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Le blog d'André Boyer
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L'INVASION DE L'IRAN PAR LES ARABES

6 Novembre 2019 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

BATAILLE D'AL QADISYYA

BATAILLE D'AL QADISYYA

L’invasion de l’Iran* par les Arabes au VIIsiècle s’explique par la montée en puissance des seconds qui coïncida avec une période de faiblesse sans précédent du premier. 

 

L’empire perse sassanide était épuisé par des décennies de guerre contre l’empire byzantin. Le Roi des Perses Khosrow II avait vaincu les rébellions au sein de son propre empire, avant de consacrer son énergie à la lutte contre l’Empire Byzantin, ce qui lui permit d’étendre les frontières perses jusqu’à Antioche, Damas et Jérusalem, avant que les Byzantins ne contrattaquent, le battent à la bataille de Ninive en 627, reprennent la Syrie et pénètrent dans les provinces perses de Mésopotamie (Irak). Ces défaites expliquent sans doute l’assassinat de Khosrow II l’année suivante, en 628. Les prétendants au trône se succédèrent alors à vitesse accélérée, dix en quatre ans, ce qui provoqua une guerre civile entre les différentes factions. Mais l’un des facteurs principaux de la chute de l’Empire Sassanide réside dans la conquête qu’il fit de la tribu arabe des Lakhmides, en 602, lorsque Khosrow II déposa et tua le premier roi chrétien des Lakhmides, qui contestait la suzeraineté de la Perse sur sa tribu. 

La conquête arabe de la Perse commença après la mort de Mahomet en juin 632. Abou Bakr lui succéda en prenant le titre de calife de Médine. Il dut alors livrer les guerres dites d’apostasie, en pratique destinées à contraindre toutes les tribus à lui payer l’impôt, qui durèrent jusqu’en mars 633.

Débutèrent ensuite les guerres de conquêtes. Les premières razzias en Mésopotamie permirent de recueillir un important butin, grâce à la mobilité de la cavalerie légère qui permettait d’attaquer les villes à proximité du désert pour s’y réfugier ensuite. Abou Bakr commença alors à penser en termes de conquêtes. Pour attaquer la Perse, il constitua une armée d’invasion composée de volontaires et dirigée par son meilleur général, Khalid Ibn Al-Walid, qui parvint à prendre la ville frontalière d’Al-Hirah en Mésopotamie. Cet excellent stratège battit ensuite en Mésopotamie toutes les troupes sassanides au cours de l’année 633, jusqu’au moment où il fut rappelé en Syrie, ce qui permit aux Sassanides de contre-attaquer sous l'autorité d'un nouveau roi et de remporter une victoire importante à la bataille du Pont en octobre 634.

Puis, en Syrie, les Arabes battirent les Byzantins à la Bataille de Yarmouken 636 et le second calife, Omar, put alors transférer des troupes à l'Est et reprendre l'offensive contre les Sassanides, tandis que Rostam Farrokhzād, général de Yazdgard III, commettait l’erreur de conduire une forte armée au bord du désert arabe au lieu d’attendre les Arabes sur la rive opposée de l’Euphrate. Aussi fut-il battu lors de la bataille dite d'Al-Qadisiyya(la victoire des victoires) par des Arabes pourtant largement inférieurs en nombre.

Les troupes arabes poussèrent alors leur avantage jusqu'à la capitale sassanide, Ctésiphon, qui fut évacuée après un bref siège, puis continuèrent sur leur lancée vers l'Est, poursuivant Yazdgard IIIet ses troupes. Battant encore les  Sassanides à la bataille de Jalūlā', ils prirent ainsi toute la Mésopotamie. 

Yazdgard III rassembla alors une nouvelle armée pour repousser les envahisseurs. En 642, il fut à nouveau battu à Nahavandet progressivement tout le plateau iranien fut pris par les Arabes. En 674, ils avaient conquis l'Afghanistan, la Transoxiane et une partie de l'Inde. Leurs victoires successives peuvent être attribuées à leur union structurée par le premier calife, face à un Empire sassanide, supérieur en nombre mais désorganisé.

Pour conserver leur cohésion, les occupants arabes s’installèrent alors dans des villes de garnison. Les populations perses, majoritairement zoroastriennes, mais aussi juives et chrétiennes, furent autorisées à pratiquer leur foi sous la contrainte de payer un impôt spécial, la jizya, et de respecter diverses restrictions ayant trait à leur occupation, à la pratique limitée de leur culte et à l'habillement, provoquant un lent processus de conversion à la religion arabe, l’Islam prenant ainsi tout son sens de « soumission ». En outre, les envahisseurs arabes imposèrent l'arabe comme première langue à leurs sujets, mais cette fois la langue persane résista malgré le remplacement de l'alphabet pahlavi-araméen par une version modifiée de l'alphabet arabe.  

Il faut enfin souligner le rôle de l’administration sassanide, clientélisée, arabisée et islamisée, qui se donna pour tâche de répandre la propagande omeyyade en confondant soumission à son joug et adhésion à la religion coranique. Cependant une grande partie de la population iranienne agro-pastorale resta attachée au zoroastrisme traditionnel, malgré l’imposition de la jizya, réservée aux non musulmans.  

 

On aurait pu croire qu’avec la conquête de la Perse, l’histoire, d’une certaine manière, était achevée. Mais il n’en fut rien, car, peu à peu, la Perse se libéra des Arabes et reprit son autonomie millénaire. 

 

* Nous emploierons indifféremment dans ce billet et les billets ultérieurs les termes de Perse et d’Iran. 

 

À SUIVRE

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MONTRÉAL ENCERCLÉ

1 Novembre 2019 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

MONTRÉAL ENCERCLÉ

 

 

Après la bataille des Mille-Îles, les forces d'Amherst sont restées au fort Lévis pendant quatre jours avant de continuer vers Montréal, tout en perdant au moins quatre-vingt-quatre hommes noyés dans les rapides du Saint-Laurent. Puis Amherst a fusionné ses forces avec celles qui venaient de Québec et du lac Champlain pour encercler Montréal. 

 

Plus de dix-huit mille hommes convergent vers Montréal par trois voies fluviales : l'armée de Murray et ses trois mille huit cent hommes remontent le Saint-Laurent à partir de Québec, trois mille quatre cent soldats sous le commandement de Haviland passent par la rivière Richelieu venant du Fort Ticonderoga (Fort Carillon), après avoir pris le Fort Chambly et la force principale d’Amherst et ses onze mille hommes arrive par le Saint-Laurent à partir du Lac Ontario et de Fort Frontenac (aujourd’hui Kingston). 

James Murray, gouverneur militaire du district de Québec depuis septembre 1759, ordonne aux armées britanniques de tout brûler sur leur passage, fermes et maisons pour empêcher les miliciens canadiens de rejoindre l'armée française et pour les pousser à la désertion. 

En août 1760, il s’y ajouta la défection prévisible des Sept Nations, au nom du réalisme. 
Ces dernières vivaient dans des « réductions » ou des réserves. Chaque Nation était indépendante, ou selon la métaphore autochtone, avait son propre Feu, avec un Feu principal qui se trouvait à Kahnawake. Leur alliance était fondée sur des liens de parenté, liens selon lesquels les Hurons de Lorette qui détenaient l'honneur le plus élevé, étaient connus comme les oncles et tous les autres groupes étaient des frères. 
Le gouverneur et le Roi de France étaient les pères qui avaient le droit d'arbitrer les différends entre les nations alliées. Les Français entretenaient aussi des alliances dans l'arrière-pays, particulièrement avec la Confédération des Trois Feux, ces nations étant considérées comme des neveux par les Sept Feux. Les négociations avec les nations plus au Nord étaient menées par les Algonquins de Kanesetake, tandis que les négociations avec la Confédération iroquoise à New York étaient menées par les Mohawks de Kahnawake. Avant d'entreprendre une campagne conjointe, entre les Sept Nations et la Nouvelle-France, le gouverneur français et les officiers de haut rang  les visitaient toujours et participaient à la danse de guerre.
C’est ainsi que les Sept Nations avaient participé, en tant qu’alliées des Français, à la guerre de Succession d'Autriche (1744-1748) et aux premières campagnes de la guerre de Sept Ans. Mais en 1760, constatant la force croissante des Anglais, les Sept Nations entreprirent des négociations visant à établir leur neutralité dans le conflit qui opposait les Anglais et les Français. Elles obtinrent les garanties qu'elles demandaient lors du traité d’Oswegatchie d’août 1760, lequel traité était ensuite confirmé par le conseil de leur Feu principal à Kahnawake en septembre de la même année. Cette entente entre le Roi d’Angleterre et les nations indiennes était une bombe à retardement, car il fut, à mon sens, le motif principal de la volonté d’indépendance de la plupart des treize colonies britanniques. 

 

Finalement, le 6 septembre 1760, le Major-General Amherst arriva à̀ Lachine, à proximité immédiate de Montréal. Le même jour, le gouverneur Vaudreuil convoqua un conseil de guerre...

À SUIVRE

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VERS LA CHINE, 前往中国 

27 Octobre 2019 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

VERS LA CHINE,  前往中国 

En 1985, j’étais encore Professeur à l’IUT de Nice, mais je me rendais souvent à l’IAE de Nice qui était, d’une manière ou d’une autre, ma maison et où j’avais quelques cours.

 

Un jour du printemps 1985, je me trouvais dans le bureau du Directeur de l’IAE, le Professeur Jacques Lebraty, qui regardait les annonces de l’EFMD (European Fundation for Management Development), une fondation qui aujourd’hui accrédite les formations des Écoles de Commerce (EPAS et EQUIS). 

À cette époque, l’EFMD recherchait pour l’École de Management qu’elle avait récemment ouvert à Pékin trois professeurs pour sa session de mai-juin 1985. Jacques Lebraty, qui connaissait bien mon inclination pour les voyages, me demanda si j’étais intéressé, moyennant quoi il pourrait soutenir ma candidature par le biais d’un de ses amis qui faisait partie du comité de sélection de l’EFMD pour ces postes. 

La durée de la mission était de deux mois et l’un au moins de ces cours, dédié aux statistiques pour la gestion, me convenait bien puisque je l’enseignais à l’IAE de Nice et qu’il correspondait à ma formation de base, une Maitrise de Mathématiques spécialisée en statistiques et probabilité. 

Mais il y avait deux hics. Le premier, technique, était de l’enseigner en anglais. Certes j’avais bien amélioré mon anglais grâce à mes deux séjours universitaires aux États-Unis en 1973-1974, mais c’était onze ans auparavant et je n’avais jamais enseigné dans cette langue. Ce qui signifiait qu’il fallait s’y risquer auprès de Chinois qui ne seraient ni bons en anglais eux-mêmes, ni indulgents. Le deuxième hic était plus important puisqu’il était d’ordre affectif. Ma fille avait à peine plus d’un an et ce n’était pas une bonne idée de laisser ma femme se débrouiller toute seule pendant deux mois, alors qu’elle-même enseignait. En outre, elles allaient me manquer toutes les deux, d’autant plus que les liaisons téléphoniques (et pas d’Internet !) étaient à l’époque limitées entre la Chine et la France.

Bref, j’hésitais, partagé entre l’attrait de l’aventure et le confort du renoncement. Le premier l’emporta, en partant du principe qu’une telle possibilité ne se représenterait pas. Je déposais ma candidature et elle fut retenue, avec un départ début mai 1985. 

La Chine restait mystérieuse, au moins dans mon esprit. La preuve, c’est que je craignais que ce pays « en voie de développement » comme l’on disait à l’époque ne manque de tout. En somme je mettais dans le même panier la Chine et le Sénégal où j’avais séjourné, suivant en cela les opinions pressées d’une intelligentsia pour qui la vérité n’est qu’un détail gênant. Précautionneusement, j’achetais en conséquence des provisions de thé et de piles, ces dernières pour mon poste de radio ondes courtes qui me permettrait d’écouter (difficilement) RFI (Radio France International) et d’avoir des nouvelles du pays. Mais dès les premiers jours en Chine, je découvris, à ma honte, que la Chine était LE pays du thé et donc des sachets de thé aussi et que les piles, dont on ne manquait pas à Pékin, y coutaient dix fois moins cher qu’en France.

Je pris donc l’avion, avec une escale à Hong Kong, et j’arrivais à l’aéroport de Pékin, accueilli par notre secrétaire interprète, Geneviève Barre, qui était venue avec le véhicule qui nous était affecté ainsi que son chauffeur chinois. 

 

Il ne me restait plus qu’à découvrir la Chine : une grande aventure commençait.

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UN UNIVERS EN EXPANSION DANS L'ESPACE-TEMPS?

23 Octobre 2019 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

UN UNIVERS EN EXPANSION DANS L'ESPACE-TEMPS?

Pourquoi un excès de matière par rapport à l’antimatière, et ceci dès le début du Big Bang ?

 

En 1967, le physicien nucléaire russe Andrei Sakharov a postulé trois conditions pour expliquer l’asymétrie entre matière et antimatière. Une seule de ces conditions a été vérifiée et encore a t-il fallu construire un modèle spécifique pour la justifier. Autant écrire que l’on n’a pas encore trouvé d’explication à cette asymétrie et qu'elle n’a donc pas encore pu être intégrée dans les modèles d’astrophysique. 

Quoi qu’il en soit, l’Univers a évolué au cours du temps. Pour les trois cent quatre vingt mille premières années après le Big Bang, la théorie ne peut toujours pas s’appuyer sur l’observation et les évènements qui ont eu lieu au cours de cette période restent hypothétiques. 

La suite est mieux connue grâce aux télescopes, qui sont des machines à remonter le temps: plus on regarde loin, et plus on voit les astres dans leur prime jeunesse, lorsqu’ils émettaient des photons qui nous parviennent aujourd'hui, au bout de milliards d’années. 

Sachant que l’Univers est âgé de 13,8 milliards d’années, nous voyons aujourd’hui des galaxies qui datent de cinq cent millions d’années après le Big Bang, soit 13,5 milliards d’années auparavant, à une période où un grand nombre d’atomes ont été ionisés* par la première génération d’étoiles. 

Les astrophysiciens ont découpé l’évolution de l’Univers, depuis le Big Bang, en quatre périodes, celle de la baryogénèse, celle de la recombinaison, celle de la réionisation et celle de l’évolution des galaxies, qui est la période actuelle. 

Nous avons déjà vu que la première période, celle de la baryogénèse**, n’est pas encore connue. Aussi, l’hypothèse de la brisure de symétrie qui aurait favorisé les baryons par rapport aux antibaryons reste à confirmer (voir mon billet précédent). 

Durant la deuxième période, dite de recombinaison, la température est encore assez élevée pour que se déroulent les réactions nucléaires qui vont fabriquer des noyaux de deutérium (un proton et un neutron) et d’hélium (deux protons et deux neutrons). Lorsque la températurea suffisamment décru, ces réactions se sont arrétées, laissant subsister ailleurs l’hydrogène (un proton, zéro neutron) non transformé. 

Puis, lorsque la température a fini par tomber au-dessous de trois mille degrés Kelvin, les photons se sont échappé, ce qui a permis de les observer directement par les télescopes. A commencé alors la troisième période, celle de la réionisation. 

Dans un premier temps de cette troisième période, celui dit du poétique « âge sombre », les premiers rayonnements des premières étoiles, résultat de l’effondrement d’une matière de moins en moins ionisée, ont été absorbés par l’hydrogène qui remplissait un Univers encore assez dense. Mais, peu à peu, les étoiles, massives et très chaudes, vont émettre un rayonnement ionisant qui va grignoter progressivement l’hydrogène.

Avec l’expansion de l’Univers, le gaz intergalactique devient de plus en plus diffus et les bulles de gaz ionisé autour de chaque galaxie grandissent jusqu’à se réunir. C’est alors la fin de l’époque de la réionisation, un milliard d’années après le Big Bang. 

Commence ensuite la quatrième période de l’Univers, dans laquelle nous sommes toujours, celle de l’évolution des galaxies, étoiles et planètes. 

Les étoiles ! Nous observons aujourd’hui deux types d’étoiles, les jeunes étoiles qui ont une durée de vie de 10 à 100 millions d’années, et les vieilles étoiles qui sont nées il y a longtemps, puisqu’elles ont jusqu’à 13 milliards d’années. Enfin, il y a les premières étoiles que l’on ne voit pas, puisqu’elles ont disparu depuis longtemps à cause de leur énorme masse qui a limité fortement leur durée de vie…

 

L’Univers dans lequel nous sommes est en expansion donc, mais est-il en expansion accélérée ou décélérée ? Ce n’est pas du tout pareil. Or l’observation récente de dix supernovæ a bouleversé une fois de plus les hypothèses des cosmologues… 

 

*ionisé : l’ionisation d’un atome consiste à enlever ou ajouter des charges à un atome qui, de ce fait, en perd sa neutralité électrique. 

** La baryogénèse est, par définition, la période de formation des baryons. Un baryon est une particule composite. Les baryons les plus connus sont les protons et les neutrons, formée de trois quarks, qui, eux, sont des particules élémentaires non directement observables.   

À SUIVRE 

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LES GUERRES DE L'IRAN AVANT L'INVASION

17 Octobre 2019 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

L'EMPIRE SASSANIDE

L'EMPIRE SASSANIDE

Héritier de la Perse, l’Iran a livré dans le passé de nombreuses guerres. Pour comprendre la tension actuelle entre l’Iran d’une part et l’Arabie saoudite, Israël et les États-Unis d’autre part, il m’a paru nécessaire de la situer dans le cadre historique des rapports entre l’Iran et ses voisins depuis des siècles, voire des millénaires.  

 

Sans remonter au Paléolithique, l’Iran entre dans l’histoire avec le royaume élamite, à la fin du IIImillénaire av. J.-C. En se libérant du pouvoir assyrien, Cyrus 1erfonde en 559 av. J.-C. le premier empire iranien, celui des Achéménides. Au sommet de sa puissance au Vesiècle av. J.-C., sous le règne de Darius Ier dit le Grand, les souverains achéménides régnaient alors sur un immense territoire, qui constitua même le plus grand empire de l’Antiquité, puisqu’il comprenait les contrées actuelles de l’Iran, de l’Irak, de l’Arménie, de l’Afghanistan, de la Turquie, de la Bulgarie, de la Syrie, de l’Égypte, d’une partie de la Grèce et de la plupart des territoires qui composent aujourd’hui le Pakistan, la Jordanie, Israël, la Palestine, le Liban, le Caucase, l’Asie centrale, la Libye et le nord de la péninsule arabique. Cette ancienne puissance reste vivace dans la mémoire iranienne, ce que les États-Unis, puissance arriviste, ne saisissent peut-être pas très bien, mais que ses voisins ont parfaitement intégré. 

Les souverains iraniens ont souvent été décentralisateurs et libéraux : on peut ainsi attribuer à Cyrus II la première déclaration des droits de l’Homme. Ils étaient donc peu capables de mobiliser rapidement leurs peuples contre des menaces immédiates et c’est ainsi que l’empire achéménide fut conquis par Alexandre le Grand en 330 av. J.-C, entrainant la destruction de ses plus beaux achèvements, comme Persépolis. 

La partie asiatique de l’empire ressuscita dès la mort d’Alexandre le Grand, car l’un de ses généraux, Séleucos Ier Nicator, s’en empara pour fonder l’empire séleucide, qui devint multiculturel. Il comprenait en effet des Perses, des Juifs, des Mèdes et bien sûr des Grecs dont étaient issus ses souverains. L’Empire séleucide avait du mal à résister à la puissance dominante de l’époque, la République Romaine. Il perdit notamment contre Rome la bataille des Thermopyles en 191 av. J.-C. et la dynastie s’éteignit en 64 av. J.-C., lorsque Pompée s’empara de la Syrie, entrainant la chute d’Antiochos XIII Asiaticus. Il faut noter ici, pour faire le lien avec la période contemporaine, que le contrôle de la Syrie a souvent été déterminant pour le pouvoir iranien. 

L’Empire parthe lui succéda, dont le nom provient des Parsis, une tribu iranienne qui contrôla progressivement tous les territoires à l’est de la Syrie. Ils perdront le pouvoir en 224 après J.C., cette fois-ci en raison de déséquilibres internes du pouvoir, au profit d’Ardachîr Ier, fondateur de la dynastie des Sassanides, du nom de son fondateur légendaire Sassan, un empire qui se maintiendra plus de quatre siècles, jusqu’en 651, date du début de l’invasion arabe. Les Sassanides appelèrent leur empire Eranshahr ou Iranshahr, qui signifie «La terre des Aryens». 

Les Sassanides étaient plutôt impérialistes. À l’est, ils se heurtèrent aux nomades Kouchans, puis aux Huns qui finirent par se fixer en Transoxiane. À l’ouest, ils affrontèrent les Romains puis son successeur, l’Empire byzantin, mais parvinrent à s’étendre en Arabie méridionale, en Syrie en Égypte et en Palestine, qui correspond assez bien à la zone de conflit actuelle. 

L’empire sombra progressivement dans l’anarchie, ce qui explique largement la conquête arabe (637-751) qui aboutira à la conversion d’une partie très majoritaire des peuples iraniens de la religion zoroastrienne vers la religion musulmane, encore qu’une partie de la population, fuyant l’arabisation et l’islamisation, se refugia en Inde pour constituer le peuple des Parsis. 

Depuis le Ier siècle av. J.-C., la frontière entre l'Empire byzantin et l'empire perse avait été́ l'Euphrate. Côté perse, ou iranien, la plupart des batailles et donc des fortifications étaient concentrées dans les régions du nord, puisque le désert syrien protégeait les deux empires, byzantins et sassanides, des raids arabes venant du sud. En outre, deux principautés arabes clientes des Byzantins et des Perses, respectivement les Ghassanides et les Lakhmides, servaient d’États tampons face aux razzias montées par les bédouins.

 

L’invasion de l’Iran par les Arabes au VIIesiècle s’explique par la montée en puissance des seconds qui coïncida avec une période de faiblesse sans précédent du premier. 

 

À SUIVRE

 

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LA BATAILLE DES MILLE-ÎSLES

13 Octobre 2019 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

LA BATAILLE DES MILLE-ÎSLES

Sous le commandement du Général Amherst, trois armées britanniques convergeaient vers la ville de Montréal, celle de Murray, depuis l’Est à partir de Québec, celle d’Haviland qui remontait depuis le sud par la rivière Richelieu depuis le lac Champlain et celle d’Amherst lui-même qui descendait le Saint-Laurent à partir du lac Ontario. C’était l’hallali. 

 

Ce fut l’été du désespoir pour les défenseurs de la Nouvelle-France. Murray ordonnait de brûler toutes les fermes, depuis la rivière Jacques-Cartier jusqu’à Cap-Rouge et de chasser les populations vers Montréal, pour qu’elles fussent à charge de l’ennemi. Sur les deux rives, au fur et à mesure que les troupes anglaises remontaient le fleuve, les habitants reçurent l’ordre de déposer les armes et de rentrer chez eux. 

Les fermes abandonnées furent livrées aux flammes, si bien que les miliciens étaient déchirés entre leur volonté de combattre et celle de défendre leurs fermes de la destruction. Il n’est pas étonnant dans ces conditions qu’ils aient déserté en nombre. Même certains soldats, y compris les grenadiers d’élite, commençaient à déserter. L’armée française fondait rapidement et ses officiers étaient désespérés.

Il n’y avait plus de perspectives de contenir les troupes anglaises, mais Lévis insistait pour que l’on combattît afin de retarder l’avancée de l’ennemi et pour, à minima, sauver l’honneur des armes françaises. 

En mai 1759, il avait déclaré que l’armée défendrait la colonie « pied à pied » et qu’il « serait plus avantageux » de périr « les armes à la main que de souffrir une capitulation aussi honteuse que celle de l’île Royale ». Il faisait référence à la directive du ministre de la Guerre du 19 février 1759, qui enjoignait à Montcalm de tenir jusqu’à la dernière extrémité plutôt que d’accepter des conditions aussi ignominieuses que celles qu’on avait acceptées à Louisbourg.

De fait, les Français résistèrent jusqu’au bout à Mille-Îles. Le général Jeffery Amherst, commandant en chef britannique, dirigeait personnellement la principale force d’invasion, avec dix mille hommes et 100 canons de siège, qui arrivait depuis Oswego, à l’ouest de Montréal, au travers du lac Ontario. 

Les Français avaient commencé la construction d’un fort pour défendre leur flanc ouest, le fort Lévis sur l’île Royale, appelée aujourd’hui île Chimney, dans l’aire des Mille-Îsles. Ils avaient prévu de construire des murs de pierre, d’y placer 200 canons servis par une garnison de deux mille cinq cent soldats. Mais ils n’eurent pas le temps de le construire, aussi n’y avait-il qu’un petit fort avec des palissades en bois, cinq canons seulement et deux cent soldats.

La défense du fort avait été confié au capitaine Pierre Pouchot qui avait été fait prisonnier après le siège de Fort Niagara, mais avait été relâché lors d'un échange de prisonniers. Pouchot disposait aussi de deux corvettes, l'Outaouaise et l'Iroquoise, avec un équipage de deux cent marins et trappeurs. L'Iroquoise, sous le commandement du capitaine René Hypolite Pépin dit La Force, était armé de dix canons de 12 livres et de canons pivotants. L'Outaouaise, commandée par le capitaine Pierre Boucher de La Broquerie, avait à son bord dix canons de 12 livres, un canon de 18 livres, tous pivotants.Afin de rassembler ses forces à Fort Lévis, Pouchot ordonna l'abandon du Fort de La Présentation et du chantier naval à Pointe au Baril. L'Iroquoise, trop endommagée pour manœuvrer, fut placé sous la protection des canons de Fort Lévis.

Les forces d'Amherst partirent d'Oswego le 10 août, avec deux senaux en avant-garde, des bricks avec un grand mat doublé, l’Onondaga et le Mohawk, commandés par le capitaine Joshua Loring. L’Onondaga était équipé de quatre canons de 9 livres, de quatorze canons de 6 livres, avec un équipage de cent marins et de vingt-cinq soldats. Le Mohawk, commandé par le lieutenant David Phipps, transportait seize canons de six livres avec un équipage de 90 marins et 30 soldats.

Le 7 août, des vigies françaises aperçoivent l’Onondaga et le Mohawk depuis leur avant-poste situé à l'Ile aux Chevreuils. Les Français se retirent dans une galère, poursuivis par les navires britanniques qui se perdent dans le labyrinthe des Mille-Îles. Puis le gros des forces d'Amherst arrive à Pointe au Baril le 16 août et Amherst ordonne au colonel George Williamson de capturer l'Outaouaise. 

À l'aube du 17 août, Williamson part avec cinq galères, qui se placent hors de portée des canons de l'Outaouaise et la contraignent à se mettre à portée de la batterie britannique installée à Pointe au Baril. Après trois heures de combats, l'Outaouaise a réussi à endommager deux des galères britanniques, mais La Broquerie, blessé, avec quinze membres de son équipage tués ou blessés, est obligé de livrer l'Outaouaise à Williamson. 

Le 19 août, Amherst commença l'attaque du fort Lévis. La Force et son équipage avaient abandonné l’Iroquoise pour se joindre aux défenseurs du fort. Les cinq canons français ont tiré toute la journée et les Anglais ont dû demander un cessez-le-feu pour la nuit. 

L'attaque a repris à l'aube le 20 août, avec cinquante canons. Malgré tout, les Français réussirent à couler le Mohawk et l’Onondaga. Les batteries britanniques passèrent alors au tir de projectiles incendiaires et le siège se poursuivit cinq jours, jusqu'au 24 août, jusqu’à ce que Pouchot, à court de munitions, doive négocier sa reddition.  

 

Les combats avaient coûté vingt-six morts et quarante-sept blessés aux Britanniques et les Français avaient perdus, tués ou blessés, deux cent soixante-quinze hommes sur les trois cent défenseurs ! Pouchot comptait était parmi les blessés et les Britanniques étaient stupéfaits qu'une aussi faible garnison ait offert une résistance aussi vive. 

 

À SUIVRE

 

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SORTIR DE L'IUT

7 Octobre 2019 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

SORTIR DE L'IUT

En poste à l’IUT de Nice de décembre 1983 à août 1987, une période fort riche d’enseignements, je ne me suis pas cantonné à mon enseignement dans le département TC.  

 

À l’IUT même, j’ai donné pendant quelques années des cours en anglais sur le thème de l’intégration économique à des étudiants issus de Penn State University. Ce fut l’occasion de redécouvrir, après mes expériences d’Albany et de Philadelphie, l’absence totale de culture des étudiants américains qui, alors que je leur donnais ce cours, ignoraient toujours dans quel pays et sur quel continent se trouvait la ville de Nice ! 

En compensation, reconnaissants sans doute de leur avoir révélé qu’il existait d’autres sociétés qu’américaine, ils me délivrèrent des satisfécits outranciers sur la qualité de mon cours, satisfécits que j’ai longtemps affichés sur les murs de mon bureau afin de faire enrager mes collègues.  

Pendant ces années IUT, je n’ai pas abandonné l’Afrique. Pendant quelques années, j’ai pu donner des cours de Méthodes Quantitatives de Gestion à la Faculté de Sciences Économiques de Yaoundé, mais aussi de Marketing à la Faculté de Sciences Économiques d'Abidjan. Ce maintien des liens avec l’Afrique s’exprima de manière tangible par la création et l’animation du Laboratoire de Gestion et Cultures Africaines, en collaboration avec Alain Billon, qui perdurera huit ans, de 1983 à 1992. J’ai rendu compte de ces activités précédentes dans les billets qui traitent de mon expérience africaine. 

À partir de 1985 et durant trois années, je fus désigné comme Président du Jury « Gestion Publique » de l'ENA. Cette désignation ne devait rien au hasard ni à ma réputation universitaire. Simplement, Alain Billon, qui codirigeait avec moi le Laboratoire de Gestion et Cultures Africaines, était devenu Directeur des Études de l’ENA et m’avait demandé comme un service d’exercer cette Présidence, d’ailleurs correctement rémunérée. 

Il s’agissait de se réunir avec les membres du jury, des anciens de l’ENA qui exerçaient des fonctions de responsabilité, pour choisir un sujet, qui faisait l’objet d’âpres débats. Car il s’agissait d’obliger les futurs Énarques à prendre la mesure de leurs responsabilités en les forçant à exprimer leurs choix et à prendre des décisions dans le cadre de l’examen final de Gestion Publique

J’ai pu ainsi vérifier au cours des débriefings qui suivirent la correction des copies, qu’en effet la grande majorité d’entre eux renâclaient à énoncer une décision, ce qui ne m’a que modérément étonné. J’ai aussi constaté que le niveau des copies, à la sortie de l’ENA, était faible, à peine au niveau d’une licence, sauf pour quelques brillantes exceptions.

Au bout de trois  années, je me suis lassé de l’exercice et j’ai passé le relais. 

Ègalement en 1985, le professeur Jacques Lebraty, Directeur de l’IAE de Nice, joua un rôle important pour la suite de mes activités universitaires. D’une part, il me coopta en tant que membre de la Commission Consultative Nationale Tunisienne en Sciences de Gestion et d’autre part il soutint ma candidature comme chargé de cours au National Management Training Centreà Pékin, pour un cours de Business Statistic

 

Dans mon prochain billet de souvenirs, je présenterai cet enseignement à Pékin, qui fut pour moi une expérience déterminante pour mes projets universitaires.  

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UN PETIT RÉSIDU DE MATIÈRE

4 Octobre 2019 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

UN PETIT RÉSIDU DE MATIÈRE

 

 

Un bruit continu nous parvient littéralement du fond des âges et les astrophysiciens se sont mis à son écoute.

 

Ce bruit, qu’ils ont appelé Fond Cosmologique Micro-onde (FCM) apparait dans un premier temps homogène et isotrope[1]. Mais jusqu’à quel point ? Est-ce que, dès ses premiers instants, l’Univers ne portait-il pas en germe les galaxies, les étoiles, les planètes ? 

Les chercheurs ont compris que, pour dresser une cartographie du FCM qui permettrait de reconstituer sa composition à l’origine, il fallait s’affranchir des perturbations liées à l’atmosphère, donc lancer des satellites d’observation. 

À l'aide de ces derniers, Iis ont commencé par préciser les caractéristiques du FCM, un rayonnement micro-onde qui émet un flux de dix mille milliards de photons[2]par seconde et par cm2,un flux qui nous traverse en permanence. Et ce flux n'est pas négligeable, puisque le bruit que l’on perçoit comme une neige sur un écran de télévision provient en partie de ce vestige du Big Bang qu’est le FCM. 

Grâce à l’observation du FCM, on a pu préciser l’âge du Big Bang : 13,8 milliards d’années. C’est la durée pendant laquelle la lumière du Big Bang a voyagé avant de nous parvenir, ou presque. Car, plus précisément, ce que nous voyons aujourd’hui dans le FCM, ce sont les structures qui étaient présentes trois cent quatre-vingt mille ans après le Big Bang, lorsque l’Univers a été suffisamment froid pour permettre la diffusion des photons.

Avant cette période, l’espace était rempli d’un plasma dense et chaud, puisque sa température dépassait les trois mille degrés Kelvin3, qui interagissait avec les photons et donc les empêchait de passer. 

Il reste une question essentielle à régler : comment se fait-il que l’Univers soit aujourd’hui composé de matière, une matière dont nous sommes d’ailleurs faits ? D’autant plus que l’on sait qu’au tout début de l’Univers il n’y avait pas de matière, il n’y avait que de l’énergie puisque la température était telle que les photons, les électrons disposaient d'une énergie énorme qui leur permettait de s’associer avec l’anti-matière, les protons avec les antiprotons, les électrons avec les positrons, et d’une manière générale, chaque particule de matière se trouvait associée à son anti-particule, parfaitement semblable, sauf qu’elle était de charge opposée. 

Il faut prendre conscience que, dans la soupe initiale du Big Bang, dés que la paire particule-antiparticule était créée, elle s’annihilait en redonnant l’énergie correspondante. Ce phénomène de création-destruction s'est poursuivi jusqu’à ce que l’expansion de l’Univers fasse retomber la température au-dessous du minimum qui autorisait la création de paires matière-antimatière. 

Si tout avait fonctionné à la perfection, toutes les paires auraient dû s’annihiler et il n’y aurait plus aujourd’hui, comme au début du Big Bang que de l’énergie. Mais le fait est qu'il reste de la matière, puisque nous sommes constitués par cette matière.  Il y a donc eu des ratés, ou si l’on écrit cela en termes d’astrophysique, on a observé une asymétrie. On a mesuré cette asymétrie grace au FCM et l’on a trouvé qu’au début de l’Univers, l’excès de matière par rapport à l’antimatière, était très faible, de l’ordre 10-9.

En d’autres termes, toute la matière qui reste dans l’Univers n’est que le milliardième de la matière originelle, le reste, neuf cent millions neuf cent quatre vingt dix neuf mille neuf cent quatre vingt dix neuf, s’étant détruit par association avec autant d’éléments d’antimatière. On peut en conclure que nous ne sommes pas grand-chose, les hommes, les êtres vivants, les roches, juste un tout petit résidu de matière

 

Mais cette conclusion conduit à une question redoutable : comment expliquer que, dès le début de l’Univers, dès le Big Bang, il y ait eu un excès de matière, par rapport à l’antimatière ? 

 

[1]Ce qui signifie que les propriétés physiques sont les mêmes dans toutes les directions, comme l’eau.

[2]Un photon est un quantum d’énergie associé aux ondes électromagnétiques 

 

À SUIVRE

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PARTIE D'ÉCHECS AU MOYEN-ORIENT

27 Septembre 2019 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

PARTIE D'ÉCHECS AU MOYEN-ORIENT

On ne sait pas très bien si le jeu d’échecs a été vraiment inventé par les Perses, mais ils savent apparemment mieux y jouer que les Américains, qui paraissent préférer le poker.

 

La partie d’échecs a commencé par un premier coup amplement annoncé par Donald Trump, lorsqu’il a dénoncé le 8 mai 2018 l’accord de Vienne (PAGC) signé par son prédécesseur avec l’Iran, la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, la Russie et la Chine. 

La stratégie de Trump était simple, écraser l’adversaire sous les coups financiers, « les sanctions », en supprimant toutes ses recettes pétrolières. D’après Trump, le match s’arrêterait lorsque l’Iran demanderait grâce, ce qui d’après lui ne saurait tarder. Il pourrait alors dicter ses conditions et apparaître comme le vrai défenseur des intérêts des Etats-Unis, contrairement à ce pleutre d’Obama.  

Mais l’Iran prit tout son temps pour jouer à son tour. Il respecta le traité pendant un an et fit semblant de croire que les Européens allaient  compenser les pertes que voulaient lui infliger les Américains. Cette posture lui permit de mettre les bonnes volontés de son côté et de préparer soigneusement le terrain, qui contrairement à ce que croyaient les États-Unis, n’était pas uniquement financier mais aussi politique, militaire, culturel et historique. Il renforça ses positions en Syrie et au Liban avec le Hezbollah, en Irak avec les milices chiites et au Yémen avec les Houthis.   

Puis il joua à son tour : d’une part, il annonça qu’il allait cesser progressivement de respecter le PAGC pour mettre les Européens et par ricochet Trump sous pression ; d’autre part, il commença à planter des banderilles dans le dos des États-Unis avec la destruction, le 20 juin 2019, d’un gros drone américain, un RQ4 Global Hawk.

L’Iran entendit bien Trump l’accuser d’avoir commis « une énorme erreur » mais, à part cela, il ne se passa rien. Trump refusait de risquer sa réélection en prenant l’initiative de la confrontation, d’autant plus que toute sa politique au Moyen Orient tendait à refuser les conflits armés. Il laissa jouer ses conseillers avec la saisie d’un pétrolier iranien mais lui et les Anglais comprirent vite que les Iraniens savaient répondre coup pour coup : un pétrolier contre un pétrolier, un pion contre un pion. Il essaya alors de monter une coalition, mais il n’y parvint pas. Il prétendit aussi accroître encore les « sanctions » et il le prétend encore, mais chacun sait qu’il ne fait plus qu’empiler des mesures devenues inopérantes. Bullshit. 

De fait, il ne savait plus quoi faire, au point qu’il lui fallut même subir la bonne volonté envahissante de son « ami » Macron qui eut le culot de faire venir le Ministre des Affaires Étrangères d’Iran, Mohamad Javad Zarif, à Biarritz lors du G7, le 25 août. Il clôtura cette séquence en virant Bolton le 9 septembre, afin que chacun comprenne bien, Iran en tête, que la guerre ne faisait pas partie de ses options, même s’il prétendait que c’était pour lui « la solution de facilité ».  

Il ne peut plus le prétendre aujourd’hui, car, alors qu’il se trouvait bizarrement réduit, lui le chef de l’État le plus puissant du monde, à attendre que l’Iran, théoriquement à genoux, veuille bien négocier, le ciel lui est tombé sur la tête. En effet,  le 14 septembre, à l’aide de missiles de croisière et de drones, les Iraniens, sous couvert des Houthis, ont transpercé la défense anti-aérienne du royaume saoudien, pourtant assurée par une multitude de satellites espions et un nombre considérable de Patriots, ce qui a réduit provisoirement de moitié la production de pétrole brut saoudien.

Il reste que l’évènement majeur n’est pas économique mais stratégique. Il s’agit d’un changement complet dans l’équilibre des forces en présence. Le fait que l’Iran, avec des ressources limitées et sous le coup de sanctions, soit parvenu à infliger des dommages écrasants à une Arabie Saoudite théoriquement beaucoup mieux armée et censée être défendue par les États-Unis, change totalement la donne. 

Ces deux pays hésitent à riposter parce qu’ils savent aujourd’hui, contrairement à ce qu’ils auraient pu croire il y a un an, qu’une contre-attaque de l’Iran ne serait pas une partie de plaisir. Les installations de production pétrolière et les usines de dessalement qui fournissent une grande partie de l’eau douce à l’Arabie saoudite fournissent d’excellentes cibles pour les drones et les petits missiles que possède l’Iran en quantité. 

Anthony Cordesman, expert militaire au Centre d’études stratégiques et internationales de Washington, résume de la sorte l’importance de ce changement : « Les frappes contre l’Arabie saoudite constituent un avertissement clair que l’ère américaine de suprématie aérienne dans le Golfe et son quasi-monopole sur la capacité de frappe de précision sont terminés». En effet, le coût et la simplicité de ses drones et de ses missiles font que l’Iran, directement ou par l’intermédiaire des Houthis ou du Hezbollah, est capable d’en produire assez pour venir à bout de n’importe quel système de défense anti-aérienne.

La partie d’échecs touche donc à sa fin. Les Iraniens font désormais monter les enchères en demandant comme préalable à toute négociation la levée des sanctions. La vulnérabilité de l’Arabie Saoudite et d’Israël en font des otages entre les mains de l’Iran. En outre, les enjeux sont devenus tout à coup énormes : on attendait l’effondrement de l’économie iranienne et la chute du régime des ayatollahs et voilà qu’il est question de la perte de la crédibilité militaire des États-Unis, de la survie du régime saoudien, de la neutralisation d’Israël et du maintien de la production pétrolière dans le Golfe, car Trump et les drones, chacun pour leur part, ont rendu à l’Iran sa liberté.

 

Aussi est-il difficile de trouver un fiasco plus spectaculaire, en matière de politique étrangère, que celui de « pression maximale » décidée par l’administration Trump contre l’Iranpuisqu’en quelques mois, cette politique s’est totalement retournée contre les États-Unis et leurs alliés du Moyen Orient*.

 

Désormais, le temps leur est compté : si l’Arabie Saoudite s’effondre, ils n’auront plus qu’à plier bagage, comme à Saigon…

 

*Lire « Dans le Golfe, Trump piège Trump », Le Monde du 27 septembre 2019. 

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LA BATAILLE DE LA RISTIGOUCHE

22 Septembre 2019 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

LA FRÉGATE LE MACHAUT

LA FRÉGATE LE MACHAUT

Les troupes françaises, sous le commandement du Chevalier de Lévis sont contraintes de faire retraite vers Montréal, tandis que trois armées britanniques convergent vers la ville à partir du mois de mai 1760. 

 

Un mois auparavant, pour apporter d’ultimes renforts à la Nouvelle-France, la Marine Royale réquisitionne et arme à Bordeaux, en toute hâte, un convoi de cinq navires marchands, le Bienfaisant, le Soleil, l'Aurore, la Fidélité et le Marquis de Malauzequi doit êtreescorté par une frégate de vingt six canons, le Machault

Le commandement de la flottille est confié à François Chenard de la Giraudais, un jeune lieutenant de frégate de trente-trois ans qui possède l’expérience de telles missions, en dépit de son jeune âge.

Le convoi embarque plus de deux mille tonneaux de vivres, viandes salées et farines, des munitions et des fournitures, ainsi que quatre cents hommes de troupes commandés par le capitaine François-Gabriel d’Angeac, qui connait bien la Nouvelle-France.

Le convoi lève l'ancre le 10 avril 1760 et dès le lendemain, les Anglais qui font le blocus du port prennent en chasse le convoi ; ce dernier se disperse, sans pouvoir empêcher que l'Aurore et le Soleil, alourdis par leur chargement, ne soient arraisonnés par l'ennemi. Puis, deux semaines plus tard, la flottille perd un autre navire, la Fidélité, qui fait naufrage au large des Açores. 

Le 15 mai 1760, les  trois navires restants mouillent dans le golfe du Saint-Laurent. C’est alors qu’ils apprennent que les Britanniques les ont précédés d’une semaine devant Québec et qu’ils ont détruits la flottille de Vauquelin. La Giraudais décide alors de se refugier dans la baie des Chaleurs en Gaspésie où il fait jeter l’ancre, le 18 mai, plus précisément dans l'estuaire de la Ristigouche. Il y obtient le soutien des Indiens Micmacs, qui promettent de combattre les Anglais aux côtés des Français. 

Mais il est pourchassé par cinq navires de guerre britanniques commandés  par le capitaine de vaisseau John Byron, qui ont appareillé depuis Louisbourg. 

Le 22 juin, lorsqu’il apprend leur arrivée imminente, La Giraudais décide de remonter la rivière Ristigouche, en espérant que le tirant d'eau des navires de Byron ne leur permettra pas d'en faire autant. Pendant que Byron hésite sur les moyens de la poursuite, La Giraudais installe une batterie à terre puis fait saborder des goélettes dans le chenal pour en interdire l'accès et protéger le Machault

Ce n’est que le 3 juillet que Byron parvient à trouver le chenal principal et décide de s'engager dans la rivière. Les Français engagent alors le combat, et, malgré leur infériorité numérique, parviennent à infliger de lourds dommages aux Britanniques jusqu’à ce que ces derniers parviennent à  détruire la batterie côtière. La Giraudais décide alors de remonter plus haut encore dans la rivière et pendant cinq jours, de furieux combats opposent Français et Britanniques. 

Mais le combat étant sans espoir, La Giraudais décide, au matin du 8 juillet 1760, de saborder ses bâtiments après les avoir fait évacuer. Puis, afin que l'ennemi ne s'empare pas des vivres, il fait sauter le Machault et le Bienfaisant, tandis que Le Marquis de Malauze, qui compte des prisonniers anglais à son bord, n’est pas sabordé et est capturé. Une fois à terre, les Français établissent un petit fort et y prennent garnison, jusqu’à ce que, le 23 octobre, ils apprennent la nouvelle de la chute de Montréal, qui avait eu lieu le 8 septembre. 

 

Il leur fallut encore six jours pour consentir à se rendre aux Britanniques.  

 

À SUIVRE

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