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Le blog d'André Boyer

LE DEUXIEME SEXE

21 Mars 2024 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

SIMONE DE BEAUVOIR

SIMONE DE BEAUVOIR

Le deuxième sexe est une étude sur la femme et son rôle dans la société, qui se place tout d'abord dans une perspective historique et mythique, tout en s'appuyant sur des expériences vécues.

 

Simone de Beauvoir montre comment, d'une manière ou d'une autre la femme a toujours été l'esclave de l'homme. Elle récuse l'idée d'une nature féminine, pourtant si encensée dans la littérature.

En effet l'homme tente de faire oublier à la femme sa dépendance en attribuant un charme particulier à son sexe. Or rien de naturel ni de biologique ne cantonne la femme à son rôle, car sa condition est un phénomène purement culturel :" Ce n'est pas l'infériorité des femmes qui a déterminé leur insignifiance historique, c'est leur insignifiance historique qui les a vouées à l'infériorité".

Or, un mythe forgé depuis des millénaires par les hommes à travers « les cosmologies, les religions, les superstitions, les idéologies, les littératures » laisse croire que la féminité́ constitue une condition, une nature, une essence, alors qu'il s'agit d'une situation imposée par la volonté́ de l'homme. Ainsi la maternité́ n'est qu'un phénomène culturel et « l'instinct maternel » ne saurait être inné.

Car, qu'elle soit mère, épouse, fille, prostituée, la femme ne se définit qu'en fonction de l'homme, au travers du désir masculin. L'homme est le sujet omnipuissant, la femme est l'objet et le lieu d'accomplissement de sa volonté́. Elle ne se définit que pour et par lui et jamais pour elle-même : elle incarne l'Autre. Cette altérité posée à priori entraîne l'impossibilité de relation de réciprocité et d'égalité entre hommes et femmes. Souvent assimilé à la matière, car les métaphores de la féminité empruntent en majorité leur vocabulaire aux matières organiques et végétales, la femme aspire à devenir une conscience autonome

Et Simone de Beauvoir de conclure que c'est à partir d'une égalité totale des deux sexes que naitra la liberté de la femme.

Cette imposante étude, au style polémiste, a suscité un tollé général à sa sortie en 1949, avant de connaitre un grand succès après 1970. Il est vrai que la qualité de la réflexion, l’érudition et la grande modernité de l’auteure, puisqu'elle s'appuie sur les apports de Lacan et de Levi Strauss pour renforcer son argumentation. Elle utilise également l'existentialisme pour proclamer qu'elle se refuse à devenir ce que la société́ a supposé́ qu'elle deviendrait ; dénonçant une aliénation, elle déclare que son destin lui appartient, revendiquant sa liberté de sujet, selon une approche métaphysique.

Voici deux extraits révelateurs de sa démarche, lorsqu’elle démonte le mécanisme amoureux :

"Pendant 20 ans d'attente de rêve d'espoir, la jeune fille a caressé le mythe du héros, libérateur et sauveur : l'indépendance conquise dans le travail ne suffit pas abolir son désir d'une abdication glorieuse. Il faudrait qu'elle eut été élevée exactement comme un garçon pour pouvoir surmonter aisément le narcissisme de l’adolescence : mais elle perpétue dans sa vie d'adulte, ce culte du mois auquel toute sa jeunesse l'a inclinée; de ses réussites professionnelles, elle fait des mérites dont elle enrichit son image, elle a besoin qu'un regard venu d'en haut révèle et consacre sa valeur."

Ou lorsqu’elle expose l'état de dépendance des femmes :

" L'histoire nous a montré que les hommes ont toujours détenu tous les pouvoirs concrets ; depuis les premiers temps du patriarcat, ils ont jugé utile de maintenir la femme dans un état de dépendance ; leur codes se sont établis contre elle; et c'est ainsi qu'elle a été concrètement constitué comme l'Autre.

Cette constitution servait les intérêts économiques des mâles ; mais elle convenait aussi à leurs prétentions ontologiques et morales. Dès que le sujet cherche à s'affirmer, l'Autre qui le limite et le nie lui est cependant nécessaire : il ne s'atteint qu'à travers cette réalité qu'il n'est pas."

 

 

Déconstructiviste sans être nihiliste, l’ouvrage de Simone de Beauvoir incarne l'exigence existentialiste de transformer la femme d'objet en sujet, de refuser la passivité, d'agir malgré toutes les résistances et de devenir à ce prix tout simplement un être humain.

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