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Le blog d'André Boyer
Articles récents

ALEP ET L'HYPOCRISIE

20 Décembre 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

 

Devant tant d’hypocrisie, tant de mensonges, tant de mauvaise foi, l’analyse et la sincérité en sont presque désarmées puisque, quoique l’on écrive, on le mettra en balance avec ces tombereaux de propagande qui se déversent sur nos têtes depuis mars 2011 avec une intensité redoublée depuis les quelques semaines qui ont vu le siège et la prise du quartier est d’Alep.

 

J’ai pour moi d’avoir décrit depuis juillet 2012 l’origine du conflit et prévu ce qui s’est passé depuis, à ceci prés que je n’étais pas convaincu qu’Assad tiendrait jusqu’au bout, du moins avant l’intervention des Russes à l’automne 2015 (VOIR EN ANNEXE MES ARTICLES SUCCESSIFS SUR LE SUJET).

Pourquoi tant de lamentations sur la prise d’Alep-Est, camouflée en gémissements humanitaires ? Camouflée en effet, car d’où provient la perte de trois cent vingt mille vies, la fuite d’un quart de la population syrienne et la destruction presque totale de l’économie du pays ? De ce que les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France, l’Arabie Saoudite et le Qatar ont fourni les armes et les munitions aux rebelles syriens et non syriens (y compris deux mille Français), démocrates sincères ou islamistes fanatiques pour qu’ils fassent à leur place le travail qu’ils leur avaient assigné, à savoir chasser Assad du pouvoir. Pour atteindre cet objectif épatant, peu importe les morts, les blessés, les réfugiés, les destructions !

Personne ne se demande combien la Syrie de Bachar El Assad compterait de morts si la coalition américano-saoudienne n’avait pas uni ses efforts pour encourager, former et financer la rébellion. On dispose pourtant d’un évènement comparable, celui de l’offensive des Frères Musulmans contre le régime laïc d’Hafez El Assad le 2 février 1982 à Hama. L’armée syrienne fit durant 27 jours le siégé de Hama, provoquant la mort de deux mille personnes selon le rapport de la Defense Intelligence Agency.

Deux mille morts, c’était une terrible répression, à laquelle les Etats-Unis ne trouvèrent à l’époque rien à redire. Trois cent vingt mille morts, que l’on aurait imputé exclusivement à Assad, leur a semblé par contre un prix acceptable pour renverser le régime syrien, dictatorial, laïc et protecteur de minorités alaouites, chrétiennes et druzes en faveur d’un régime islamiste sunnite tout aussi dictatorial, mais favorable aux intérêts économiques des Etats-Unis et de leurs vassaux.

Car l’enjeu syrien n’est en rien humanitaire pour les Etats-Unis, sinon ils auraient depuis cinq ans amplement eu le temps d’imposer un compromis entre le gouvernement de Damas et ses opposants. L’enjeu est celui du contrôle de la Syrie pour des raisons stratégiques, du fait de sa position centrale entre les gisements de production de l'Est et la Méditerranée orientale.

En novembre 2010, l'Arabie Saoudite et le Qatar ont demandé au Président Bachar El-Assad de pouvoir ouvrir des oléoducs et gazoducs d'exportation vers la Méditerranée orientale. La Syrie a refusé sous la pression de la Russie, qui y voyait un moyen de contrecarrer ses propres exportations vers l’Europe. Ce refus a été suivi par les premiers appels à manifester contre le régime syrien en février 2011, puis à le renverser avec les encouragements des services secrets américains, britanniques et français, complétés par l’ingérence de combattants islamistes financés par le Qatar et l'Arabie Saoudite. L’Iran répondait le 25 juillet 2011 à ces menaces contre le régime syrien par un accord pour le transport de son gaz via l'Irak, faisant de la Syrie son principal centre de stockage, mais le chantier du pipe line a été gelé à cause de la guerre. Depuis l’Iran finance le régime syrien.

De plus, depuis 2009, des bouleversements considérables se sont produits en Méditerranée orientale du fait de la découverte par la compagnie texane Noble Energy, partenaire d'Israël, du gisement de Tamar à 80 km d'Haïfa, bouleversements encore accentués en 2010 par la découverte du gisement Leviathan qui concerne non seulement Israël, mais aussi la Turquie, la Grèce, Chypre, le Liban et surtout la Syrie qui disposerait des réserves de gaz les plus importantes de tout le bassin méditerranéen oriental. Israël est désormais énergétiquement indépendant, ce qui n’enchante ni les Etats-Unis ni les pays du Golfe et la Syrie risque de devenir un pays doublement stratégique pour la production de gaz et son acheminement vers l’Europe.

Voilà l’enjeu, tout le reste n’étant qu’un brouillage humanitaire franchement nauséabond, aux odeurs de pétrole, d’islamisme, de morts par centaines de milliers, de millions de personnes déplacées et d’attentats en Europe. Il a fallu répéter ad nauseam qu’Assad n’était qu’un dictateur, un assassin, un criminel de guerre pour couvrir d’un misérable manteau humanitaire le plan stratégique qui consistait à s’emparer de la Syrie pour contrôler l’extraction du gaz et son transport vers l’Europe. Aujourd’hui, les gouvernants engagés dans cette opération et leur valetaille médiatique en sont réduits à redoubler de cris d’orfraie pour essayer de masquer leur échec.

En effet, avec la chute d’Alep, dernier gage tenu par les rebelles tenus à bout de bras par le bizarre consortium constitué par les Etats-Unis, la Grande-Bretagne la France, la Turquie, le Qatar et l’Arabie Saoudite, la Syrie utile est à peu prés entre les mains de l’alliance entre la Russie et l’Iran. Le consortium a toujours les moyens de contrarier les plans de l’alliance comme l’a montré l’attaque de Palmyre planifiée par les Etats-Unis et exécutée par l’État Islamique, mais il n’a plus les moyens de s’emparer de la Syrie.

Avec le temps, j’ai remarqué que les faits étaient remarquablement têtus. Depuis 2011, on pouvait prévoir, comme je l’ai expliqué à l’époque, une très forte résistance d’Assad. De plus, l’enjeu stratégique syrien étant plus important pour les Russes que pour les Américains, les premiers se sont engagés plus à fond et ils ont gagné une première manche. La seconde peut consister à entretenir une forte rébellion à la périphérie avant de négocier un accord qui tienne compte des nouveaux rapports de force et des intérêts de toutes les parties prenantes.

 

Pourtant, quand je songe au profond cynisme et à l’insondable mépris pour les être humains de ces milliardaires américains et de ces princes saoudiens ou qataris confortablement installés dans de luxueux salons à bord de leurs immenses yachts, jouant avec la vie et la foi de milliers et de milliers d’enfants, de femmes et d’hommes, les excitant, les payant pour tuer, tout en les gavant de bonnes paroles, la bouche pleine de feinte compassion mais ne songeant qu’à leurs milliards futurs, la colère me saisit, encore renforcée par la stupidité complice de tous ces pleureurs qui leur emboitent le pas sur les medias à leurs bottes…

 

ANNEXE: SYNTHÈSE HISTORIQUE DU CONFLIT SYRIEN

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LA BATAILLE DE CARTHAGÈNE

17 Décembre 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

 

La Nouvelle-France est parvenue à résister aux attaques anglaises, mais le siège de Louisbourg (8 juin-26 juillet 1758) se révèle un épisode déterminant de la guerre.

 

La forteresse de Louisbourg  est située sur l'ile du Capbreton  à l'entrée du golfe du Saint-Laurent. Elle a été construite en 1713 par la Couronne française afin d'imposer ses droits sur les bancs de pêche de Terre-Neuve et elle a acquis une grande importance militaire car elle permet de contrôler l'entrée du golfe de Saint-Laurent et donc l'accès à la Nouvelle-France. Elle fut capturée en 1745 par les Anglais lors de la guerre de Succession d'Autriche et rendue à la France trois ans plus tard en échange de la ville de Madras en Inde.

Lorsqu’éclate la guerre de Sept Ans, les Anglais et les Français sont également conscients de l’importance stratégique de Louisbourg. En 1757, les Anglais tentent une attaque massive en envoyant 17 vaisseaux, 16 frégates  et 15 000 soldats depuis le port voisin d'Halifax. Du côté français, le vice amiral Dubois de La Motte  regroupe trois divisions à Louisbourg, soit 18 vaisseaux, 15 frégates et 11 000 soldats. Devant ce déploiement de force, les Anglais renoncent à attaquer, mais à leur tour les équipages français ne peuvent attaquer Halifax en raison d’une épidémie de typhus. En octobre, les deux flottes ennemies regagnent l'Europe.

Jusqu’en 1757, la Marine Royale, qui ne dispose pourtant que de soixante vaisseaux et trente frégates, est parvenue à tenir tête à la Navy qui aligne cent-vingt vaisseaux et soixante-quinze frégates. En 1755, une expédition française a pris Minorque. En 1757, la Marine Royale a non seulement défendu victorieusement Louisbourg mais elle a réussi à envoyer une escadre aux Indes orientales pour y acheminer des renforts.

En 1758, la Marine Royale décide, pour défendre Louisbourg, d’envoyer des renforts depuis Brest, mais le port est désorganisé par l’épidémie de typhus. Sur les cinq divisions qui sortent de Brest en 1758, quatre sont refoulées par des forces supérieures en nombre. La Marine Royale fait également sortir de Toulon, le 8 novembre 1757, une flotte de six vaisseaux et de deux frégates placée sous les ordres de La Clue-Sabran qui essuie une tempête trois semaines plus tard, l’obligeant à s’abriter dans le port neutre de Carthagène en Espagne.

La flotte y effectue des réparations lorsque La Clue apprend l'arrivée d'une flotte de dix vaisseaux anglais sous les ordres de l'amiral Osborn, renforcée par quatre bâtiments venus de Livourne  et du Levant. Devant l'inégalité du rapport des forces, La Clue prend la décision de rester dans le port, répondant ainsi aux vœux d’Osborn qui a l’ordre de l’empêcher de sortir de Méditerranée.

La Clue reçoit d’abord le renfort de deux vaisseaux qui le rejoignent au port puis voit arriver le 27 février 1758 trois autres vaisseaux, dont le Foudroyant,  partis en renfort de Toulon sous les ordres de Michel-Ange Duquesne de Menneville. Le Foudroyant, vaisseau à deux-ponts de 80 canons, fait partie des plus puissantes unités de la flotte. Au printemps 1756, il a participé à la conquête de la base anglaise de Minorque. En 1757, il a passé l’essentiel de l’année à quai, victime de la désorganisation des équipages qui désertent en masse car ils n’ont pas été payés depuis des mois.

Au large de Carthagène, comme La Clue est incapable de quitter le port en raison de vents contraires, le Foudroyant est pris en chasse par trois vaisseaux anglais détachés de la flotte d'Osborn, le HMS Monmouth, le HMS Hampton Court  et le HMS Swiftsure.

En fin d’après-midi du 28 février, il est rejoint par le Monmouth, doté d'une artillerie moins importante de 64 canons et de plus faible calibre, qui n’est pas normalement pas en mesure de l’inquiéter. Mais son capitaine, Arthur Gardiner, s’est juré de venger la défaite qu’a subie son chef à Minorque contre le Foudroyant. Aussi montre t-il une très grande énergie au combat qu'il communique à l'équipage.

Avant que les deux autres vaisseaux anglais ne le rejoignent, Duquesne de Menneville accepte le combat bord à bord. Il est alors victime de la panique des canonniers de la deuxième batterie qui ont déserté leur poste pour se réfugier dans les parties basses du vaisseau. Le feu de la première batterie, avec ses pièces de 36 livres permet toutefois de tenir à distance le Monmouth.

Le combat continue en pleine nuit, le capitaine anglais est blessé à mort et son vaisseau perd son mât d’artimon, mais ses deux lieutenants poursuivent la lutte. Le Foudroyant perd à son tour son mât d’artimon et, vers une heure du matin, son grand mât, qui, en basculant sur l’avant, endommage son mât de misaine, le dernier qui lui reste. Le Monmouth, hors de combat, finit par s’éloigner, mais le Foudroyant avec son seul mât de misaine est incapable de se dégager alors qu’arrivent les deux autres vaisseaux, le Hampton Court de 64 canons et le Swiftsure  de 74 canons qui l’attaquent des deux bords. Vers deux heures du matin, Duquesne de Menneville amène son pavillon alors que son bâtiment compte 200 tués et  blessés. Le Foudroyant sera remis en état par la Royal Navy qui l’emploiera sous le nom de HMS Foudroyant pendant trois décennies.

Les deux autres navires français, de plus petite taille, sont également mis hors de combat. L’Orphée est écrasé sous le feu de trois vaisseaux britanniques et l'Oriflamme  s’échoue délibérément pour éviter la capture.

 

La défaite du Foudroyant maintient La Clue à Carthagène jusqu’en juillet 1758, lorsque Osborn décide que la saison est trop avancée pour que les Français puissent faire la traversée jusqu’à la Nouvelle-France. Il lève le siège et La Clue ramène ses vaisseaux à Toulon, sachant qu’il est trop tard pour soutenir la forteresse de Louisbourg.    

 

 

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LES MEDIAS DEMASQUÉS

11 Décembre 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

Une des principales leçons de l’élection de Donald Trump, en attendant de pouvoir cerner sa politique, réside dans l’étonnant échec des médias.

 

Étonnant, car on pouvait s’attendre à l’élection triomphale d’Hillary Clinton, avec 98% des médias engagés en sa faveur. Il était cohérent en effet de créditer les médias d’une bonne connaissance des enjeux de l’élection, des programmes des deux candidats et de l’état de l’opinion publique américaine. Mais finalement, ce sont justement ces 98% qui sont révélateurs du rôle des médias dans l’élection américaine.

Normalement, les médias auraient dû approximativement partager leurs appuis entre les deux candidats, car on ne peut pas croire qu’ils étaient assez sourds et aveugles pour ne pas avoir compris que l’élection de Trump était possible. Mais ils ont jugé que l’accession au pouvoir du candidat républicain était dangereuse, soit pour les Etats-Unis, soit pour sa classe dirigeante, soit pour eux-mêmes et ils ont décidé en conséquence de s’y opposer au risque d’être désavoués par les électeurs. Il est remarquable en outre d’observer  que la quasi totalité des médias du monde aient  emboité le pas aux médias américains : tous anti Trump !

Le résultat spectaculaire de cette prise de position unanime des médias contre Trump a été leur désaveu par cinquante pour cent des électeurs américains, non seulement en raison de la rencontre entre l’opinion publique et la capacité de persuasion du candidat Trump, mais aussi du fait de leur propre engagement. Car l’opinion publique a perçu cet engagement des médias comme une sorte de déclaration de guerre contre elle : on lui déniait le droit de penser par elle-même (« les déplorables »).

Après cette démonstration éclatante, les médias apparaissent clairement comme les représentants de la classe dirigeante, comme l’a démontré le vote des électeurs du District of Columbia (Washington D.C.) qui se sont prononcés à 92,8% pour Hillary Clinton, ce qui signifie que les électeurs proches du pouvoir et les médias étaient en concordance parfaite.

C’est une situation nouvelle.

Si de tout temps, nombre de médias se sont fait les avocats du pouvoir en place, il a toujours subsisté une certaine diversité d’opinion et c’est pour cela qu’on les appelle « médias », des institutions ou des moyens impersonnels permettant une diffusion large et collective d’informations ou d’opinions, des opinions forcément contradictoires. Or, avec le temps, les médias ont été rassemblés au sein de groupes contrôlés par quelques financiers. Les journalistes de leur côté, de peur de perdre leur emploi, sont devenus de plus en plus dociles et ont dû remplacer, de gré ou de force, le souci de l’information par la volonté de commenter les évènements dans un sens favorable au pouvoir.

Pour prendre le cas de la France, les médias sont si étroitement sous contrôle qu’aucun journaliste français n’ose afficher de préférence partisane en dehors du « politically correct » qui correspond en gros à celui de SciencesPo Paris. On l’observe avec limpidité lorsque les journalistes se croient obligés d’interviewer avec une hostilité sous-jacente les représentants du FN, afin d’être disculpés de tout soupçon de complaisance pour des thèses qu’ils qualifient eux-mêmes de « nauséabondes ».

Aussi l’étonnement des médias face à l’opinion publique étonne. J’entendais tout récemment une sorte d’ombudsman interroger la rédaction de France Info au sujet du siège d’un quartier d’Alep. L’ombudsman s’étonnait lui-même que les auditeurs contestent la version de la guerre présentée par France Info qui consiste à attribuer toute la faute de la guerre et des massacres à Assad et à ses alliés russes et à présenter les rebelles comme des gentils. Le responsable de la rédaction a en gros répondu qu’il connaissait son métier et  que la version qu’il présentait était la bonne. En somme, « Circulez, il n’y a rien à voir »

Ce journaliste convaincu que ses raisons sont les bonnes et que les auditeurs se trompent confirme en retour ces derniers dans leur opinion envers les médias, considérés comme autistes et enrégimentés. L’arrogance médiatique a pour effet de créer une rupture entre les médias et l’opinion. S’il est impossible pour l’opinion d’être entendue des médias, il est en retour tout aussi impossible pour les médias d’influencer l’opinion, sinon négativement. Si bien que l’on constate de plus en plus souvent que les électeurs votent contre le camp des médias, ce qui pourrait bien expliquer, au moins en partie, les résultats des votes sur la constitution européenne en 2005 jusqu’à l’élection de Trump en passant récemment  par le referendum sur le Brexit.

C’est qu’en s’emparant des médias, les financiers, forcément proches du pouvoir, ont fait disparaître la pluralité des opinions, accélérant en conséquence la disparition programmée de l’autorité des médias (voir mon blog sur La fin des politiques). Cette autorité est morte, elle ne reviendra plus, l’opinion se forgeant désormais au travers de divers échanges sur Internet, que le pouvoir politique s’efforcera en vain de contrôler.

Les journalistes ne sont plus que des agents publicitaires du pouvoir et ils doivent en respecter les règles à commencer par celle qui consiste à ne pas provoquer l’hostilité des électeurs, à ne pas lui faire la leçon et à ne pas le mépriser ouvertement. Tant que les médias n’auront pas compris qu’ils sont ni plus ni moins crédibles qu’une annonce publicitaire, ils se fourvoieront dans un rôle qui ne leur sera plus jamais reconnu, celui d’intermédiaire entre le pouvoir et les citoyens.

 

Car derrière ce fiasco des médias, se profile l’avènement d’un nouveau type de pouvoir dont on commence à discerner les contours, plus direct, plus transversal, plus instable

 

 

 

 

 

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LA BATAILLE DE PETITCOUDIAC (1755)

7 Décembre 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

Avant de présenter le tournant du siége de Louisbourg, je souhaite réparer un oubli en relatant la bataille de Petitcoudiac de septembre 1755, une toute petite bataille, mais qui a contribué à la survie à long terme de l’Acadie.

  

Après la bataille de Fort Beauséjour,  que j’ai présentée dans le blog « 1755, Batailles sur tous les fronts », les Anglais contrôlaient la plus grande partie de l’Acadie et s’employaient à en chasser les Acadiens.

Pour atteindre cet objectif, ils ne répugnaient pas à user de fourberie. C’est ainsi, en 1755, que le lieutenant-colonel Robert Monckton, qui a donné son nom à la capitale du New Brunswick, remet des cadeaux au prêtre François Le Guerne et à ses ouailles pour les amadouer. Puis il convoque à l’ancien fort Beauséjour les quatre cent soixante chefs de famille acadiens qu’il emprisonne le 11 août en leur annonçant que leurs terres sont confisquées et qu'ils seront bientôt déportés. Leurs femmes  se cachent en forêt, avec les quelques hommes restés libres et appellent à l’aide les faibles troupes françaises commandées par Charles Deschamps de Boishébert qui sont proches du fleuve Saint-Jean.

Monckton décide alors de déporter tous les habitants des régions limitrophes de l'isthme de Chignectou, où se situe le fort de Beauséjour. Mais le 25 août, Boishébert arrive du fleuve Saint-Jean avec une soixantaine de soldats et autant d’indiens Malécites, tandis que Monckton envoie deux cent soldats sous les ordres du major Joseph Frye pour bruler les villages de la région.  Son but est d’obliger les femmes et les enfants chassés des villages détruits à se rendre aux Anglais.

Frye et ses troupes montent à bord de navires dans la rivière Mésagouèche et débarquent en aval de Chipoudy qu’ils incendient le 1er septembre, tuant le bétail, pillant les provisions et enlevant les quelques femmes et enfants encore présents. En fin d’après midi, ils ont détruit 181 maisons et enlevé une trentaine de personnes.

Pendant ce temps, les Acadiens évacuent les villages, font le guet et préviennent Boishébert, qui arrive avec une centaine d'hommes dans des canots en écorce à un kilomètre et demi en amont de la position anglaise des Anglais, mais ne peut qu’assister impuissant aux destructions. Il décide de regrouper ses troupes au village de Petitcoudiac.

Le lendemain 2 septembre, trois navires anglais remontent la rivière, détruisent plusieurs hameaux avant de s’approcher de  Petitcoudiac, où les attendent les cent vingt hommes de Boishébert renforcés par une trentaine d’Acadiens, ces derniers armés seulement de coutelas et de fourches. Les Anglais se retrouvent tout à coup encerclés et parviennent à grand peine à se replier sur leurs navires d’où ils ouvrent le feu avec leur artillerie sur les Français pour les tenir à distance.

Ils ont perdu une trentaine d’hommes, mais ils n’oseront plus s’aventurer loin de leurs forts pour poursuivre leurs destructions. De plus une partie des prisonniers du fort Beauséjour s’évadent, le 30 septembre 1755, reconstituent les familles, restent sur place, résistent aux Anglais et refusent de prêter serment d'allégeance au roi d'Angleterre en novembre 1764. La plupart se réfugient ensuite dans les autres colonies françaises de l'Amérique, mais certaines familles réussirent à se cacher sur place.

 

 

Leurs descendants habitent encore le sud-est du Nouveau Brunswick qui est le nom donné par les Anglais à l’Acadie, qui, grâce à leur résistance acharnée, existe toujours. 

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VIVA NESPRESSO!

2 Décembre 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

 

C’est une dosette de café qui s’est vendue grâce au sourire enjôleur de George Clooney, avec une délectation mercantile dans un décor aussi feutré que fantasmé.

 

Quel luxe ! Vous pouvez choisir la couleur de votre choix pour égayer sa robe d’aluminium qui contient presque cinq grammes de café à votre goût !

Rendez vous compte, cinq grammes de café et pour chaque gamme entre trois et cinq variantes ! Par exemple dans la gamme Intenso, comment ne pas hésiter entre le café Kazaar, robe alu noire et exceptionnellement intense et sucré (sucré ?), Dharkan, robe alu gris bleu et longuement (longuement ? quatre vingt dix secondes)  torréfié et velouté, Ristretto, robe noire tout en étant puissant et contrasté, Arpeggio, robe mauve, donc intense et crémeux même dans sa version décaféinée, Roma, robe marron profonde d’où son caractère riche et équilibré ?

Comment ne pas hésiter devant le choix des couleurs des capsules qui brillent devant vos yeux émerveillés,  avant de glisser la dosette dans la machine ? Quelle délicieuse torture qui ne trouve son exutoire que dans cette petite tasse mousseuse que l’on hume avec délice, où l’on humecte ses lèvres avec un frisson délicieux avant de laisser son arome se répandre dans sa bouche?

Nespresso, le paradis des yeux, du nez et de la bouche  pour la modique somme de 40 centimes, seulement cent euros le kilo : le luxe à la portée de tous…

Un paradis pour le consommateur mais l’enfer pour l’environnement. Lorsque Nespresso utilise une tonne d’aluminium, il rejette quatre tonnes de boues rouges pleines d’arsenic, de titane, de chrome, de plomb, de vanadium et de mercure en Méditerranée.    

Avec mille tonnes de café vendus par semaine, Nespresso ne représente que cinq pour cent du marché mondial, mais c’est la part la plus profitable du marché. Les petits producteurs du réseau équitable ne font pas le poids. Ils se contentent de vendre les  grands crus de café d’Ethiopie, de Madagascar, du Pérou, d’Equateur, du Honduras à 20 € le kilo, cinq fois moins cher que Nespresso.

D’autant plus que, sans s’occuper de sa qualité, Nespresso achète le café de toutes origines au cours le plus bas. Il y ajoute les aromes nécessaires pour que le consommateur retrouve dans le café issu de la capsule le goût de la noisette qu’il attend. Alors que la café traditionnel est torréfié à 200° en 20 minutes, Nespresso n’hésite pas à le torréfier à 1000°C en 90 secondes, ce qui lui permet de proposer une mousse qui persiste plusieurs heures grâce une pincée de graisse animale et d’additifs qui restent inconnus, quand les autres ne tiennent que quelques minutes,. 

 

Alors bravo Nespresso ! Tant pis pour les dégâts écologiques si les consommateurs et les actionnaires sont contents, encore bravo ! 

 

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LA MÉLÉE GRANDIT COMME UNE FLAMME

26 Novembre 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

 

Plus à l’ouest et plus tard dans la saison, la bataille de Fort Frontenac a lieu du 25 au 27 août 1758, sur l'emplacement de la ville actuelle de Kingston dans l'Ontario.

Le fort occupait une position stratégique, à la jonction du fleuve Saint-Laurent et du lac Ontario. Après leur cuisante défaite de Fort Carillon le 8 juillet 1758, qui aurait du être le prélude à l’effondrement de la Nouvelle-France, les Britanniques cherchent à remonter le moral de leurs troupes par une victoire facile.

Avant même la bataille de Fort Carillon, le Major General John Bradstreet, un officier anglais né en Acadie, avait déjà eu l’idée d’attaquer le fort Frontenac qui constituait un centre important du commerce des fourrures entre les Indiens et les Français et qui gardait la route vers Fort Duquesne. Pour s’y préparer, Il avait commencé à recruter des battoemen, des colons armés et spécialisés dans la construction de barques de transport, avant d’obtenir plusieurs régiments, soit au total 3 082 hommes, composé de 135 soldats réguliers, le reste provenant de milices des États de New York, du Massachussetts, du New Jersey et de Rhode Island.

Le Fort Frontenac, reconstruit et aujourd’hui appelé Fort Henry, est solidement édifié en pierres de calcaire, mais il n’a qu’une faible garnison commandée par Pierre-Jacques Payen de Noyan et de Chavoy, une centaine de soldats, dont cinquante trois aptes au combat renforcés par quelques miliciens et indiens. La défense du fort avait en effet été sacrifiée pour faire face à l’attaque de Fort Carillon. On se souvient à ce propos que le Gouverneur Vaudreuil avait envoyé quatre cent hommes pour renforcer la défense de Fort Carillon sous le commandement de Lévis qui étaient initialement destinés à Fort Frontenac

Pour conquérir cette place forte dégarnie, Bradstreet rassemble une flottille qui traverse le lac Ontario et débarque sans opposition le 25 août  à deux kilomètres de Fort Frontenac. Le matin du 26 août, l’artillerie britannique ouvre le feu, les Français répliquent avec leur propre artillerie et cela dure toute la journée du 27. Le lendemain au matin, deux navires français tentent sans succès de s’échapper du port, ce qui décide Noyan à hisser le drapeau blanc. Aucun renfort n’étant annoncé dans l’immédiat et à un contre trente, il n’avait évidemment aucune chance de résister longtemps!

La capture de Fort Frontenac fut une aubaine pour les Britanniques qui saisirent soixante canons et de nombreuses munitions et marchandises. Le fort fut détruit, les prisonniers français libérés contre la promesse de la libération du même nombre de prisonniers anglais.

Les Français renforcèrent aussitôt un nouveau fort plus en arrière sur le Saint Laurent, le Fort de  La Présentation. De son côté, le Marquis de Vaudreuil fut accusé de n’avoir pas cru que les Anglais oseraient se risquer sur le lac Ontario où la Nouvelle-France avait des navires de guerre. Une des deux lignes de communication entre Montréal et les forts français de l'ouest fut coupé tandis que l'autre itinéraire, le long de la rivière des Outaouais, resta ouvert pendant toute la guerre. 

Plus tard et plus à l’ouest encore, le 12 octobre 1758, a lieu la bataille de Fort Ligonier. On se souvient que les Anglais attaquent sans succès Fort Duquesne à deux cent kilomètres au sud du Lac Erié, qui sera finalement évacué par les Français en raison de la supériorité numérique anglaise le 26 novembre 1758.

Le commandant de Fort Duquesne François-Marie Le Marchand de Lignery, après sa victoire sur James Grant et ses sept cent cinquante hommes, manquait d’approvisionnement d’autant plus que ses lignes de communication avaient été en partie coupées  par la capture de Fort Frontenac en juillet. Aussi ordonna t-il une attaque contre les positions britanniques de Fort Ligonier, à quatre-vingt kilomètres à l’est de Fort Duquesne, afin de ralentir l’avance britannique et surtout de s’emparer de leurs ressources. Il utilisa à cet effet la quasi totalité de la garnison de Fort Duquesne, quatre cent quarante troupes de marine et cent cinquante indiens Delaware, sous le commandement de Charles Philippe  Aubry.

Le 12 octobre 1758, les Français arrivèrent aux abords de Fort Ligonier, défendu tout de même par deux mille hommes ! Ils s’emparèrent des chevaux qui étaient parqués aux environs, repoussèrent une première force de deux cent hommes du Maryland envoyés par le colonel James Burd, commandant Fort Ligonier, puis un bataillon de Pennsylvanie mais furent arrêtés par les tirs de l’artillerie du fort.

Le lendemain, ils tentèrent de prendre une redoute mais durent se retirer devant l’impossibilité de prendre le fort de vive force, tout  en ayant saisi plus de deux cent chevaux qu’ils ramenèrent à Fort Duquesne. Ils avaient tués plus de cent soldats britanniques et fait sept prisonniers alors qu’ils n’avaient perdu que quatre hommes, ce qui montrait la faible capacité combative des troupes issues des colonies britanniques, qui constituaient l’essentiel de la garnison de Fort Ligonier.   

 

Si l’année 1758 avait montré l’extraordinaire combativité des troupes de la Nouvelle-France et la grande qualité du renseignement qui bénéficiait du soutien des Indiens, la supériorité quantitative des troupes anglo-américaines pesait de plus en plus lourdement. 

À SUIVRE

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LE BAPTÊME DU FEU

22 Novembre 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

 

Dans le blog du 4 octobre dernier « Ma stratégie face au jury », j'ai conté la manière dont je me suis organisé pour me préparer au Concours d’Agrégation en Sciences de Gestion.

 

Finalement, la date de la première épreuve du Concours vint. Je pense que je fus convoqué au mois de mars 1980 afin de présenter mes travaux, le passage de cette épreuve étant nécessaire pour être admis à concourir pour les deux épreuves suivantes qui portaient sur les théories des Sciences de Gestion et sur une étude de cas dans le domaine de spécialité choisi par le candidat.

Le jury était présidé par le Professeur Jean-Guy Mérigot de l’Université de Bordeaux I, à qui je dois largement  d’avoir surmonté avec succès cette  première épreuve. Le jury comprenait également quatre professeurs, François Bourricaud (Paris IV), Paul Didier (Paris IX), Pierre Lassègue (Paris I) et Bernard Pras (Paris IX). Il s’y ajoutait deux professionnels, Michel De Boissieu (Cour des Comptes) et Jean-Jacques Leven (sans doute un chef d’entreprise ou un cadre supérieur).

Je ne connaissais pas et je n’ai aucun souvenir des interventions des professeurs François Bourricaud et Paul Didier comme de celle des deux professionnels.

En revanche, je connaissais le Président  Jean-Guy Mérigot et je l’aimais bien. C’était, et tous ceux qui l’ont connu le confirment, un gentilhomme bordelais d’autrefois, une sorte de Michel de Montaigne fourvoyé dans le monde impitoyable de la gestion universitaire. De plus, je craignais le Professeur Pierre Lassègue, qui, en tant que Président du CNU, s’était opposé à ce que je concoure à la qualification de Maitre de Conférence l’année précédente pour une affaire confuse de retard de ma date de soutenance. De plus, il avait été le Président du jury précédent en 1977 et il était le plus influent des membres du jury. Je connaissais aussi Bernard Pras, jeune agrégé du concours précédent et qui représentait la discipline que j’avais choisi pour l’épreuve sur cas, le marketing. Je jugeais qu’il serait plutôt indulgent et favorable à ma candidature. Je me trompais.

Le concours se déroulait Rue des Saints-Pères, dans les locaux de la Faculté de Médecine. Je me logeais la veille à l’hôtel Perreyve, rue Madame, à un quart d’heure de marche du lieu du concours. J’étais à pied d’œuvre le matin, confiant.

Devant un jury qui me semblait assez débonnaire, grâce au Professeur Mérigot, je présentais tranquillement mes travaux assez dispersés, sur la création d’entreprise, dix petits articles dans l’Encyclopedia Universalis, un article sur la fiscalité (sur un impôt, la Serisette, qui n’a jamais été mis en œuvre!),  quatre articles sur le marketing, dont deux en anglais grâce au Professeur Kristian Palda, qui étaient plutôt des articles de théorie microéconomique, deux articles sur la théorie des organisations et ma thèse qui présentait une analyse des effets de la fiscalité sur la firme.

Un patchwork.

Puis j’attendis (assez) tranquillement les questions sur ces divers travaux. Elles vinrent sans doute des divers membres du jury, sans que j’en garde un souvenir précis. Je me rappelle par contre douloureusement des questions du jeune agrégé Bernard Pras. Il ne m’interrogea pas sur mes articles, mais voulut tester mes connaissances du vocabulaire marketing, de préférence anglo-saxons. J’étais débordé, d’autant plus que j’entendais certains des termes qu’il énonçait pour la première fois de ma vie! Je bredouillais des réponses, je paniquais. C’est sans doute grâce aux questions posées par Bernard Pras que j’ai écris plus tard le dictionnaire de gestion qui illustre ce blog. J’avais l’impression qu’il avait pris à revers toute ma stratégie de préparation au concours en mettant à nu la superficialité de mes connaissances en marketing. 

C’est alors qu’intervint le Président du jury, le professeur Jean-Guy Mérigot, dans le rôle du sauveur. Il devait être agacé par la prétention du jeune agrégé à me faire la leçon, une manière indirecte de la faire aussi aux membres plus âgés du jury qui devaient ignorer encore plus que moi le sens des termes qu’il énonçait. Le Président l’admonesta ouvertement : «Laissez tranquille monsieur Boyer!». Cette injonction extraordinaire changea tout. Interloqué, Bernard Pras se tut et si je me souviens bien, les autres membres aussi.

L’audition était finie et je sortis de la salle rassuré. Je ne voyais pas très bien comment, après la sortie du Président du jury en défense, ma candidature serait rejetée.

 

Et en effet, j’appris rapidement que j’étais autorisé à poursuivre le concours.

 

À SUIVRE

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COMBATS DANS LA NEIGE ET EN ACADIE

18 Novembre 2016 , Rédigé par André Boyer

L’année 1758 est cruciale pour la Nouvelle-France. Les Français ont repoussé les Anglais à Fort Duquesne et ils ont remporté une incroyable victoire au centre du front, à Fort Carillon. D’autres batailles, moins importantes, ont été livrées la même année qui témoignent de la détermination des Anglais à s’emparer de la Nouvelle-France mais aussi des Français à la défendre.

Il fait très froid encore au mois de mars 1758, mais cela n’empêche pas Robert Rogers à la tête de ses Rangers d’attaquer, en prélude à la bataille de Fort Carillon, les troupes françaises et Amérindiennes près du lac Saint-Sacrement,  appelé aujourd’hui le lac George. Rogers conduit un groupe d'environ cent quatre vingt Rangers et troupes régulières depuis Fort Edward plus au sud pour reconnaître les positions françaises.

Le 13 mars 1758, Rogers et ses troupes marchent difficilement dans plus d’un mètre de neige lorsqu’ils constatent qu’un groupe, principalement composé d’Indiens, vient à leur rencontre. En effet, le commandant de Fort Carillon, averti du mouvement anglais, a envoyé une force composée de trois cent Indiens et de vingt Canadiens pour les rencontrer, avec à sa tête l’enseigne Durantaye. Ce dernier a divisé ses troupes en deux groupes, avec  en avant garde une centaine d’hommes qu’il conduit, précédent de cent mètres à peine le gros des troupes commandés par l’enseigne De Langy. Toute cette marche se déroule dans la neige épaisse.

Les hommes de Rogers les repèrent et leur tendent une embuscade qui oblige la compagnie de Durantaye à se retirer en désordre. Les anglais partent sans réfléchir à leur poursuite mais tardent à recharger leurs mousquets, occupés qu’ils sont de scalper leurs victimes. Aussitôt, les hommes de De Langy se mettent en embuscade et tuent environ cinquante hommes parmi les troupes de Rogers. Les survivants se battent avant de tenter de s’enfuir. Une partie d’entre eux finissent par se rendre mais ils sont tués et scalpés lorsque l’un des soldats de Rogers est découvert avec un scalp dans sa poche.

Au total, sur les cent quatre vingt hommes de Rogers, cent vingt sont morts. Rogers lui-même et soixante hommes parviennent à s’échapper dans la neige. Têtu, il reviendra en été attaquer Fort Carillon pour subir une nouvelle défaite.

Tout à fait à l’est de la Nouvelle-France au début de l’été, se déroule en Acadie un petit affrontement, abusivement appelé la bataille du Cran ou de Stoney Creek, entre les Britanniques qui voulaient déporter la population acadienne et ces derniers. 

Dès la bataille de Fort Beauséjour que j’ai relaté dans un blog précédent (1755, Batailles sur tous les fronts), certains Acadiens ont résisté face aux Britanniques pour éviter de se faire déporter. Un groupe composé de Canadiens, d'Acadiens et d’Indiens  malékites, sous le commandement de Charles Deschamps de Boishébert, attaqua les Britanniques dans la bataille de Petitcoudiac (à laquelle je consacrerai un prochain blog). De plus, Joseph Brossard dit Beausoleil, sous les ordres du gouverneur de Vaudreuil, arma un petit bateau corsaire qui réussit à faire quelques prises dans la baie de Fundy. La « bataille » du Cran est  livrée par un petit détachement britannique composé d’une centaine d’hommes, qui parvint à encercler et à tuer une vingtaine d’Acadiens et à détruire un village acadien, le 1er juillet 1758.

 

Ce n’était pas fini pour 1758, car la bataille se poursuivait plus que jamais à l’ouest, autour du Lac Ontario et du Lac Érié. 

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TRUMP'S LESSON

13 Novembre 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

TRUMP'S LESSON

Le 21 septembre dernier, dans un blog intitulé « L’élection d’Hillary Clinton menacée par les déplorables », j’écrivais en introduction de mon blog : « À ce jour, il me paraît évident que Donald Trump est en capacité de remporter les élections US, n’en déplaise à l’ensemble des medias français qui le couvrent d’injures et de sarcasmes depuis qu’il a émergé en politique. »

 

C’est écrire qu'aujourd'hui je ne suis pas spécialement étonné de l’élection de Donald Trump à la Présidence des Etats-Unis.

Pourtant, il semblerait que cette victoire ait surpris les medias, mais je crois qu’il s’agit plutôt pour eux d’exprimer leur dépit, car la victoire d’Hillary Clinton était attendue et souhaitée par la totalité des bien-pensants, qui, certainement par hasard, sont aussi les détenteurs des pouvoirs politiques, économiques et médiatiques.

La fable des sondages qui auraient égaré les medias ne tient pas. Bien sûr, on ne pouvait pas savoir à l’avance que les sondages étaient biaisés, mais maintenant que le résultat du vote est tombé, on sait pourquoi : mettez vous un instant dans la peau d’un électeur de Trump (j’espère que ce n’est pas trop pénible pour vous) répondant à un sondage sponsorisé par un média américain. Il sait que 98% des medias sont hostiles à la candidature de Trump. Vous croyez qu’il va déclarer qu’il vote pour Trump, pour peu qu’il ait peur que cela ait un impact négatif sur lui ou qu’il veuille faire plaisir à l’interviewer ? C’est l’hostilité affichée des medias à Trump qui a provoqué sa sous estimation dans les sondages et non pas les sondages qui ont trompé les medias.

Je relève d’ailleurs que les journalistes français se sont gaiement joints à la meute. Ainsi dans une publication de L’Obs et de Rue 89, le 9 novembre 2016, c’est à dire après que soit connu l’élection de Donald Trump, une journaliste, Noiwen Le Blevennec, intitule explicitement son article : « Raciste, misogyne, complotiste : dix choses à savoir sur Donald Trump ». À quoi rime cette volée d’injures contre le Président élu des Etats-Unis sinon à se défouler ? En outre, l’article a, semble t-il, plu à ses 181 commentateurs qui ont affublé le Président élu de qualificatifs encore moins recommandables…

Pourquoi tant de haine ? Parce que la victoire de Trump apparaît comme celle de la populace ignare contre les élites éduquées, celles qui s’expriment dans les medias. Mais ces élites éduquées ont simplement oublié que la population ignare les haïssait aussi. Et comme ces élites éduquées n’ont pas été capables de trouver un candidat qui calme la population ignare, maintenant elles ont Trump sur le dos qui ne va surement pas les épargner.

Je comprends donc leur rancœur.

Par contre, je ne comprends pas leur surprise. Il était clair, deux mois avant le vote, que l’élection avait basculé en faveur de Donald Trump lorsque Hillary Clinton, le 9 septembre 2016, devant une audience LGBT, s’est fait applaudir à tout rompre en déclarant au sujet des partisans de Trump : « La moitié des électeurs de Donald Trump peuvent être regroupés dans un panier de gens déplorables, car ils sont racistes, sexistes, homophobes, xénophobes, islamophobes ! ».

Elle a ainsi, par ces qualificatifs méprisants, justifié pleinement la haine que les « déplorables » vouaient aux élites de Washington D.C. et qu’elle personnifiait parfaitement. Et les élites se sont comportées à l’unisson, en ayant un extraordinaire réflexe de classe. Savez-vous quel a été le pourcentage de vote en faveur d’Hillary Clinton dans le District of Columbia (Washington D.C.) ? Tandis que 3% allaient à Gary Johnson et Jill Stein, 92,8% (260223 votes) ont voté pour la chère Hillary contre 4,1% (11553 votes) pour l’horrible Trump ! Le pouvoir quasi unanime a choisi Clinton. Pour des raisons morales ? Réfléchissez à cela…  

 

Mais, allons plus au fond des explications. Après le Brexit, pourquoi la victoire de Trump ?

Tout le monde a compris maintenant que le processus de la mondialisation était en cause. Ajouté au déséquilibre démographique croissant en défaveur des pays occidentaux, personne n’a pu éviter qu’un certain nombre de pays, à commencer par la Chine, ne prennent leur envol.

Les Américains ont cru qu’ils avaient gagné le jackpot lorsque le système communiste s’est effondré en 1989, parce qu’ils estimaient ne plus avoir d’obstacles pour étendre leur influence au monde entier. Cela a semblé vrai pendant une vingtaine d’années, pendant lesquelles on croyait dur comme fer à la fin de l’histoire. Sous leur houlette, les élites américaines et européennes ont cru habile de passer un pacte qui favoriserait les exportations de produits fabriqués à bas prix par les filiales des grandes entreprises occidentales. Ils permettraient ainsi aux pays offrant des salaires bas comme la Chine de s’enrichir en exportant, tandis que les pays riches bénéficieraient de marchandises bon marché, conserveraient les productions à haute valeur ajoutée et accessoirement se débarrasseraient de leurs usines les plus polluantes. C’était la mondialisation heureuse, grâce à des centaines de millions d’esclaves enrôlés dans les nouvelles usines du monde. Des esclaves qui auraient au moins du travail, c'était l'excuse. 

Les multinationales gagnaient ainsi sur les deux tableaux, l’éthique et le profit. Du côté éthique, elles « aidaient » les pays à bas salaires et du côté profit, elles atteignaient des taux de rentabilité inégalés, puisque le taux autrefois fabuleux de 15% de rendement net des capitaux investis devint, avec la mondialisation, la norme pour les grandes entreprises cotées en bourse. Malheureusement, les multinationales américaines et européennes durent en même temps déshabiller leurs pays d’origine en délocalisant leur production vers la Chine, les dragons et autres tigres asiatiques, un déshabillage qu’elles justifiaient tranquillement par les nécessités de la concurrence…

À la tête de ces entreprises, de ces banques, et des États qui organisaient cette merveilleuse stratégie, les élites occidentales se sont habillées de pied en cap d’une idéologie mondialiste, libre échangiste et humanitaire qui leur a permis de profiter sans états d’âme de ce mouvement de transfert vers les pays émergents, en conservant leurs emplois hautement qualifiés, en augmentant leurs dividendes et leurs salaires avec les profits des multinationales, tout en faisant la morale à ceux qui payaient la note en termes de revenus, de chômage et de désordre.

C'est ainsi que la classe moyenne américaine a vu son niveau de vie baisser, tandis que celui des élites augmentait fortement. 

Les usines abandonnées, les banlieues à la dérive, la drogue omniprésente, les paysans désespérés, les petits boulots précaires, les files d’attente des chômeurs n’étaient vu et traités que comme des problèmes annexes à l’irrésistible mondialisation et ceux qui subissaient tout cela était tout d'un coup devenus invisible. Ils étaient peut-être devenus invisibles, mais ils avaient encore le droit de vote, ils l'ont utilisé. 

Du coup, les élites qui croyaient que cela allait durer toujours, viennent de découvrir que, comme d’habitude, elles se sont encore trompées pour Trump comme pour le Brexit, comme pour les Subprimes en 2008, comme pour la chute du mur de Berlin en 1989, comme  pour la crise du pétrole en 1973, et ainsi de suite en remontant dans le temps.

Simplement, un retour de balancier est en cours. À la mondialisation va succéder la fermeture, car en dehors des élites globalisées, tout le monde la réclame et, bien sûr, la classe dirigeante qui a présidé à la mondialisation sait qu’elle est disqualifiée pour procéder à sa fermeture, d’où sa hargne.

D’où le Brexit.

D’où Trump.

D’où la suite à venir.

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L'INCROYABLE VICTOIRE DE FORT CARILLON II

11 Novembre 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

L'INCROYABLE VICTOIRE DE FORT CARILLON II

 

Le 7 juillet 1758, Abercombrie envoya un détachement commandé par le Lieutenant Colonel John Bradstreet le long du chemin de portage pour reconstruire le pont détruit. Le reste de l’armée suivit et s’installa prés de la scierie. Les éclaireurs et les prisonniers lui rapportèrent que Montcalm avait six mille hommes avec lui, alors qu’il n’en avait que la moitié. Ils ajoutèrent aussi que Montcalm attendait un renfort de trois mille hommes alors qu’il en attendait quatre cents qui pouvaient arriver à tout moment.

Abercombrie envoya son ingénieur, le Lieutenant Mathew Clerk, reconnaître les défenses françaises qui lui rapporta que ces dernières étaient faibles et qu’elles pouvaient être prises même sans artillerie. Il ne s’était pas rendu compte que les fortifications étaient camouflées par des branchages, car le jour même Montcalm avait fait installer des rangées d’abattis d'arbres dont les extrémités avaient été durcies au feu devant les retranchements du Fort Carillon.

Ce dernier, situé sur une pointe au sud du lac Champlain, était entouré d'eau sur trois de ses côtés tandis que, sur son quatrième côté, il était en partie protégé par un marécage et en partie fortifié, appuyé qu’il était par trois batteries de canon.

La faiblesse supposée du fort et l’arrivée imminente des supposés trois mille hommes de Lévis convainquirent Abercombrie d’attaquer dés le lendemain, tandis que Lévis ralliait le soir même le fort, avec quatre cent hommes seulement, mais qui constituaient cependant un renfort bienvenu.

Le matin du 8 juillet, deux précautions  valant mieux qu’une, Clerk entreprit d’observer à nouveau les défenses françaises et parvint à la même conclusion que la veille : la place pouvait être prise d’assaut.

Abercombrie avait décidé d’attaquer selon trois colonnes. L'infanterie légère du colonel Thomas et les Rogers’s Rangers commencèrent par repousser les  éclaireurs français  dans le Fort. Suivit l’avant garde constituée par les miliciens recrutés dans les États de New-York et du Massachusetts puis  trois colonnes de troupes régulières, celle de droite commandée par le colonel William Haviland, celle du centre par le lieutenant-colonel John Donaldson et celle de gauche par le  lieutenant-colonel Francis Grant à la gauche. En réserve, les milices du Connecticut et du New Jersey attendaient.

De son côté, Montcalm avait aussi organisé ses forces en trois brigades et une réserve. Il s’était réservé le centre du dispositif où il commandait le Régiment Royal-Roussillon et le Régiment de Berry ; à sa droite, Lévis commandait les Régiments de Béarn, de Guyenne et de la Reine et à sa gauche Bourlamaque commandait les Régiments de La Sarre  et de Languedoc. De plus, les canons des redoutes protégeaient les flancs, même si la redoute de droite n’était pas achevée. Enfin, l’espace découvert entre le flanc gauche de Bourlamaque et la rivière La Chute  était fermé par une milice de La Nouvelle-France et par les troupes de marine.

Abercrombie avait programmé le début des combats à 13 heures, mais les milices de New-York engagèrent le combat une demi-heure plus tôt. Cette précipitation poussa Haviland à attaquer aussitôt alors que ses troupes n’étaient pas encore en position, ce qui engendra désordre et absence de coordination.

La colonne de droite attaqua donc la première, suivie des colonnes du centre et de gauche et même d’une partie de la réserve, qui brulait d’engager le combat. L’abattis devint rapidement un cimetière et la première vague d’attaque se révéla un échec. Mais Abercrombie persista à lancer de nouvelles attaques, en  partant du postulat que les défenses françaises pouvaient facilement être prises d’assaut.

À 14 heures, il fit envoyer des barges britanniques avec de  l'artillerie lourde qui descendirent, contrairement au plan initial, le canal entre une île et la rive, ce qui les amena à portée des canons du fort qui coulèrent deux barges, ce qui fit battre les autres en retraite. En même temps, il ordonna aux réserves du Connecticut et du New Jersey d'entrer dans la bataille avant de les rappeler lorsqu’il devint clair que l’attaque avait échoué, mais une partie d’entre elles continua à attaquer.

À 17 heures, une offensive désespérée réussit finalement à atteindre le mur du fort où les soldats britanniques furent tués à la baïonnette. La tuerie continua jusqu'au coucher du soleil.

Au coucher du soleil, prenant acte du désastre, Abercrombie ordonna à ses troupes de se replier jusqu’à un espace dégagé sur le lac George. La retraite au travers de la forêt s’effectua dans la panique, car la rumeur courrait d’une attaque des Français.

De son côté, Montcalm, inquiet d’une contre-attaque anglaise et conscient de la fatigue de ses troupes après une longue journée de bataille, leur fit livrer des barils de bière et de vin. Ses troupes passèrent la nuit à se reposer et à préparer les défenses pour faire face à une éventuelle contre-attaque, qui ne vint jamais.

Le 9 juillet, l'armée anglaise remonta le lac George pour regagner sa base au coucher du soleil. Elle avait perdu environ mille hommes dans la bataille principale auxquels s’ajoutaient mille cinq cents blessés, sans compter la centaine de tués et de blessés de l’accrochage de Bernetz Brook contre les troupes du capitaine Trépezet. De leur côté, les Français avaient perdu cent quatre morts et deux cent soixante treize blessés dans la bataille principale auquel s’ajoutait la quasi perte du détachement Trépezet.   

 

Cette victoire inespérée à un contre quatre que remporta Montcalm retarda d’une année l’invasion de la Nouvelle-France. Mais il fallut, le 27 juillet 1759, évacuer le fort et le détruire pour défendre Québec menacé. Le fort fut occupé sans effort par Jeffery Amherst qui le reconstruisit et le nomma fort Ticonderoga, en iroquois « la place entre deux grandes eaux».

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