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Le blog d'André Boyer

L'INCIDENT DE METZ

22 Juillet 2022 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

L'INCIDENT DE METZ

Oui, l’IFTG fût et reste un succès exemplaire, qui a permis à la France de former chaque année vingt ou trente cadres francophones, nourrissant ainsi les échanges économiques franco-tchèques et notamment l’établissement de filiales françaises en Tchéquie.

 

Au cours de séminaires qui duraient une semaine, j’y ai enseigné le marketing à toute une génération de cadres puisque mes interventions se déroulèrent sans interruption de 1990 à 2010. Les cours eurent longtemps lieu presque en face de l’Institut Français au 35 rue Stepánská, là où tout avait commencé. Deux salles de classe et deux bureaux au premier étage constituaient tout l’univers de l’IFTG, qui se prolongeait dans les cafés et pâtisseries environnants lors des pauses, auquel s’ajoutait, une fois par semaine le jeudi soir, un repas rituel qui nous réunissait presque tous, responsables, enseignants et étudiants de l’IFTG. Plus tard, les cours eurent lieu au troisième étage des magnifiques bâtiments de VŠE. Il y subsistait l’ensemble salle de cours et secrétariat, une organisation parfaite et la chaleur humaine en prime.

J’ai longtemps habité dans un hôtel de l’époque soviétique, le Crystal Hotel dont le confort, spartiate mais correct, se situait quelque part entre la cité universitaire et l’auberge de jeunesse. Les lits pour une personne étaient agréablement durs, les rideaux ne cachaient qu’imparfaitement la lumière, la salle de bains était limitée, mais tout fonctionnait. Le petit déjeuner était particulier : café très léger, quelques morceaux de pain, une tranche de pomme et un peu de charcuterie. L’hôtel était situé à une dizaine de kilomètres du centre-ville, ce qui demandait de prendre un tramway et le métro. Il fallait une bonne heure pour rejoindre l’IFTG, grâce auquel je m’immergeais dans la vie tchèque. Au bout de quelques années, j’ai été transféré dans un hôtel plus proche du centre-ville.

En dehors des cours, il m’est arrivé aussi de participer à des congrès à Prague, à des cérémonies de remise de diplôme et même à un week-end avec les étudiants dans la montagne tchèque, proche de la frontière polonaise. Je n’ai pas manqué de visiter d’autres villes tchèques, villes d’eau, villes historiques, villes industrielles.

Bref, l’IFTG, Prague, la Tchéquie, tout cela a fait partie de ma vie pendant vingt ans et il ne saurait être question de l’oublier. Aussi mes pensées restent-elles toujours attentives à ce qui se passe là-bas, d’heureux comme de triste.

En relation avec l’IFTG, il me faut aussi mentionner ce que j’appellerai « l’incident de Metz ». Comme on l’a peut-être noté, j’intervenais en partenariat avec la FNEGE pour organiser des formations à l’étranger dans plusieurs pays, la Chine, Madagascar, l’Algérie, la Bulgarie, la Tchécoslovaquie et également, pour des programmes temporaires, la Russie et la Pologne. Les cours à réaliser pour la partie française étaient généralement confiés aux professeurs des divers IAE, du fait du penchant de la FNEGE pour les IAE, plus que pour les Écoles de Commerce qui, HEC en tête, faisaient souvent concurrence à la FNEGE. Au reste, le programme mis en œuvre, le DESS CAAE* relevait des IAE et il était logique de faire appel aux enseignants qui en étaient issus.

Pour rassembler les forces des IAE à l’international, je conçu un organisme commun que j’appelais « IAE International », qui était destiné à servir d’intermédiaire entre les IAE, la FNEGE et les Ministères et dont je me proposais de prendre la direction. La FNEGE n’était pas très favorable à ce projet, car elle y voyait un concurrent potentiel, mais elle ne s’y opposa pas car elle savait que, si je dirigeais un tel organisme, je resterais parfaitement loyal à la coopération avec la FNEGE.

Étant rattaché à l’Université de Nice, je proposais d’installer IAE International à Sophia-Antipolis, mais le directeur de l’IAE de Nice ne fut pas de cet avis et proposa de l’installer à Metz. De fait, j’étais exclu de la direction du projet, puisque je n’avais pas l’intention de m’installer à Metz.

Une cérémonie d’installation eu lieu dans cette ville à laquelle j’assistais en spectateur. J’avais été en effet soigneusement exclu de la tribune officielle où siégeaient plusieurs directeurs d’IAE, dont ceux de Nice et de Metz, ainsi que le représentant du MAE, mais aussi Hana Machkovà qui représentait l’IFTG.

À la tribune, chacun se félicitait de l’avènement d’IAE International, tout en oubliant soigneusement de mentionner mon rôle, central pourtant, dans cette création. Quand vint le tour d’Hana Machkovà, cette dernière insista, dans un silence gêné, sur le fait que j’étais à l’origine d’IAE International et qu’il était donc normal que je rejoigne à mon tour la tribune puisque je faisais manifestement partie des organisateurs. Je fus, on s’en doute, extrêmement touché de sa loyauté et de son courage.

A Metz, IAE International ne survécut pas longtemps aux manœuvres qui avaient présidé à son avènement, parce que la ville et son IAE n’étaient pas propices au mécanisme de regroupement des efforts des IAE que j’avais conçu : il fallut moins d’une année pour qu’il passe aux oubliettes.

 

De cet incident, je tire deux leçons. Tout d’abord, s’il est facile de détruire un projet, il ne saurait survivre à l’absence d’énergie positive. IAE International, enfant illégitime de calculs mesquins, n’avait aucune chance de survie, à l’opposé de l’IFTG qui surmonta d’énormes obstacles, principalement grâce à la volonté d’Hana Machkovà qui sut faire éclore et survivre un projet que j’avais conçu. Ensuite mon opinion sur cette dernière reçut à Metz une éclatante confirmation : c’était une femme, droite et solide, un être humain sur lequel on pouvait compter en toutes circonstances.

 

*Le CAAE était devenu un diplôme de 5e année de formation à la gestion, ouvert aux non diplômés en gestion, scientifiques, littéraires, pharmaciens et médecins.

 

 

À SUIVRE

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