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Le blog d'André Boyer

CHOISEUL RECONSTRUIT UNE MARINE ROYALE EXSANGUE

31 Janvier 2021 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

LE DUC DE CHOISEUL MINISTRE DE LA MARINE

LE DUC DE CHOISEUL MINISTRE DE LA MARINE

Le temps que le supplice de la guerre de Sept Ans s’achève, la guerre de course permet de compenser partiellement les déficiences de la Marine royale face à la Royal Navy.

 

Avec le blocus des côtes et des colonies, les ports français sont paralysés, mais Louis XV n’autorise pour autant à armer en course qu’en mai 1756, alors que la guerre est déjà commencée depuis presque un an.

Les ports de Dunkerque (premier port corsaire), Saint-Malo, Bayonne, Saint-Jean-de-Luz mais aussi Bordeaux, Nantes et La Rochelle, villes jusque-là dévolues au grand commerce atlantique, arment en course.

La guerre de course que livrent ces corsaires coutera à l’Angleterre 2 600 captures pour 90 millions de livres ; Il arrivera aussi que les corsaires remplissent des missions que n’assure plus la Marine Royale comme lorsque Bougainville vient chercher des renforts pour le Canada ou pour ravitailler certaines îles, comme la Martinique. Le corsaire breton Charles Cornic escorte douze convois sur les côtes de France et réussit à faire entrer sur Brest, malgré le blocus, de grosses cargaisons de chanvre néerlandais. Thurot, corsaire de Dunkerque, se voit chargé d'organiser une descente en Irlande. L'opération, menée avec une division de 5 frégates et un corps expéditionnaire de 1200 hommes contourne l'Angleterre par l'Est, débarque en février 1760 à Carrickfergus près de Belfast, et libère de nombreux prisonniers français.

Mais la course reste une activité aléatoire et dangereuse. Sur les 60 000 marins français capturés pendant le conflit, plus de 31 000 sont des corsaires. D'Estaing, malgré sa belle campagne dans l'océan Indien est capturé à son tour. Quant à Thurot, il ne peut inquiéter Belfast faute de troupes suffisantes et il est tué au retour dans un combat désespéré contre une division de frégates anglaises. Mais les succès des corsaires français exaspèrent les armateurs anglais, ce qui contribue à la démission de William Pitt en octobre 1761.

Reste, au delà des corsaires, à reconstruire la flotte française. En 1762, un an avant le Traité de Paris, la Marine Royale n’a plus que quarante-sept vaisseaux et vingt frégates contre cent quarante-cinq vaisseaux et cent trois frégates pour sa rivale anglaise. Choiseul est alors nommé ministre de la Marine Royale et il commence par réorganiser les services du ministère. Puis il s'appuie sur le sursaut patriotique du pays pour chercher de nouveaux financements, notamment en lançant le « don des vaisseaux » par les provinces, villes ou corps constitués, qui permet de rajouter à la Marine Royale dix-sept navires neufs et une frégate. Deux de ces vaisseaux, le Ville de Paris et le Bretagne, sont de redoutables trois-ponts de 100 canons.

Mais si le conflit, qui s'est achevé avec le traité de Paris (10 février 1763) a entériné la liquidation politique et militaire de la présence française en Inde et Amérique, il a aussi exacerbé en France lavolonté de laver les humiliations subies, volonté renforcée après la guerre par le retour des prisonniers qui font le récit des conditions de détention barbares qu'ils ont subies, entrainant 8500 morts sur 60000 marins capturés. Les survivants en garderont une haine durable vis-à-vis des Anglais.

Pour renforcer la Marine Royale, Choiseul modifie le recrutement des officiers et se donne pour objectif, dés le traité de Paris signé, de porter la flotte à quatre-vingt vaisseaux et quarante-cinq frégates. Du coup, tout semble bon pour trouver des navires. La Compagnie des Indes, qui va d'emprunts en emprunts pour reconstruire sa flotte et relancer ses comptoirs, est suspendue en 1769. Choiseul fait racheter quatre de ses vaisseaux et plusieurs de ses frégates, que la Marine Royale intègre dans ses rangs. Elle récupère aussi les installations de Lorient qui s'additionnent aux trois arsenaux dont elle dispose déjà à Brest, Rochefort et Toulon. Les bois, les agrès et les munitions étant hors de prix en temps de guerre, des stocks gigantesques sont constitués. Les réserves de bois de construction triplent entre 1764 et 1768.

En 1768, la flotte est revenue à son effectif d'avant la guerre de Sept Ans, avec cependant, pour des raisons d’économie, une plus faible puissance de feu. Entretemps Choiseul a aussi réorganisé l'administration coloniale en reprenant aux compagnies de commerce leurs établissements pour les placer sous l'administration directe du secrétariat d'État à la marine. En 1763, il nationalise l’île de Gorée, la Gambie et le golfe de Guinée. En 1767, c'est au tour des établissements de l'océan Indien, les Seychelles, l'Île-de-France et l'île de Bourbon et en 1769 il fait de même, à l'occasion de la suppression de la Compagnie des Indes, des comptoirs sur les côtes indiennes, Pondichéry, Mahé, Chandernagor, Karikal. Dans le même sens, les ordonnances de 1763 réglementent l'administration générale des Antilles, avec pour objectif de réaffirmer l'autorité de l'État  et de défendre les îles avec des troupes venues de métropole. Mais lorsqu’il tente une rapide colonisation de la Guyane, il échoue totalement.

En 1769, l’inspection générale de la flotte montre qu’elle est en état de reprendre de grandes opérations, et en décembre 1770, Choiseul, qui guette le moment de déclencher le conflit de la revanche, estime que l'heure est arrivée à l'occasion d'une crise diplomatique entre l'Angleterre et l'Espagne qui se disputent les îles Malouines. Choiseul soutient l'Espagne, avec l’espoir que les flottes additionnées franco-espagnoles puissent faire jeu égal avec la Royal Navy.

 

Mais Louis XV y met son véto absolu et renvoie son ministre de la Marine après lui avoir déclaré, le 22 décembre 1770 : « Monsieur, je vous ai dit que je ne voulais point la guerre ».

 

À SUIVRE 

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