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Le blog d'André Boyer

LA MARINE ROYALE FAIT JEU ÉGAL AVEC LA ROYAL NAVY

27 Février 2021 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

LA BATAILLE D'OUESSANT (1778)

LA BATAILLE D'OUESSANT (1778)

La guerre commence par une offensive anglaise : la puissante escadre anglaise de la Manche s’en prend le 17 juin 1778 à une petite division composée de deux frégates, d’une corvette et d’un lougre, qui patrouillent au large de Roscoff. La corvette réussit à s’enfuir et la frégate, la Belle Poule, livre cinq heures durant un combat acharné mais parvient à̀ regagner, ce qui soulève l’enthousiasme à Versailles.

 

Les données du conflit différent de la guerre de Sept Ans. L'Angleterre est contrainte de maintenir des forces navales et terrestres considérables en Amérique du Nord, ce qui lui fait perdre l’initiative dans ce conflit, laissant à Louis XVI, Sartine et Vergennes le choix de leur stratégie.

Sartine propose d’envoyer l'escadre de Toulon en Amérique du Nord et de faire combattre la flotte de Brest contre la flotte anglaise de la Manche. C’est obliger l’Angleterre à laisser des escadres sur la défensive à Halifax et à New York, tandis qu’il revient à la flotte de Brest de prouver que la Marine Royale est capable de tenir en échec la Royal Navy dans des eaux où cette dernière régnait en maitre depuis la guerre de Sept Ans.

Les ordres transmis par Sartine au comte d’Orvilliers, qui commande l’escadre de Brest, témoignent de la volonté́ offensive française :

« L’instruction de Sa Majesté́ qu’elle me charge expressément de vous faire connaitre, ainsi qu’à tous les officiers commandant, est que ses vaisseaux attaquent avec la plus grande vigueur et se défendent en toute occasion jusqu’à̀ la dernière extrémité́. »

Le 8 juillet 1778, les trente-deux vaisseaux et les huit frégates la flotte du Ponant quittent Brest à la recherche des trente vaisseaux et cinq frégates de Keppel que l’on sait croiser dans les parages. Après divers incidents, la puissance réelle de l'armée navale de Brest est réduite à̀ vingt-sept vaisseaux lorsque les deux escadres sont en vue l’une de l’autre le 23 dans l’après-midi, alors que la bataille est attendue avec anxiété́ par des Français qui n’ont pas accepté les défaites navales du conflit précèdent.

Le 27 juillet, après plusieurs jours d'approche, d'Orvilliers réussit à prendre le vent de son adversaire au large d'Ouessant, mais la météo se dégrade, ce qui donne une forte gite aux vaisseaux. Les vaisseaux français gitant vers l'ennemi, il leur faut fermer les sabords des batteries basses, qui sont les plus puissantes, tandis que les Anglais n'y sont pas obligés. Les Français ne peuvent donc engager que 1 934 canons contre 2 778 pour Keppel. La canonnade, violente, dure trois heures, mais Keppel s’estime en difficulté et fait retraite la nuit tombante, tous fanaux éteints.

En effet, les vaisseaux anglais ont beaucoup souffert, à commencer par le navire amiral, le HMS Victory, sévèrement bousculé par le Bretagne. Cette retraite peu glorieuse signe la victoire française :  Il y a eu 163 morts et 517 blessés côté français tandis que les Anglais ont perdu 407 hommes et 789 blessés, ce qui montre qu’avec 800 canons de moins, la flotte française a malgré tout fait jeu égal avec la flotte anglaise.

D'Orvilliers rentre à Brest pour y réparer ses avaries, avant de reprendre la mer le 17 aoutavec vingt-huit vaisseaux, tandis que la flotte anglaise reste dans ses ports. Le 18 septembre, l’escadre est de retour sur Brest tandis que La Motte-Picquet avec trois vaisseaux, longe les côtes anglaises et rentre le 25 novembre avec treize prises commerciales. L'absence de réaction à ces croisières de la Royal Navy montre que les Français ont acquis à l'été́-automne 1778 la maitrise des flots entre la Bretagne et le sud-ouest de l'Angleterre. Du coup, à Madrid, l’on accepte d'entamer les négociations en vue d'entrer dans la guerre.

Pour sa part, l’escadre de Toulon, douze vaisseaux et cinq frégates, doit franchir l’Atlantique afin d’obtenir un succès décisif qui pousserait l’Angleterre vers la table des négociations. Son commandement est confié́ à Charles Henri d'Estaing, qui bénéficie de la réputation qu’il a acquise grâce à ses victoires corsaires lors du conflit précèdent.

L'escadre appareille pour l’Amérique le 13 avril 1778, alors que la guerre n’est pas encore officiellement déclarée et D’Estaing dispose d’ordres qui lui laissent presque carte blanche. Mais la traversée est interminable. L’escadre met 33 jours pour atteindre Gibraltar puis encore 51 jours pour traverser l’Atlantique. Lorsque l’escadre arrive à̀ l’embouchure de la Delaware le 7 juillet, les équipages sont épuisés et l’effet de surprise est perdu et Howe s’est retiré́ le 28 juin.  

Le 29 juillet, la flotte se présente devant Newport. Le plan prévoit de bloquer la place par la mer tandis que les miliciens du général Sullivan doivent débarquer dans le Nord de l’ile de Rhode Island, mais ses troupes n’étant pas encore rassemblées, il faut se contenter d’assurer le blocus, tout en laissant Suffren et Albert de Rions entrer dans la baie le 5 aout pour détruire deux batteries côtières et cinq frégates anglaises. Mais l’arrivée des quatorze vaisseaux de Howe devant Newport oblige  D’Estaing à se replier à Boston, où les Français sont reçus avec méfiance.

En novembre, d’Estaing appareille vers la Martinique où il arrive le 9, après que le gouverneur général des Iles du Vent, le marquis de Bouillé, ait attaqué victorieusement l'ile de la Dominique.

D’Estaing, pour sa part, subit un sanglant échec devant Sainte Lucie, qui n’empêche pas un bilan positif sur la flotte de Toulon : l’Europe a pu constater qu’en 1778 les mers ne sont plus sous contrôle anglais, même si les premiers succès français ont lieu en 1779.

De janvier à mars 1779, Français et Anglais se disputent les iles secondaires. La guerre s’intensifie avec le renfort des divisions navales du comte de Grasse qui arrive de France, de Vaudreuil qui vient de s’emparer des établissements anglais sur la côte africaine et de La Motte-Picquet qui vient d’escorter jusqu’à̀ la Martinique un gros convoi marchand.

D'Estaing dispose au début de l'été́ 1779 de vingt-cinq vaisseaux et d'une dizaine de frégates, tandis que l’escadre anglaise du vice-amiral Byron dispose de vingt-et-un vaisseaux, sans compter les transports de troupes et les frégates. Avec ces forces, D'Estaing attaque l’ile de la Grenade le 2 juillet qu’il prend en deux jours, avant que ne se présente l’escadre de Byron qui engage un combat, connu sous le nom de la Bataille de la Grenade, qui tourne à son désavantage, puisqu’il perd quatre vaisseaux.    

Pendant ce temps, l’armée anglaise débarque en Géorgie, l’État le plus méridional des treize colonies. Avec vingt vaisseaux et 3 000 hommes, d’Estaing se porte devant Savannah pour aider les troupes du général Lincoln. Mais l’affaire se complique avec les ouragans et la résistance des troupes anglaises. Le 9 octobre, d’Estaing tente en vain un assaut contre la ville de Savannah Cependant son intervention annihile les menaces anglaises contre Charleston et la Caroline du Sud. Beaucoup plus au Nord, les Britanniques, inquiets du retour de d'Estaing auprès des Treize Colonies, ont évacué́ le Rhode Islaand, ce qui libère Newport.

D'Estaing quitte les eaux américaines en octobre 1779, mais la guerre se poursuit dans les Caraïbes. La Motte-Picquet parvient à sauver le plus gros d’un convoi qui arrive de France le 18 décembre, en attaquant avec trois vaisseaux et l’aide des batteries côtières, l’amiral Hyde Parker qui commande à treize vaisseaux.

La manœuvre, superbement menée, lui vaut une lettre de félicitations de la part de l'amiral anglais:

 

« La conduite de Votre Excellence dans l'affaire du 18 de ce mois justifie pleinement la réputation dont vous jouissez parmi nous, et je vous assure que je n'ai pas été́ témoin sans envie de la compétence que vous avez montré à cette occasion. Notre inimitié́ est passagère, et dépend de nos maitres, mais votre mérite a gravé sur mon cœur la plus grande admiration à votre égard.»

 

À SUIVRE 

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