

 

Une étude fondée sur des articles scientifiques a fait la synthèse des conséquences des crises financières sur la croissance économique en janvier 2012 (document attaché ci-joint). Les auteurs de cette étude observent que le partage des pertes entre créanciers et débiteurs permet de sortir plus rapidement d’une crise financière que lorsque toute la charge de la crise est supportée par les emprunteurs. Il m’a inspiré les réflexions suivantes :

 

La crise des pays du sud de l’Europe tourne autour de leur capacité à rembourser leurs dettes. La Grèce a bénéficié d’une remise conséquente de ses dettes, mais ces dernières restent si importantes que l’on doute fort qu’elle pourra jamais les rembourser. On a pressé les Grecs de mettre en place des réformes qui permettent de rembourser plus de dettes tout en sachant que la croissance déjà négative en pâtirait encore et donc réduirait leur capacité de remboursement.

On imagine des réformes structurelles qui permettraient d’augmenter la production grecque, mais sans accroître la consommation, comme si l’augmentation de leur pauvreté pourrait être la solution. Enfin l’odieux l’a disputé au ridicule lorsqu’on les a menacés en 2012 de mesures de rétorsion s’ils ne votaient pas en faveur des partis qui prônent des mesures d’austérité, comme ont cru le faire à l’époque Christine Lagarde ou François Hollande dans leurs adresses aux Grecs.

Comme on peut le constater aujourd’hui, les Grecs ont choisi de dire non aux menaces des hiérarques européens, afin d’obtenir une chance d’échapper à leur appauvrissement continu.

Or l’on sait, par le biais d’études scientifiques non encore contestées, que l’annulation des dettes et l’inflation permettent de sortir plus rapidement d’une crise économique que le remboursement des dettes ou la stabilité des prix.

Tout le problème se situe dans le processus politique qui permettrait de transférer la charge de la dette des débiteurs aux créanciers. Comment l’Union Européenne peut-elle se résoudre à annuler les dettes de la Grèce ? Impossible sans mettre en danger tout le système financier européen qui ne pourrait plus trouver de prêteurs. Impossible sans transférer la charge sur les contribuables européens, d’où les appels à la mutualisation des dettes largement relayés par les créanciers, une solution qui ne reviendrait qu’à diffuser la crise et non à en sortir.

Mais en définitive, tout le monde sait, pressent ou devine que la sortie de la Grèce de la crise passe par la quasi-annulation de sa dette et par l’inflation.

On cherche les responsables politiques qui sont prêts à en assumer le risque de la décision d’annuler la majeure partie de la dette grecque, parce que les crises de l’endettement et des monnaies, les difficultés des banques et la quasi-déflation conduisent à des conflits idéologiques qui entraînent le fractionnement voire l’éclatement des forces politiques.

D’ailleurs, les études historiques citées dans l’article en référence montrent que le blocage politique après une crise financière est la norme plutôt que l’exception, car l’impact des crises sur les croyances des électeurs vis-à-vis des solutions économiques qui leur sont proposées a pour effet de les remettre en question en s’interrogeant sur la mondialisation et le libéralisme qui ont permis qu’une telle crise est lieu.

De plus, la crispation des débiteurs qui se trouvent dans l’impossibilité de rembourser, comme celles des créanciers qui ressentent l’impérieuse nécessité de se faire rembourser dans des situations de crise rendent les solutions de compromis particulièrement délicates à faire accepter par les deux parties.

Cette montée des conflits entre créanciers et débiteurs s’observe aujourd’hui entre l’Allemagne et le Sud de l’Europe. Elle a aussi caractérisé la grande crise de 1929, opposant fascisme et socialisme jusqu’à la guerre de 1940-1945. On a vu récemment les créanciers de l’Argentine lui refuser obstinément tout accès au crédit international  de peur d’une contagion du non-remboursement des dettes, aux dépens du développement de l’économie argentine. On a vu, avec moins de succès, l’Islande subir les mêmes menaces et aujourd’hui la Grèce essuyer les mêmes foudres si jamais elle s’avisait de cesser de rembourser ses dettes. 

Et pourtant l’annulation des dettes argentines et islandaises, pour ne citer que ces deux pays, a indubitablement favorisé leur redémarrage économique. Mais n’allez pas demander aux créanciers d’acquiescer ! Le risque est donc que l’absence d’accord de compromis n’approfondisse et ne prolonge la crise économique qui succède à la crise financière, entraînant dans un cercle vicieux des tensions politiques qui rendent encore plus difficiles la mise en place d’une solution de compromis entre créanciers et débiteurs. Jusqu’à quel séisme faudra t-il aller, qui rassemblera enfin les protagonistes autour d’une solution de survie commune?

 

J’ai publié le blog que vous venez de lire, mot pour mot, à l'exception de quelques détails d'actualisation, la 14 juin 2012, il y a donc deux ans et demi. On constatera que le blocage que j’observais à l’époque est toujours en vigueur, sauf que la situation poitique grecque a changée. Les verrous vont-ils sauter ? À suivre...

 

Resolving Debt Overhang: Political Constraints in the Aftermath of Financial Crises*

Lire la suite

ÉTAT DE CHOC

25 Janvier 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

ÉTAT DE CHOC

GRAND HOTEL DU CAP FERRAT

Pour présenter mon état d’esprit au début 1976 lorsque je reçus le verdict de mon Directeur de thèse, il me faut relater la nature de mes activités à l’automne 1975. Il faut convenir qu’elle était assez particulière.

 

À plusieurs égards, le mois de septembre 1975 avait été éprouvant. Ceux qui ont déjà organisé un congrès savent à quel point cette tâche est complexe et épuisante. En outre, je me trouvais contraint d’y faire face alors que j’étais submergé par des problèmes familiaux.

Aussi étais-je au bout du rouleau en ce début d’octobre 1975, alors que les cours reprenaient dans huit jours ! que faire ? Je me retournais vers l’agence de voyages qui avait géré les aspects touristiques du congrès, l’Agence Contours et son directeur, Monsieur Clément, me suggéra de prendre des vacances sur la Côte d’Azur.

Il m’offrait de m’installer dans le magnifique Grand Hôtel du Cap, qui n’avait toutefois pas encore été rénové, ce qui me permis d’obtenir un prix négocié très bas. Pendant une semaine grâce à lui, je pus vivre comme un milliardaire en séjour sur la Côte d’Azur, réveillé dans mon immense chambre prolongée par une toute aussi vaste terrasse par les bruits des barques de pêcheurs. Le soir, je soupais en compagnie silencieuse des quelques veuves américaines qui étaient encore présentes au Cap en cet automne languissant, tandis que dans la journée je recevais mes amis, partageant tennis et piscine. 

Le premier jour de mon séjour, je m’étendis près de la piscine et ouvris un livre qui traînait à la maison depuis des mois, La Plaisanterie, de Milan Kundera. Ce livre entra si fortement en résonance avec mes préoccupations et mes croyances du moment que j’en fus incroyablement bouleversé et m’en souviens encore.

Cet intermède luxueux de la première semaine d’octobre fut suivi de la reprise immédiate des cours, qui était bienvenue dans la mesure où elle me ramenait sur terre. Elle s’accompagna rapidement, au titre de Chargé de Mission, d’une énorme tâche supplémentaire, le lancement de l’Université du Troisième Age à titre permanent après l’expérience réussie du printemps 1975 (voir mes articles antérieurs sur le lancement d’U3).

Cependant je parvenais, tant bien que mal, à achever une première version du manuscrit de ma thèse, qui faisait quelque trois cents pages et que je remettais fin 1975 à mon Directeur de thèse, le Professeur Jean-Claude Dischamps, en espérant qu’il approuverait mon approche fondée sur la relation entre la croissance des entreprises et la fiscalité.

Il lui fallut deux mois environ pour me retourner mon texte, couvert de remarques et de corrections. Un échange téléphonique avec ce dernier, qui était entre-temps devenu Recteur de l’Académie de Clermont-Ferrand après avoir été Directeur de l’Enseignement Supérieur des Ministres Jean-Pierre Soisson et Alice Saunié-Seité, me convainquit que j’avais vraisemblablement tout faux.

J’avoue que je le pris très mal. J’avais le sentiment, fortement subjectif, d’avoir bien travaillé et d’avoir rendu un travail globalement acceptable. Or mon directeur de thèse, qui avait lu très consciencieusement mon manuscrit, puisqu’il apparaissait qu’il y avait consacré de (trop) nombreuses soirées, était d’un avis contraire. Avec toute la diplomatie qu’il savait instiller dans ses propos, il estimait que ma thèse n’était pas vraiment une thèse, mais une sorte de récit relatif aux relations entre la fiscalité et la dynamique des entreprises, qui n’avait malheureusement pas valeur de démonstration scientifique.

Je me souviens fort bien m’être laissé aller à lui rétorquer, avec dépit, que s’il trouvait mon travail si mauvais, il n’avait qu’à l’écrire lui-même ! Propos dont je mesurais l’absurdité, aussitôt après l’avoir prononcé. C’était une manière, méchante, de lui faire porter indument la responsabilité de la mauvaise qualité de mon travail ma thèse. Pourtant, il avait fait tout ce qu’il pouvait et au-delà, pour me donner les moyens de rédiger ma thèse, dans la mesure où ses responsabilités ne lui permettaient pas de suivre mon travail de très prés. J’étais d’ailleurs le mieux placé pour identifier la source de mes difficultés : ma concentration insuffisante sur le sujet.

Après ce mouvement d’humeur, je me trouvais bien marri. Depuis plus de trois ans, que de mouvements, décris dans mes blogs précédents : la campagne électorale que j’ai brièvement évoquée,  les deux séjours aux Etats-Unis, l’invention de l’Université du Troisième Age, les colloques à l’étranger, les articles, le congrès de l’IIFP à Nice, que de rencontres, de découvertes, d’avancées mais qu’en restait-il au bout de tous ces cheminements disparates? Un travail doctoral sans queue ni tête dont dépendait tout mon avenir, alors même que ma vie familiale avait suivi le même chemin. Quel gâchis, quelle dispersion, quel résultat pitoyable !

Elle était loin la semaine de rêve à Saint-Jean-Cap-Ferrat, elles étaient envolées les ambitions qui gonflaient les voiles de notre famille, lorsqu’elle revint s’installer à Nice en octobre 1972.

 

J’étais dans une impasse!

 

Lire la suite

LE CAPITAL DES COOPÉRATIVES

21 Janvier 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

LE CAPITAL DES COOPÉRATIVES

FRIEDRICH WILHELM RAIFFEISEN

 

Les quatre principes de base des pionniers de Rochdale (RSEP) sont toujours les fondements du mouvement coopératif, après plus d'un siècle et demi d’expérience:

  • La règle d'égalité, qui se traduit par « un homme, une voix »
  • La règle de liberté, qui laisse à chacun le choix d’adhérer ou de quitter la coopérative. chacun peut adhérer ou s'en aller.
  • La règle de justice qui implique que la répartition des bénéfices se fasse au prorata des activités de chaque membre.
  • La règle d'équité qui fait que la rémunération des apports en argent est limitée.

Si la RSEP est une coopérative de consommation, on verra aussi se créer des coopératives de production, telle que celle constituée entre les bijoutiers en doré, pour qui, à l’instar de Robert Owen, l’objectif proclamé est de faire « disparaître l'hostilité qui existe aujourd'hui entre les chefs d'industrie et les ouvriers ».

Puis, en 1864, Friedrich-Wilhelm Raiffeisen fonde en Rhénanie la première société coopérative de crédit mutuel. En France, pour lutter contre la Caisse rurale et ouvrière d’inspiration catholique, Jules Méline, Président du Conseil, favorise en 1894 la création du Crédit agricole mutuel.

L'année 1888 voit la naissance de la première coopérative agricole française, la Laiterie coopérative de Chaillé, sur un modèle danois datant de 1882. Des coopératives d'habitation, de commerçants, de transport, d'artisans, de marins ou d'armateurs vinrent s'y ajouter pour former ce qui constitue aujourd'hui le mouvement coopératif.

Socialisme utopique, réformisme et catholicisme social se rejoignent pour promouvoir une forme d'entreprise qui ne se limite pas au seul champ économique. L’activité de la coopérative est présentée comme un moyen de promouvoir une finalité collective. Contrairement à l'entreprise capitaliste qui ne se reconnaît pas de responsabilité sociale, encore que l’on invoque aujourd’hui l’entreprise citoyenne, l'entreprise coopérative revendique une responsabilité limitée à ses membres, actuels ou futurs, mais pour le bien de toute la collectivité.

Cette responsabilité sociale s'est exprimée de diverses manières. En France, la Fédération nationale des coopératives de consommation, disparue en 1980, avait créé un Laboratoire d'analyses coopératif qui a été une des bases du mouvement consumériste. En Grande-Bretagne, le Retail Organization Group et la Cooperative Retail Service ont réinvesti leurs bénéfices dans un ensemble d'usines agro-alimentaires et d'exploitations agricoles, dans une banque coopérative et dans une société d'assurances. En Espagne, le groupe Mondragon, un ensemble de coopératives de production, s'est fixé pour mission de faire du Pays basque espagnol une zone de plein-emploi.

Le capital des coopératives

Comme il s'agit d'effectuer une activité économique, les fonds nécessaires sont recueillis auprès des coopérateurs sous forme de parts sociales, dont le montant est fixé à un niveau suffisamment bas pour ne pas constituer un obstacle à l'adhésion. Dans les coopératives de production, les coopérateurs affectent une part déterminée de leur salaire à la souscription de parts sociales. Dans les autres coopératives, la souscription de parts est proportionnelle aux services rendus. Dans tous les cas, lors du retrait du coopérateur, ce dernier peut récupérer sa mise de fonds. Mais contrairement aux entreprises capitalistes, c’est la  coopérative qui décide, avec quelques exceptions, du montant à rembourser aux coopérateurs qui se retirent, alors que l'espoir d'une plus-value est le principal moteur d'achat des actions.

Le caractère impartageable des réserves justifie dans le régime coopératif français l'exemption fiscale dont les bénéfices non distribués font l'objet. Au contraire, dans une entreprise classique, les bénéfices non distribués entraînent une augmentation de la valeur marchande de l'entreprise et sont donc taxables.  

C’est une première différence significative avec les entreprises dites classiques.

 

À SUIVRE

Lire la suite

LA SUISSE LÂCHE BRUSQUEMENT LA LAISSE

18 Janvier 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

LA SUISSE LÂCHE BRUSQUEMENT LA LAISSE

LA BANQUE NATIONALE SUISSE

 

Depuis le jeudi 15 janvier à 10 heures 3O, la banque nationale (BNS) a décidé d’abolir le cours-plancher de l’euro par rapport au franc qu’elle avait fixé à 1,20 franc depuis le 6 septembre 2011. Dés ce moment, l’équilibre s’est situé à la parité.

 

Il s’agit pour la BCE de se protéger contre les risques de pertes de change induits par les mesures que devrait prendre jeudi prochain la Banque centrale européenne (BCE), avec l’achat massif d’obligations souveraines et de ne pas laisser le franc suisse baisser face au dollar, en s’accrochant à l’euro.

La décision de la BNS a surpris tous les opérateurs, dont certains, pris à contre-pied se sont déclarés en faillite. L’industrie, notamment horlogère, et le tourisme suisse sont inquiets. Les frontaliers ont soudainement bénéficié de 20% de hausse de leur pouvoir d’achat en euros, mais leur emploi est menacé avec la baisse de compétitivité de la Suisse.

Du point de vue économique, avec un Euro qui n’en finit plus de baisser et qui vient de perdre brutalement 20% de sa valeur face à une économie suisse non négligeable, la décision de la BNS devrait être favorable à la zone Euro.

Mais les medias insistent moins sur les conséquences de cette décision sur les emprunts émis par les États, en particulier celui de la France qui est le plus grand emprunteur mondial.

Pour répondre à cette question, je vous renvoie au blog que j’écrivais sur ce sujet le 27 septembre 2O12 et que j’avais intitulé « La Suisse tient l’Europe en laisse », ce qui justifie le titre du présent blog (je me cite) :

« Où est donc le revers de la médaille ? il se cache dans les achats de devises de la BNS. Pour maintenir le taux de 1,20 Franc Suisse pour un Euro, chaque Suisse, par l’intermédiaire de la BNS achète chaque jour 100 euros sur le marché monétaire !  Il en résulte que, comme celle de la Chine, ses réserves de change ont explosé, si bien qu’elles dépassent désormais celles de l'ensemble des banques centrales de la zone euro !

Bien entendu, les Suisses ne veulent pas que la BNS prenne des risques sur son bilan : ce ne sont pas eux qui iraient acheter des emprunts grecs ou espagnols. Prudemment, ils se concentrent sur les emprunts notés double ou triple A, essentiellement allemands et français, devenus les grands gagnants des achats suisses, mais aussi dont les taux dépendent de plus en plus de la politique de la BNS.

L’agence Standard & Poor observe que la BNS, en achetant pour 80 milliards d’Euros, rien que pendant les sept premiers mois de l’année 2012, a fortement contribué à réduire les coûts des emprunts allemands et français… »

Le brusque changement de la politique de la BNS revient donc à faire disparaître un acheteur considérable des emprunts français, et donc à provoquer à terme une hausse de leurs taux d’intérêt.

Tout concours à la baisse continue de l’euro, la décision de la BNS, la décision à venir de la BCE, le futur chantage du gouvernement grec, la nécessité pour la France de s’occuper en priorité de sa sécurité par rapport aux contraintes économiques, la future révolte espagnole.

De plus les opérateurs vont provoquer, pour éviter les pertes, une accélération de cette baisse et, en réponse, une montée des taux d’intérêt pour la freiner, lorsqu’un niveau plancher sera atteint du point de vue de la BCE. 

En tant qu’agent économique, il vous appartient d’anticiper cette baisse, avant de vous demander à quel niveau elle s’arrêtera dans le futur : 1,15$, le cours d’aujourd’hui, la parité, 0,85$, le cours-plancher atteint dans le passé ou 0,75$, pourquoi pas ?

Personne ne connaît ce taux plancher aujourd’hui, mais vous comprenez que les préteurs d’un euro lorsqu'il valait 1,50$ vont être particulièrement mécontents d’être remboursé avec un euro qui n'en vaudrait plus que la moitié et vous pouvez comprendre en conséquence qu’ils ne vont pas se précipiter pour accroître leurs engagements.

Vous comprenez enfin que les arguments en faveur de la sortie de l’euro sont soudain en train de disparaître, provisoirement…

 

Merci, les Suisses, de nous avoir brusquement fait prendre conscience de tous ces événements à venir !

Lire la suite

LE LENDEMAIN ET APRÉS?

13 Janvier 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

LE LENDEMAIN ET APRÉS?

LA FRATERNISATION DE MAI 1958

Comment ne pas saluer l’émotion qu’ont exprimée les millions de personnes qui ont défilé à Paris et dans de nombreuses villes en France et à l’étranger ?

 

Cette émotion autour de la valeur « liberté » me rappelle d’autres  émotions collectives, fortement liées à celle du 11 janvier 2015.  Pendant deux semaines, en mai 1958, Alger fut le théâtre de manifestations impressionnantes rassemblant des foules de toutes origines sous les plis du drapeau tricolore, pour démontrer à la métropole leur volonté unanime de rester françaises. 

Naturellement, par la suite, le FLN nia la spontanéité de ces manifestations et De Gaulle contesta leur importance. Le 18 mars 1962, les accords d’Evian signifiaient que les Algériens musulmans étaient tellement différents des Français non musulmans qu’ils n’avaient plus leur place dans la République Française.

C’était une nouveauté extraordinaire. Car en novembre 1954, le Président du Conseil, Pierre Mendés France, avait déclaré devant l’Assemblée Nationale : « L’Algérie, c’est la France, et non un pays étranger que nous protégeons ». C’est ce que pensait la majorité des dirigeants comme de la population française et à cette date tous les Algériens étaient, en droit, des citoyens français. En conséquence, pendant le déroulement de ce que l’on appelait les « évènements d’Algérie », les autorités françaises, conscientes des différences, étendirent exponentiellement les droits de la citoyenneté pour les français musulmans et mirent en œuvre des politiques publiques fondées sur la discrimination positive à leur bénéfice, en France métropolitaine comme en Algérie.

 

On ne saura jamais s’il y avait vraiment une chance, en mai 1958, pour que les Français « musulmans » d’Algérie deviennent enfin pleinement français…

 

Mais le problème algérien semblait trop lourd pour la métropole. Pour s’en débarrasser, l’idée s’est imposée, sous l’impulsion d’un De Gaulle expéditif, que l’Algérie devait être indépendante parce que les Algériens n’étaient décidément pas des Français.

Cela permettait d’éviter de regarder de front la question des différences raciales, ethniques et religieuses, d’autant plus que la République Française s’était toujours refusée, en fonction de ses principes universalistes, à établir des différences entre les races. C’est ainsi que la Ve République a donné naissance à une république presque entièrement européenne en expulsant les Algériens hors de France, tout en proclamant, contre toute évidence, qu’elle maintenait fermement ses principes fondateurs.  

Mais voilà, les Algériens, les Maghrébins et bien d’autres sont venus s’installer sur le sol de l’ancienne métropole et les voici à nouveau Français. Toutefois, ils ne sont pas très contents. Ils se plaignent de discriminations, ils trouvent que l’on insulte leur religion, ils réclament des droits spécifiques, le voile, la nourriture halal. Face à ces différences, qu’a fait la République ? Jusqu’ici, elle s’est contentée de les nier.

 

C’est ainsi qu’en ce début 2015, nous sommes ramenés à mai 1958.

 

À cette époque, la France avait la possibilité de construire une communauté nationale allant de « Dunkerque à Tamanrasset », à condition d’appliquer vraiment les principes de l’universalisme. Demain, allons-nous encore rejeter, sans naturellement le dire ouvertement, les français arabes, maghrébins ou musulmans selon qu’on les catégorise en fonction de critères raciaux, géographiques ou religieux? Ils auraient alors vocation à être réprimés ou expulsés à nouveau de la République.  

Ou bien allons nous construire une République qui les accueille dans leurs différences en leur imposant les devoirs afférents ?

Dans le premier cas, une nouvelle guerre, de France cette fois-ci, commence avec son cortège d’attentats et de contre guérilla. Les actes terroristes poussent dans ce sens tandis que les autorités, faisant étrangement écho au Mitterrand de 1954, déclarent d’ores et déjà que la France « est en guerre » et mobilisent dix mille hommes, plus que l’ensemble des effectifs engagés dans les opérations extérieures, pour commencer à y faire face.

Dans le second cas, allons-nous être enfin prêt à faire face aux différences, à les reconnaître et à les organiser ? De Gaulle nous aurait alors fait perdre 56 ans et Tamanrasset, mais après tout il n’est jamais trop tard pour reconstruire.

 

En écho à cet espoir, on peut croire, ou du moins espérer, que les marcheurs et les non marcheurs aient voulu exprimer, par leur émotion, qu’il était temps de nous réinsérer dans le fil de l’histoire, brisé quelque part entre 1958 et 1962.

 

 

PS : On lira avec profit sur ce sujet l’ouvrage de Todd Shepard: 1962, Comment l'indépendance algérienne a transformé la France, Payot, 2008.

Lire la suite

LE DIRECTOIRE PASSE LA MAIN À BONAPARTE

10 Janvier 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

LE DIRECTOIRE PASSE LA MAIN À BONAPARTE

UNE AUDIENCE PUBLIQUE DU DIRECTOIRE

La suite du coup d’État du 19 brumaire ne fut que routine.

 

Les Cinq-Cents expulsés, le président des Anciens faisait voter un décret constatant « la retraite » du conseil des Cinq-Cents et nommant une commission exécutive provisoire de trois membres remplaçant les Directeurs.

Bonaparte et Sieyès complétaient cette première mesure par une réunion hâtive d’une cinquantaine de députés qui votaient, sous la présidence de Lucien Bonaparte, leur reconnaissance à Bonaparte et aux autres généraux présents. De plus, ils nommaient Bonaparte, Sieyès et Ducos membres de la commission exécutive, qui porteraient désormais le titre de consuls.

Vers 4 heures du matin, le 20 brumaire (11 novembre 1799), deux commissions étaient  nommées pour discuter de la nouvelle constitution avec les consuls.

Un mois plus tard le 15 décembre 1799, les trois nouveaux consuls, Bonaparte, Cambacérès et Lebrun, présentaient la nouvelle constitution aux Français et ils proclamaient « Citoyens, la Révolution est fixée aux principes qui l'ont commencée: elle est finie ! »

La population fit le gros dos : elle avait désormais l’habitude des coups d’État. Mais cette fois-ci, c’était l’armée prenait directement le pouvoir en la personne de Bonaparte, qui se représentait comme un miraculé,  « sauvé de l'assassinat par les grenadiers du corps législatif Bonaparte parvient à déjouer un complot Jacobin liberticide et menaçant les propriétés ». Comme par miracle, les journaux reparaissaient le lendemain, la rente montait, les propriétaires se ralliaient à Bonaparte qui situait son action au-dessus des partis, ne se voyant « ni bonnet rouge, ni talon rouge ».

Déjà une telle solution institutionnelle était en filigrane depuis que l’armée s’était imposé comme le principal soutien du régime lors du coup d’État du 18 fructidor (4 septembre 1797). L’intermède du Directoire s’achevait  qui était devenu le champ clos de trois coups d’État, entre mai 1797 et novembre 1799, en raison du refus du Directoire d’accepter le verdict des urnes. Plus exactement, le constat que les électeurs étaient plus que jamais royalistes restait inacceptable pour des dirigeants politiques régicides, qui craignaient pour leur vie, pour des généraux ivres des succès obtenus grâce à la levée en masse, et pour des jacobins viscéralement opposés à la royauté, au nom de l’égalité et de l’anticatholicisme.

De ce fait, l’avis des électeurs, et plus encore du peuple, ne comptait pas, pire que cela, il devait être combattu. Ce qui conduit à nous interroger sur la période pendant laquelle l’opinion du peuple a été entendue pendant la Révolution, si ce n’est lors de la rédaction des Cahiers de Doléance. On se demande même  pendant quelles périodes de l’histoire de France l’avis du peuple a été sollicité et entendu ?

On observe, pendant la période du Directoire, la réaction des électeurs bafoués : l’abstention massive de quatre-vingt dix pour cent d’entre eux, pendant le Directoire et au cours de presque toute la Révolution sauf au tout début. Si les électeurs sont royalistes, ils deviennent ensuite Jacobins lorsque la répression s’abat trop fortement sur les premiers.

En outre, le Directoire est résolument anticatholique, au point d’encourager une pseudo religion, la théophilantropie, non seulement parce que le catholicisme est du côté des royalistes, mais parce qu’il est source de morale, alors que la seule morale que puisse accepter le Directoire est celle qu’il produit lui-même et qui vise à affermir son pouvoir. La volonté d’affaiblir le catholicisme explique aussi les décisions d’encourager le protestantisme et le judaïsme prises par les divers gouvernants depuis le début de la Révolution.

Cependant le Directoire n’est pas comparable à la Terreur en termes de tentative de contrôle des esprits, mais il s’en approche lorsqu’il sent le vent du boulet royaliste. Ce n’est qu’affaire de circonstance que la Terreur ne resurgisse pas, et non pas volonté ou philosophie politique.

De plus, le Directoire crée de nouveaux impôts et spolie les épargnants, dés qu’il se sent assez fort pour le faire, tout de suite après le premier coup d’État. Bien fou qui compte sur son respect de la parole donnée, le gouvernement des hommes étant affaire de rapports de force et non de morale, comme Machiavel l’a assez enseigné.

Ce qu’il faut retenir du Directoire, c’est sa culture du coup d’État, son anticatholicisme et sa tentation de la Terreur lorsque le pouvoir vacille. Puis, lorsqu’il a épuisé toutes les recettes précédentes, il repasse la main à un militaire. C’est un processus qui se renouvelera à plusieurs reprises après le Directoire, qui est une période de basculement vers un pouvoir d’essence militaire.

Car la force du Directoire réside dans les énormes effectifs militaires dont il dispose, bien supérieurs à celui des coalitions qui s’opposent à lui. À la tête de ces troupes, des généraux qui savent ce qu’ils doivent à la République mais aussi ce qu’elle leur doit. Aussi est-il naturel que le plus ambitieux d’entre eux, qui se révèle être aussi le meilleur stratège, se hisse à la tête de l’État. Il faut retenir qu’il ne prend pas le pouvoir contre le Directoire, mais à sa demande.

Aussi, l’arrivée de Bonaparte ne scelle t-elle pas une rupture avec la Révolution. Jusqu’en 1814, la République demeure car les hommes au pouvoir restent, les principes subsistent, mieux encore, ils sont appliqués avec plus de rationalité, sans que la Terreur ne s’avère désormais nécessaire pour faire obéir le citoyen à l’État. Bonaparte fit ce que les politiciens n’avaient pas su faire, une organisation centralisée et rationnellement organisée, à son service, et de ce point de vue un très bon système de gouvernement se mit en place à partir de 1800, dont tous les historiens louent la logique, la cohérence et la pérennité.

 

Il est curieux qu’ils en fassent crédit à Bonaparte premier Consul, pour reprocher à Napoléon d’avoir dilapidé l’héritage, comme si le système que le premier avait mis en place n’avait rien à voir avec la série de catastrophes qui se sont abattues sur la France par la faute du second. 

Lire la suite

TRAHIR NAPOLÉON

7 Janvier 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #CULTURE

TRAHIR NAPOLÉON

TRAHIR NAPOLÈON PAR ROBERT COLONNA D'ISTRIA

Robert Colonna d’Istria vient de publier un ouvrage profond et surprenant et intitulé « Trahir Napoléon».

Qui est Robert Colonna d’Istria ?

Issu d’une grande famille originaire d’Ajaccio, comme Napoléon  Bonaparte, passant de la Corse et Marseille à l’IEP de Paris, Robert n’a jamais renié la Corse sur laquelle il a écrit plusieurs ouvrages sans négliger de s’intéresser à l’économie ou la vie publique comme en témoigne son ouvrage sur « Le Sénat : enquête sur les supe privilégies de la République ». C’est le deuxième ouvrage qu’il consacre à Napoléon après ses  « Mémoires de Napoléon »

« Trahir Napoléon » est un livre de 158 pages, composé de deux parties distinctes et complémentaires:

En premier lieu une réflexion sur le concept de trahison et une bibliographie du sujet. Cette partie est, nous allons le voir, très riche de réflexions potentielles sur le pouvoir. En second lieu, un dictionnaire qui présente les traitres à Napoléon et la nature de leur trahison. Par chance, l'ordre alphabétique désigne Talleyrand comme le traître final, ou le « Napoléon » des traîtres.

Trahir. L’auteur ne se fait aucune illusion sur la nature de la politique, voire de l’âme humaine. Le pouvoir attire les ambitieux, qui veulent « arriver » à n’importe quel prix, y compris par la trahison. Il convoque à l’appui de sa thèse les bons auteurs, Zweig, Shakespeare, Chateaubriand pour montrer que la politique appelle la trahison (j’en connais le gout âcre, même dans mon village). Une trahison justifiée de milles manières (Chirac et VGE, Sarkozy et Chirac, Monsieur et Madame Chirac, Mitterrand et tout le monde).

Le traitre, lorsqu’il réussit, est paré de toutes les vertus, il est celui qui « écrit l’histoire » au point que «l’avenir appartient aux traitres ».

Au passage, je découvre le nombre incroyable d’auteurs qui se sont passionnés pour les traitres et la trahison en général.  Et notre auteur de démontrer que le Christianisme doit beaucoup aux traitres, Judas, saint Pierre, saint Paul.

Au fond la trahison s’impose au pouvoir, tandis que celui qui l’exerce commettrait la plus impardonnable des erreurs s’il oubliait, même une seule seconde, que le plus proche de ses collaborateurs est susceptible, à tout moment, de le trahir. N’est ce pas, Monsieur De Villiers, qui avez ainsi perdu le département de Vendée ?

Napoléon, ce génie, sait tout cela. Il ne peut être que trahi parce qu’il se situe trop haut pour des traitres qui ne rêvent qu’à le ramener à leur niveau. Il s’organise pour lutter contre la trahison, diviser les pouvoirs, organiser des surveillances croisées, mais ses précautions accroissent les rancœurs. Avec Napoléon, les traitres ont de l’ouvrage. Comment abattre un homme aussi intelligent, « animé par une énergie prodigieuse », audacieux, lucide sur les autres et sur lui-même ?

L’Empereur ambitionne l’unité nationale, il essaye sans cesse de « sauver les meubles » de la Nation jusqu’au derniers instants de son épopée en juin 1815. La lecture de ses courriers est fascinante à cet égard. Alors comment le suivre, lorsque l’on veut  sauver ses propres meubles, sa propre carrière, sa peau ? C’est pourquoi les traitres à Napoléon pullulent, les imbéciles, Marmont, Ney, les caricatures, Bernadotte, Murat, Soult, Caroline, Fouché, et dominant le tout ce traitre génial ou abominable, comme l’on voudra, de Talleyrand.

Napoléon, « le pauvre diable », a tenté de sauver du naufrage le monde ancien dans lequel l’honneur est la vertu cardinale, remplacé par le monde d’aujourd’hui où « les arrivistes, les ectoplasmes, les sinueux, les souples, les accommodants connaissant leur heure de gloire ». À cet égard, il suffit de contempler le spectacle médiatique pour s’en convaincre.  

Ces réflexions amères et profondes trouvent leur illustration dans « un dictionnaire de quelques traitres à Napoléon » qui constitue la deuxième partie de l’ouvrage, qui révèle sa profondeur par l’illustration du tableau de la traitrise développé en première partie. 

 

En le refermant, songeant aux figures de quelques contemporains, je me suis demandé ce que l’on pensera demain de quelques uns de nos contemporains qui se sont révélés assez habiles en traitrise pour en tirer profit.

Je me le demande. 

Lire la suite

LA THÈSE OU LA VIE

4 Janvier 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

LA THÈSE OU LA VIE

PETER MEDGYESSY

Entretemps j’avais tout de même réussi à publier trois articles supplémentaires au cours du printemps et de l’été 1975.

 

Il s’agissait d’un article sur un impôt inventé par Monsieur Jean Serisé, conseiller de Valery Giscard d’Estaing, mais qui n’a finalement jamais été appliqué, tant il était tortueux. Il portait sur l’accroissement de la valeur ajoutée des entreprises et mon article s’appelait « La Serisette : un impôt français au cœur de la formation des prix ? ».

Comme VGE a renoncé à le mettre en application, il s’agit sans doute du seul article scientifique qui ait été publié sur un impôt qui n’a jamais existé, et malgré tout dans une revue importante, Finances Publiques (vol. 30, n°3, 1975, pp. 452-460). Une curiosité.

Le deuxième article était issu de ma collaboration avec le Professeur Kristian Palda (voir mon blog « Retour au bercail »). Il s’attaquait à une importante étude économique menée par ce génie belge du marketing stratégique qu’était le Professeur Jean-Jacques Lambin, assisté par deux autres professeurs belges de très grande qualité, Philippe Naert et Alain Bultez qui appliquaient au marketing une méthode d’optimisation connue sous le nom du théorème Dorfman-Steiner.

De notre côté, Kristian Palda et moi, nous proposions de déterminer des « Optimal development budgets tied to the marketing mix » et grâce à la réputation de mon co-auteur, nous avions réussi à publier, en anglais bien sûr, dans la revue bien connue RD Management (vol. 6, n°1, octobre 1975, pp. 1-10.).

Je prolongeais cet article essentiellement théorique par une publication que j’espérais être plus proche de la gestion pratique des entreprises, qui portait sur « L'élasticité ventes, dépenses de développement est-elle une variable opérationnelle pour les décisions commerciales de la firme? » que je faisais paraître dans notre Revue d'Économie et de Gestion, publiée par l’IAE de Nice (n°7, juin 1975 pp. 159-174.). Mais je crois que je me faisais des illusions sur le caractère opérationnel de mon travail…

Il reste que mes activités extérieures à la préparation de la thèse s’étaient multipliées au cours de l’année. Ainsi j’avais été chargé par l’IIFP (Institut International des Finances Publiques), dont Jean-Claude Dischamps était l’un des Vice-Présidents, d’organiser pour le mois de septembre 1975, son important congrès à Nice en collaboration avec Peter Medgyessy.

Ce dernier, à l’époque haut fonctionnaire du gouvernement communiste hongrois, s’exprimait parfaitement en français. Il cachait sa remarquable intelligence sous une allure et un charme de playboy. Lorsque je l’ai connu, j’ai beaucoup apprécié sa capacité d’adaptation et de négociation, sans me douter qu’il connaitrait ensuite une carrière politique remarquable, devenant ministre des Finances de la Hongrie sous le régime communiste, passant ensuite au privé en tant que président de la filiale hongroise de Paribas, avant de réapparaitre à la tête d’un ministère des Finances dans un gouvernement postcommuniste. Finalement, il a conduit le Parti socialiste hongrois à la victoire en 2002 et devint Premier Ministre de Hongrie pendant deux ans avant d’être accusé d'avoir été un membre des services secrets communistes (ce qui me paraît très vraisemblable, sinon il n’aurait pas autant voyagé) et d’avoir accru excessivement les dépenses publiques.

Après le poste de Premier Ministre, il quitta le pouvoir pour une fonction d’ambassadeur itinérant de Hongrie de 2004 à 2008 ; je ne sais pas ce qu’il est devenu ensuite.

Vous avez sans doute déjà conclu, à juste titre, qu’entre les cours, les articles, les déplacements l’organisation d’un congrès et le lancement de l’Université du Troisième Âge, le temps consacré à la structuration de la thèse s’était dangereusement réduit. Il ne s’agissait pas seulement de temps mais de concentration intellectuelle.

Je sais maintenant que tout doctorant est menacé par la tentation de s’occuper de tout sauf de la thèse, tant cette dernière sature son esprit, ce qui le pousse à la fuir sous n’importe quel prétexte tout en culpabilisant pour chaque minute volée.

Les bonnes excuses, tels que les cours, les articles scientifiques, les missions à remplir, les congrès à l’étranger, ont l’avantage de réduire ce sentiment de culpabilité diffus qui ne quitte presque aucun doctorant tant qu’il n’a pas achevé sa thèse. Le problème qui s’ajoute à la culpabilité réside dans la nécessité d’écrire lorsque le doctorant ne trouve plus aucune excuse pour refuser d’affronter le papier blanc ou la page Word.  C'est alors qu'il découvre que toute  motivation l’a quitté, qu'il ne sait plus très bien pourquoi il a décidé de faire une thèse, qu'il écrit mal et n’importe quoi.

De mon point de vue, la solution idéale consiste à s’immerger dans la thèse sans souffler, sans compensation, comme se perd le drogué, le joueur ou le sportif de haut niveau et n’émerger qu'haletant, le dos en compote, les yeux rouges, de la masse de papiers, de nuits blanches, de journées passées devant son bureau ou face à son ordinateur lorsque la thèse est finie, totalement finie.

Dans un basculement de la vie étonnant, c’est le moment où il redécouvre avec surprise et parfois avec effroi la vie, le monde, les gens, regrettant alors le « bon » temps de cet esclavage volontaire…

Ce n’est pas ainsi que j’avais opéré.

Aussi, en septembre 1975, alors que j’organisais le congrès de l’IIFP avec Peter Medgyessy, les feuillets qui contenaient mes écrits de thèse n’étaient pas encore après trois ans, ni assez nombreux, ni assez cohérents, ni surtout assez pertinents à mon goût et à celui de mon directeur de thèse.

 

J’avais bien besoin du jugement de ce dernier, que je reçus pourtant avec rage !

 

Lire la suite

2015: RUPTURE ET CONTINUITÉ

1 Janvier 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

2015: RUPTURE ET CONTINUITÉ

LE PIANISTE SELON ALAIN CHAYER

PhiloEn ce jour de l’an 2015, vous prenez comme d’habitude de bonnes résolutions que, non seulement vous ne tiendrez pas, mais que vous aurez oublié avant le 15 de ce mois

 

C’est que vous êtes esclave de la rupture artificielle du temps. Il vous a fallu à toute force fêter la fin de l’année passée (ouf, elle est enfin terminée, cette année pendant laquelle vous avez eu tant de problèmes) et célébrer la nouvelle en espérant qu’elle vous apporte joie, amour, bonheur, prospérité, réussite et que sais-je encore ?

Vous avez dû rivaliser pour sortir du banal « Bonne Année » ou « Meilleurs Vœux » pour inventer des formules originales, mais pas trop, personnalisées, mais pas trop, balançant péniblement entre le laconisme et la logorrhée verbale. Heureusement, grâce à Internet, l’horrible coutume qui obligeait à envoyer, de toutes forces avant le 31 janvier, cinquante ou cent cartes à tous ceux qui vous en avaient envoyé une a quasiment disparu !

Horrible, car vous n’aviez rien à dire, à part des banalités. C’est pourquoi l’habitude d’envoyer des sms en masse dés minuit une, le premier de l’an a aussi tendance à diminuer fortement.

 

Alors, en ce jour de l’an 2015, je vais vous révéler un secret : rien ne va changer demain, ni après demain, ni dans l’année qui vient, et c’est tant mieux. Ce sera comme l’année 2014. Vous allez vieillir tout au long de l’année 2015, et si vous arrivez au bout, ce sera encore le cas en 2016 et ainsi de suite jusqu’à votre mort.

« En fait », comme on écrit quand on ne sait pas trop quoi écrire, au cours de l’année 2015, vous allez voir déferler toutes sortes de problèmes et aussi de succès, comme pendant l’année 2014.

Rien ne va changer et ce serait dommage que vous croyez le contraire. Car cela signifie que vous vous prenez pour une feuille morte emportée par le vent, un vent qui soufflera comme par hasard dans la bonne direction l’année qui vient.

Enfin, c’est ce que vous espérez.

Je vous conseille de ne rien espérer du tout, car vous l’avez compris, je veux vous mettre en garde contre l’esprit de rupture et vous encourager au contraire à la continuité, celle de l’effort.

L’effort vers où ? Pour aller là où vous voulez aller. Et bien, continuez à vous en approcher, des pauses sans doute, mais pas de rupture dans l’effort. 

Ne me dites pas que, justement, vous ne savez pas où vous voulez aller.  Si c’est le cas, cela signifie que vous avez peur, non pas de l’avenir, mais des efforts futurs à fournir. Pas de rupture, contentez vous d’ouvrir progressivement les yeux, à votre rythme.

Mais il est bien possible que vous ne sachiez pas comment l’atteindre, votre objectif. Là encore, pas de rupture, ce n’est pas le moment de changer sans arrêt de cap, mais d’être continu dans l’effort. Car votre manque de vision va vous précipiter contre les murs et à force de chocs, vous allez finir par trouver, de manière erratique, la voie qui vous est ouverte. 

En résumé, à bas la rupture, vive la continuité.

Par conséquent, en ce début 2015, comme je ne vois pas de rupture dans la continuité, mais de la continuité dans la rupture, je vous souhaite une bonne, que dis-je, une excellente, une extraordinaire année 2015 !`

 

C’est ainsi que je parviens à rester dans la continuité de la banalité, de l’artificiel et du surfait, mais tout de même dans la continuité. Tout est bien qui continue bien…

Lire la suite