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Le blog d'André Boyer
Articles récents

Comment Deschamps a perdu la finale

11 Juillet 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #CULTURE

Comment Deschamps a perdu la finale

CHRISTIANO RONALDO, CAPITAINE DE L'ÉQUIPE DE FOOTBALL DU PORTUGAL

 

Le récit ci-dessous est parfaitement imaginaire, sauf les faits et la logique du raisonnement :

Tout le monde savait que Ronaldo était le leader de l’équipe de football du Portugal. Deschamps est donc allé voir le joueur qui évoluait en face de lui dans le match, Dimitri Payet, en lui demandant de le  mettre hors d’état de jouer, sans se faire sanctionner si possible.

Dimitri Payet s’y est pris à deux fois, mais il a réussi à provoquer une rupture du ligament interne au niveau du genou gauche de Ronaldo. Les larmes dans les yeux, Cristiano Ronaldo a du se résoudre à quitter le terrain au bout de huit minutes de jeu pour ne pas handicaper l’équipe.

La voie était libre pour l’attaque française qui  n’aurait plus à se préoccuper de la menace que faisait en permanence planer Ronaldo sur la défense française.

L’opération a échoué, en partie parce que le gardien portugais s’est révélé particulièrement coriace et en partie parce que l’équipe portugaise a été galvanisée par la blessure de son capitaine, d’autant plus que ce dernier est resté au bord du terrain pour les encourager.

Finalement, l’équipe portugaise a marqué un but pendant les prolongations et a remporté la finale de la Coupe d’Europe.

Le calcul tactique a été bon, Ronaldo a été mis hors d’état de jouer, tandis que le calcul stratégique a échoué, en raison de la réaction de l’équipe portugaise à ce « coup du sort ».

 

C’est une erreur que commettent souvent les joueurs d’échec débutants…

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Vogue le Deuxième Empire

7 Juillet 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

Vogue le Deuxième Empire

LA CELLULE DE LOUIS-NAPOLÉON AU FORT DE HAM

 

Après ses remarquables succès électoraux du début de l’année 1852, Louis-Napoléon est triomphalement accueilli par la population lors de son tour de France de l’automne 1852, ce qui lui fait prendre conscience qu’il ne dépend que de lui d’être sacré « Empereur » comme son oncle Napoléon 1er.  

 

Le 7 novembre 1852, le Sénat est sollicité pour en faire la proposition qui modifiait la Constitution sur ce seul point :

 

Article premier. La dignité impériale est rétablie. Louis Napoléon Bonaparte est Empereur des Français, sous le nom de Napoléon III.

Article 2. 
La dignité impériale est héréditaire dans la descendance directe et légitime de Louis-Napoléon Bonaparte, de mâle en mâle, par ordre de primogéniture, et à l'exclusion perpétuelle des femmes et de leur descendance.

 

Cette modification donna lieu à un plébiscite, les 21 et 22 novembre 1852 qui se traduisit par 7 824 129 « oui » en faveur de l’Empire, 253 145 « non », 65 126 nuls et 2 millions d’abstentions environ. La dignité impériale était rétablie à son profit. Louis-Napoléon prit désormais le titre de Napoléon III. Le contexte politique de l’époque expliquait l’adhésion de la population. L’émeute avait renversé le régime de Louis-Philippe et installé une République qui avait au début une coloration presque communiste. La peur du désordre avait successivement engendré une assemblée conservatrice puis royaliste et un président qui finissait par se proclamer empereur, sur la seule magie de son nom.

La société bien-pensante de l’époque le considérait comme un moindre mal, les paysans le révéraient, les ouvriers l’observaient avec méfiance mais sans hostilité : il avait les mains libres, à la tête du pouvoir politique le plus concentré du monde et à ce titre la Ve République a hérité de son système de pouvoir.

Symboliquement, le IIe Empire commença le 2 novembre 1852, sachant que le  terme de « IIe Empire » impliquait la remise en cause du traité de Vienne de 1815,  qui sera plus tard à l’origine de la guerre de 1870 et de sa chute.

Louis-Napoléon Bonaparte reste cependant un aventurier, un aventurier qui devient Empereur.  

Fils du dernier frère de Napoléon, Louis Bonaparte, et d’Hortense de Beauharnais, Charles-Louis Napoléon Bonaparte est né le 20 avril 1808. Lors des Cent-Jours, il partit avec sa mère pour un exil en Suisse. Il est éduqué par un ancien révolutionnaire, Le Bas et comme il n’est qu’un proscrit, il n’hésite pas à se prononcer contre les pouvoirs établis par les traités de 1815, à faire siennes les idées-forces du Mémorial de Sainte-Hélène, notamment l’idée que Napoléon, continuateur de la Révolution, a répandu en Europe le principe des nationalités.

En 1830, il organisa avec les carbonaris un complot pour placer l’Aiglon sur le trône d’Italie. Puis, dés la mort du duc de Reichstadt en 1832, il décida qu’il était désormais le chef de la dynastie napoléonienne.

En 1836, il tenta sans succès de soulever la garnison de Strasbourg et se fit expulser aux Etats-Unis, d’où il rejoignit Londres. Profitant du regain de ferveur bonapartiste provoqué par le retour des cendres de l'Empereur, il débarqua en 1840 à Boulogne avec quelques conjurés dont son ami Persigny, dans le but de provoquer un soulèvement en sa faveur.

 

Arrêté, il fut condamné à la prison à vie au fort de Ham, dont il s’évada en 1846 en empruntant la tenue d'un ouvrier du nom de Badinguet, qui sera l’un des surnoms qu’on lui donnera. 

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BREXIT

1 Juillet 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

BREXIT

LE BREXIT VU PAR UN HUMORISTE.

 

Je dois vous faire un double aveu : premièrement, je prévoyais logiquement le Brexit sans avoir eu toutefois, je l’avoue, le courage de l’écrire. Deuxièmement, j’étais favorable au Brexit avant que le vote ait lieu et, ce qui aggrave mon cas, je le suis encore plus après.

 

Pourquoi suis-je pour le Brexit? Parce qu'il va enfin permettre de construire des structures européennes adaptées à la situation actuelle et future de l'Europe. Dieu sait en effet si elle va devoir faire face à de grands défis qui ne souffrent pas d'une organisation aussi inadaptée que l'UE. 

Mais commençons par le début de l'histoire. Pourquoi 52% des Britanniques ont-ils voté pour le Brexit ? Pas parce qu’ils étaient anti-européens mais parce qu’ils voulaient être libres. Pourquoi 48% des Britanniques ont-ils voté contre le Brexit ? Pas parce qu’ils étaient enthousiastes du fonctionnement de l’Union Européenne mais parce qu’ils avaient peur des conséquences de cette sortie. Retournez la question du Brexit dans tous les sens, mais vous serez bien obligé de constater que c’était le fond du débat.

Désormais, malgré toutes les prédictions apocalyptiques des adversaires du Brexit destinées à faire peur à l’opinion européenne afin qu’elle se convainque que sortir de l’UE, c’est mal, c’est stupide, c’est dangereux, ce n’est plus l’UE qui a la main mais la Grande-Bretagne qui joue au chat et à la souris avec l’UE. Le débat à venir ne concerne donc pas la manière dont la Grande-Bretagne va négocier ses futures relations avec l’UE, car vous pouvez faire confiance aux Anglais, ils ont toujours su gérer leurs intérêts et ils ont désormais un grand avantage, ils ont les mains libres.

L'effet majeur du Brexit est que le dogme de l'irréversibilité de l'entrée de l'UE est brisé, comme celui de l'entrée dans le système soviétique, vérifié depuis 1917, s'est rompu en 1989. 

Le débat est en revanche ouvert en Europe entre ceux qui croient que l’Union Européenne est réformable et ceux qui ne le croient pas, dont je fais partie. C’est que je ne connais aucun exemple de structure qui ait été capable de changer elle-même, de l’intérieur, ses principes de fonctionnement.

Quels sont donc les principes de fonctionnement de l’UE qui devront être radicalement modifiés pour que cette dernière continue à exister ? Ils sont, de l’avis unanime des analystes, au nombre de trois.

Tout d’abord, un système de décision anti démocratique inventé malheureusement par deux Français, Jean Monnet et Jacques Delors, qui, notez le, n’ont jamais été élus par qui que ce soit. Comment faire pour garder l’UE, tout en renversant totalement sa logique de fonctionnement afin de la mettre au service des Européens ?

Ensuite, une révérence, que dis-je, une idolâtrie unique dans le monde, pour la concurrence totale qui ne s’embarrasse d’aucunes limites, détruisant les services publics, les  grandes entreprises comme Pechiney ou les petites comme ces centaines de milliers de PME de tous les secteurs économiques, agricoles, industriels et commerciaux, déstabilisées par une production à jet continu de normes et de règlements bureaucratiques sans aucune prise en compte des différences de structures sociales, comme l’illustre l’affaire des travailleurs détachés. Comment contraindre l'UE à renoncer à ce principe qu'elle applique tous les jours avec enthousiasme et persévérance?

Enfin, une inféodation aux intérêts des USA, de la Chine et des multinationales avec leurs milliers de groupes de pression installés à Bruxelles. Cette UE qui capitule devant la Turquie, qui obéit aux injonctions américaines pour se confronter à la Russie, peut-elle être chargée de défendre les intérêts de l’Europe ? Cette UE incapable de défendre ses frontières et même de les définir, a t-elle la moindre crédibilité pour défendre les Européens ? Pourquoi l’UE continue t-elle à négocier les conditions de l’entrée de la Turquie dans l’UE sans jamais nous expliquer pourquoi elle devrait en faire partie, mais pas le Maghreb ? Comment faire pour que l'UE ait pour objectif premier de défendre l'Europe et non de se soumettre aux injonctions de ses concurrents et adversaires qui ont interêt à ce que l'Europe leur obéisse, au travers de l'UE? 

Il me paraît évident que si l’UE veut faire le bonheur des Européens malgré eux, si elle met aveuglément et obstinément en œuvre un principe de concurrence qui détruit ses structures économiques et sociales et si elle n’est  pas capable de défendre ses intérêts,  vivement qu’elle disparaisse et c’est ce qui va se produire.

Nombreux encore sont ceux qui ne veulent pas le croire, comme ils n’ont pas cru, avant que cela arrive, à l’effondrement du système soviétique en deux années, entre le 9 novembre 1989, soir de l’ouverture de la frontière de la RDA  et  le 26 décembre 1991, jour de la dissolution de l’Union Soviétique.

Si je me permets de vous inviter à revoir vos schémas d’analyse et à vous souvenir de ce blog du 1er juillet 2016, c’est que je me souviens d’avoir écrit en 1981, contre l’avis général, un article (à votre disposition) prévoyant la chute du système soviétique à moyen terme. J’avais alors prêché dans le désert, en attendant que huit années plus tard le moindre scribouillard m’explique à longueur de colonnes après la chute du mur de Berlin, que c’était inévitable. Mais c’était après ! Ce serait donc mieux, cette fois ci, que nous  soyons nombreux à le prévoir avant !

Ce devrait d’ailleurs être le souhait de tout Européen sincère, dont la priorité ne peut être que celle de définir et mettre en œuvre une organisation de l’Europe démocratique, respectueuse des intérêts de ses populations et dont la priorité soit de défendre l’Europe face aux intérêts extérieurs à l’Europe. 

Vous ne croyez pas que c’est évident ?

En attendant, au titre de contribution à l’humour européen, le premier souci du Président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, le jour même du résultat du Brexit, a été d’écrire une lettre aux fonctionnaires britanniques de l'UE pour les rassurer : 

« D'après notre Statut, vous êtes des fonctionnaires de l'Union (...) Vous avez laissé vos « chapeaux » nationaux à la porte lorsque vous êtes entrés dans cette institution. Aujourd'hui, cette porte ne se referme pas sur vous (...). Vous avez toujours été des fonctionnaires européens loyaux envers notre Union et vous avez apporté une énorme contribution au projet européen. C'est dans cet esprit de loyauté réciproque que je vais maintenant travailler avec les présidents des autres institutions européennes pour m'assurer que nous pourrons tous continuer à bénéficier de vos remarquables talent, expérience et engagement. Vous pouvez être sûrs que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir, comme président de la Commission, pour vous soutenir et vous aider dans ce processus difficile. Notre Statut sera lu et appliqué dans un esprit européen... » En clair, les fonctionnaires européens de nationalité britannique garderont leurs emplois et les avantages qui leur sont attachés.

Vous croyez toujours que l’UE va se réformer ?

 

Je vous invite donc à changer de paradigme : l’UE doit disparaître au plus vite afin d’être remplacée, je l'écris ici pour la troisième fois, par un nouvel organisme commun aux Européens, fondé sur des principes démocratiques et des frontières définies, afin qu’il puisse prendre en charge les intérêts des Européens. 

Sans cela, le chaos nous guette, car j’insiste, le statu quo est désormais hors de portée et la réforme, illusoire.

 

Telle est la leçon du Brexit. 

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Au début, Louis-Napoléon serra la vis

26 Juin 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

Au début, Louis-Napoléon serra la vis

LOUIS-NAPOLÉON, ENTRE PRÉSIDENT ET EMPEREUR.

 

Napoléon III s’efforça donc de prendre en main, grâce à la puissante et  docile machine de l’État français, la société dans sa dynamique complexe.

 

Il commença par saisir fermement les rênes du pouvoir. Les Républicains s’insurgeaient de subir un putsch, à l’image d’un Victor Hugo en exil qui publia un pamphlet intitulé « Napoléon le Petit » avant de se réfugier à Guernesey. Il faut convenir que les Républicains n’avaient guère eu le temps de profiter du coup d’État qu’ils avaient eux-mêmes organisé en 1848 et que les socialistes enrageaient de n’avoir pas pu réussir les leurs.

Mais Louis-Napoléon fit taire toute opposition physique en agissant avec la plus grande rapidité. Dix-neuf jours après le coup d’État, il le faisait approuver par une large majorité des électeurs au moyen d’un plébiscite qui lui donnait « les pouvoirs pour établir une Constitution sur les bases proposées dans la proclamation ». Il obtenait 7 439 216 « oui » contre 646 000 « non » pour toute la France, alors que pour la seule ville de Paris, il obtenait seulement 132981 « oui » contre 80691 « non », ce qui montrait bien l’opposition entre la France « profonde » et Paris : l’opposition entre les bobos et le reste du pays ne date pas d’hier…

En ce début de règne, Louis-Napoléon accumulait les décisions qui visaient toutes à promouvoir la France conservatrice aux dépens de l’idéologie républicaine de gauche. Entre décembre 1851 et juillet 1852, le Panthéon fut rendu au culte catholique, Louis-Napoléon s’installa aux Tuileries, la devise « liberté, égalité, fraternité » fut supprimée, la garde nationale fut dissoute, les titres de noblesse furent rétablis, les congrégations religieuses féminines autorisées, le port de la barbe «symbole d’anarchie » interdit pour les professeurs et l’enseignement religieux mis au premier rang des devoirs des instituteurs. 

Inspirée de la Constitution consulaire de l’an VIII, la nouvelle Constitution était promulguée dès le 14 janvier 1852. Selon cette dernière, le Président était nommé pour dix ans : il commandait les armées, déclarait la guerre, signait les traités, possédait seul l’initiative des lois, désignait et révoquait les ministres qui n’étaient responsables que devant lui, une sorte de Président de la Ve République en somme.

De plus, un Corps législatif de 270 membres était élu pour six ans au suffrage universel, qui ne tenait qu’une seule session annuelle de trois mois pendant laquelle il siégeait à huis clos, examinant pour les accepter ou les rejeter, les projets préparés par le Conseil d’État. Le Sénat pour sa part, composé d’autorités sociales inamovibles au nombre de 150, était chargé de garder la Constitution et de la modifier par sénatus-consultes.

Point clé, la liberté de la presse était fortement réduite. Selon le Décret du 17 février 1852, l’autorisation préalable de publier était rétablie ; les images étaient censurées. Les journaux ne pouvaient rendre compte des débats parlementaires et des procès qu’en se contentant de reproduire les procès verbaux officiels, sans commentaires.

L’emprise du pouvoir sur la nation était telle que, lorsque le Corps Législatif fut élu au suffrage universel le 29 février 1852, il ne comprenait plus que huit opposants sur 261 membres, car il ne comptait qu’un seul élu issu de la précédente assemblée : Montalembert, qui, avec cinq royalistes et trois républicains, Cavaignac, Hénon et Hippolyte Carnot, représentait toute l’opposition.

 

Aussi, en parcourant la France à l’automne 1852, Louis-Napoléon prit tout d’un coup conscience qu’il avait les mains libres pour devenir Empereur comme son oncle.

 

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Pierre Baranger, l'ami

20 Juin 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

Pierre Baranger, l'ami

LE PORTRAIT DU PROFESSEUR PIERRE BARANGER ALORS QU'IL ÉTAIT DIRECTEUR DE L'IGR

 

Le 16 mai dernier, je décrivais la situation dans laquelle je me trouvais, à l’orée du Concours d’Agrégation en Sciences de Gestion, moi qui était encore assistant non titulaire à l’IAE de Nice en ce début d’année 1980 et qui venait à peine d’être reçu en tant que Maitre-Assistant en Sciences de Gestion quelques jours auparavant.

 

J’avais pour moi un moral d’acier puisque je venais d’obtenir un succès marquant quoique logique à cette qualification, mais j’avais contre moi d’être nullement prêt à franchir l’étape décisive du concours d’accès au grade le plus élevé de la carrière universitaire, auquel s’ajoutait mon isolement loin des cénacles où se préparaient le concours.

La rumeur prétendait que certains candidats étaient destinés à réussir ce concours qui offrait 16 postes pour 64 candidats en raison de leur expérience, de leur ancienneté, de leur réputation et de la qualité de leur préparation. Je ne répondais à aucun de ces critères ce qui fait que tout le monde considérait que je ne me présentais que pour échouer et me représenter plus sérieusement au concours suivant.

En revanche, Pierre Baranger figurait parmi ces favoris. Je l’avais rencontré quelques semaines auparavant et il savait que j’étais l’un de ses concurrents. Loin de m’écarter, il m’avait proposé avec une extraordinaire générosité de m’aider à préparer le concours en me fournissant les sujets que traitait le groupe dirigé par le très connu Professeur Pierre Lassègue, groupe dont il faisait partie.

Je saisis immédiatement toute la grandeur de son attitude qui consistait à aider l’un de ses concurrents parce qu’il avait plus de difficultés que lui à la préparation au concours. Je lui en ai toujours voué une grande reconnaissance et ce fut l’origine de notre profonde amitié, aujourd’hui éteinte par son décès en 2004, à l’âge de 69 ans, des suites d’un cancer.   

Pendant sa vie, après une formation en Droit et à Sciences Po Paris, il a conduit deux carrières professionnelles successives l’une de cadre d’industrie, notamment au Québec de 1962 à 1975 puis de Professeur en Sciences de Gestion, surtout en Bretagne. Lorsque je l’ai connu, il était Professeur Associé en Sciences de Gestion à l’Université Paris Val de Marne avant de devenir Professeur en Sciences de Gestion en 1981 et de rejoindre un poste à Rennes.

Il a alors commencé sa véritable carrière universitaire pratiquement en même temps que moi. Il a pris la direction de l’IGR avant de rejoindre l’Université de Brest et il a notamment écrit des ouvrages sur la Gestion de la Production, constituant avec Jean-Claude Tarondeau et Vincent Giard, le groupe des trois professeurs français qui ont fait vivre la discipline universitaire de la Gestion de la Production.

Il a naturellement dirigé des thèses et participé à des jurys. C’est précisément lorsqu’il m’annoncera qu’il ne pourrait pas se rendre à un jury de thèse à Nice en raison d’un contrôle de santé que j’apprendrai sa maladie contre laquelle il a lutté jusqu’au bout de ses forces. Je me souviens tout particulièrement de ce colloque sur « La chaine de valeur : un concept démodé ? » qu’il a organisé quelques mois avant sa mort. Tous ses amis y ont participé sachant que sa fin était proche et nous faisions semblant de débattre de sujets scientifiques comme si de rien n’était, le cœur lourd. Je garde la triste et douce image du dîner en tête à tête que nous avons partagé la vieille du colloque, lui me faisant part de sa volonté de lutter par tous les moyens existants ou potentiels contre sa maladie et moi cherchant des mots de soutien…  

Pierre Baranger n’est plus, mais dans mon souvenir il reste celui qui  conjuguait deux qualités extraordinairement rares, l’amour des autres et la rigueur pour soi-même. Je l’ai vu s’occuper de sa famille et de ses étudiants sans jamais ménager sa peine. J’ai vu la force qu’il puisait dans sa grande famille, avec des frères et des sœurs qui oeuvraient aussi bien au MIT que dans les ordres monastiques en Afrique Centrale ou à la direction du Ministère des Affaires Étrangères.

Mais personne ne pouvait comprendre Pierre Baranger, s’il ne connaissait pas son attachement à l’île de Raguenès au large de Néves que lui avait légué son père. C’était une petite île de trois hectares accessible de la côte à marée basse que le souci de protéger fit qu’il abandonna une carrière prometteuse au Canada pour se rapprocher de la Bretagne, donc de l’île qui lui avait été confiée pour qu’il la défende contre vents et marées, c’est bien le terme.

Fidélité à la famille, à la terre de Bretagne, à ses valeurs, avec un engagement total, tel était Pierre Baranger.

Des édiles voulurent détruire l’île en construisant un pont et en y installant un port. Il parvint à faire annuler le projet en classant le site à l'inventaire des Monuments historiques grâce à la présence de vestiges d'un tumulus néolithique. Puis, en 1975, le département tenta une OPA qu’il parvint encore à enrayer avant que l’administration ne cherche à se venger en tentant de s’opposer à la reconstruction d’une ancienne bergerie. Jusqu’à la fin de sa vie, il consacra tous ses étés à protéger l’île de l’érosion et des visiteurs indélicats.

Je me souviens qu’un soir, chez lui, devant un feu de bois, il m’a déclaré avec des étoiles dans les yeux : « Cette île, c'est le paradis. Comme ma mère autrefois, j’y ai passé les meilleurs moments de ma vie ».

J’admirais ses rêves, son courage, sa générosité, sa lucidité.

Qu’écrire de plus ? Ceci :

 

Grâce à lui, j’ai réussi le Concours en Sciences de Gestion, prélude extraordinaire à une amitié qui ne fit que s’approfondir au cours du temps et qui ne s’efface pas, parce qu’il reste l’exemple à suivre en termes de générosité et de détermination. 

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L'Empire, c'est la paix

13 Juin 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

LES ÉLECTEURS, ONT VOTÉ POUR LOUIS-NAPOLEON

Une fois élu, Louis-Napoléon va inexorablement être pris, malgrè toute sa bonne volonté, dans la contradiction fondamentale du pouvoir en France que nous commençons à saisir. D'un côté, il veut être le représentant loyal des électeurs qui l'ont porté au pouvoir. De l'autre, il est à la tête d'un État qui a parfaitement les moyens de contrôler le pays.

 

Louis-Napoléon Bonaparte dispose d’atouts solides pour exercer le pouvoir dont il s’empare pleinement en 1851. La majorité des électeurs s’exprimant par le suffrage universel lui fait confiance, ce qui est la toute première fois dans l’histoire de la France. Il est un homme neuf, auréolé du prestige napoléonien. Il est libre de ses choix, puisqu’il n’est pas le représentant patenté d’une classe sociale. Enfin, il a certainement la volonté de réussir ce règne qu’il a désiré de toutes ses forces, car, comme le note Tocqueville dans ses souvenirs à propos de Napoléon III : « Il se croyait fermement l’instrument de la destinée et l’homme nécessaire ».

Il se veut proche du peuple, habile à moderniser le pays et en mesure d’accroître son influence internationale. Or c’est ce dernier jeu qu’il perd, classiquement. Malgré les indéniables achèvements de son règne, ce dernier aboutit en effet à la catastrophe de la guerre de 1870, prologue des cataclysmes du XXe siècle. 

Comment expliquer une telle fin? Il est crucial d’observer comment Napoléon III, déterminé à faire le bonheur du pays, habile politique, fort de son expérience de proscrit, finit par buter sur une guerre dictée par la passion patriotique alors que la plus élémentaire prudence lui recommandait de l’éviter.

Au lieu de donner la priorité au développement du pays et malgré la fameuse formule qu’il prononce à Bordeaux le 9 octobre 1852 à Bordeaux, « L’Empire, c’est la paix ! », il engage la France dans une guerre de prestige en Russie, de libération en Italie, de reconquête au Mexique, avant de succomber dans une guerre insensée contre toute l’Allemagne coalisée contre lui.

Comment a t-il pu être aussi idiot ? 

L’explication est trop courte. Pragmatique, Napoléon III a su adapter ses projets aux circonstances, arrêter la guerre d’Italie, retirer ses troupes du Mexique, avancer vers l’Empire libéral après le temps de la répression. Ce ne sont pas ses « erreurs » qui expliquent la catastrophe finale de son règne. Son attitude s’inscrivait dans la continuité de l'homme qui voulait effacer l’échec final de son oncle, qui fut un fervent carbonari et qui était l’auteur de « l’Extinction du paupérisme ».

Il a agi selon son bon vouloir, avec le soutien indéniable de l’opinion publique, encore que cette dernière n’étant consultée que pour approuver à posteriori des décisions mises en œuvre et non pour débattre des choix qui s’imposaient au pays. Car, si tel avait été le cas, croit-on que les Français auraient envoyé  prés de cent mille soldats mourir en Crimée pour les beaux yeux de la reine Victoria ? Qu’ils auraient déclaré la guerre à l’Autriche pour contribuer à l’unité italienne ? Qu’ils seraient allés se fourvoyer au Mexique ? Ou même qu’ils seraient brutalement passés d’un régime autoritaire à un gouvernement libéral ?

 

C’est ainsi que Napoléon III, malgré toute sa bonne volonté, pilotant une machine trop puissante et trop docile pour lui, l’État français, le lanca contre le mur germanique. 

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UNE ANNÉE, OU PRESQUE, AVEC ALAIN JUPPÉ

8 Juin 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

UNE ANNÉE, OU PRESQUE, AVEC ALAIN JUPPÉ

MANIFESTATIONS CONTRE LE GOUVERNEMENT JUPPÉ DE 1995

Nous avons quitté les Français un peu sonnés par les mesures annoncées par le Président Juppé, alors qu'ils partent en vacances et que le gouvernement Macron se met au travail. 

 

Comme tous les gouvernements, sa première tâche de l’été consiste à évaluer les recettes du budget 2018 et surtout à cadrer les dépenses publiques. Compte tenu de ses engagements budgétaires et de sa décision de frapper fort d’entrée, car il se méfie de l’affaiblissement de son autorité au cours du temps, le Président Juppé décide de réduire tout de suite les dépenses de 30 milliards par an, après un collectif budgétaire qui a déjà annulé 10 milliards de dépenses votées au budget 2017.

Bien que les experts aient anticipé les difficultés et que les hauts fonctionnaires du Ministère des Finances aient fait tourner les ordinateurs, il reste à procéder aux arbitrages entre ministères mais aussi à répartir la charge de la baisse avec le budget social et celui des collectivités locales. Le gouvernement commence par bloquer les dépenses sociales, considérant qu’il serait politiquement insupportable de les baisser, mais décide de réduire les dépenses des collectivités locales de 8 milliards d’euros sous forme d’une réduction de la Dotation Globale de Fonctionnement, soit une baisse considérable de 25%.

Il reste cependant à trouver 22 milliards d’euros, soit 5 % du budget général, l’équivalent de la moitié des dépenses militaires, dépenses qu’il est plutôt question d’augmenter. La guerre commence entre les ministères et les ministres, tandis que les responsables des collectivités locales protestent hautement, tout en commençant à préparer leurs administrés à une forte hausse de leurs impôts locaux et à une réduction massive de leurs investissements.

Selon la règle simpliste mais efficace qui recommande de prendre les mesures les plus impopulaires tout de suite, le Président décide en outre d’appliquer tout de suite la suppression de l’ISF (5 milliards d’Euros) et l’augmentation d’un point de TVA (10 milliards d’Euros) dans le budget 2018, ce qui permet en contrepartie d’engager pour la même année la suppression progressive des charges sociales pour les salariés au SMIC.

Pendant que les arbitrages avancent, les Français reviennent de vacances. Ils découvrent, un peu ahuris, les mesures qui les attendent en tant que salarié, fonctionnaire, chômeur, détenteur d’aides sociales et consommateurs. Ils sont chauffés à blanc, via les chaines d’information en continu, par des syndicalistes directement visés par le plan Juppé et par conséquent fortement motivés. Lorsqu’il apparaît que le budget de l’Education nationale est touché, une brève grève a lieu mi septembre 2018, qui fait long feu.

Tout au long du débat budgétaire, des manifestations sporadiques ont lieu. Après l’adoption du budget, le projet de réforme de la fonction publique est présenté devant l’Assemblée Nationale. Déjà, lorsqu’il avait été présenté aux syndicats, ces derniers avaient unanimement rejeté le projet, parvenant à présenter un front commun contre la réforme du statut d’une fonction publique qui, il est vrai, rassemble l’essentiel des effectifs syndicaux.

Dés que le projet, qui suscite une pluie d’amendements de la part des députés de gauche, est soumis à l’Assemblée Nationale, les syndicats déclenchent une grève générale reconductible. Cette dernière, renforcée dans sa détermination par une série d’incidents avec les forces de police, se transforme en grève générale illimitée avec l’exigence de retrait du texte législatif. La RATP, la SNCF, l’ensemble des transports publics se joignent à la grève. La CGT, humiliée par le gouvernement Valls, voit l’occasion de recréer un front syndical uni. Elle en profite pour réclamer le rétablissement de l’ISF et le retour à un taux de TVA à 20%.

Jusqu’ici silencieux, le Président Juppé intervient à la télévision pour défendre une réforme « indispensable au maintien d’un service public de qualité », tandis que les commentateurs voient dans les désordres une répétition des grèves de 1995 sous le gouvernement Juppé. Mais le Président soutient que cette fois-ci les Français ont approuvé son programme puisqu’ils l’ont élu à une forte majorité et que pour sa part, il ne cherche nullement à se faire réélire mais à réformer le pays qui en a désespérément besoin. Pour contrer les grévistes, il organise des manifestations de soutien qui réunissent peu de participants mais provoquent des bagarres entre les deux camps. La police fait connaître son épuisement face aux manifestations et son exaspération à l’égard des politiques.

Le mois de décembre 2017 se déroule au milieu des grèves et des incidents, à peine interrompus par les fêtes de Noël et de fin d’année. Les syndicalistes, soutenus, toute honte bue, par la majorité du Parti Socialiste, se préparent à un mouvement de grève majeur, accompagné de coupures d’électricité tournantes.

Dans cette ambiance tendue, le mois de janvier 2018 voit une motion de censure lancée par le Parti Socialiste votée par une majorité de députés qui rassemble la gauche et une partie de la droite. Une tentative du Président Juppé pour former un second gouvernement avorte rapidement, ce qui le contraint à dissoudre l’Assemblée Nationale.

Les nouvelles élections sont prévues pour les dimanche 18 et 25 février 2018. Le Président Juppé appelle à élire une Assemblée Nationale qui soutienne  clairement son programme. Il ne l’obtient pas, l’Assemblée étant désormais partagée entre trois groupes presque égaux, une gauche plutôt radicale, le centre droit classique et le Front National. Devant cette situation politique ingérable, il renonce à former un gouvernement et annonce au peuple français sa démission le dimanche 4 mars 2018 à 20 heures, dans une allocution de tonalité gaullienne.

À trois jours prés, il a tenu dix mois.

Les règles de l’intérim de la Présidence de la République Française donnent un pouvoir limité au Président du Sénat qui s’installe à l’Elysée pour quelques semaines et imposent une nouvelle élection présidentielle dans un délai maximum de trente-cinq jours. Cette élection a lieu les 8 et 22 avril 2018. Le premier tour voit l’élimination de tous les candidats issus des partis dits de « gouvernement »…

 

À moins que les Français ne prennent conscience, pendant la campagne électorale de 2016-2017, du contenu intenable des programmes des candidats de droite, ce scenario me paraît vraisemblable. On ne peut se contenter en effet de promettre « du sang et des larmes, sans promettre aussi, comme Churchill, la victoire en échange.

Or, où se trouve la victoire du peuple français dans leur programme ? 

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UNE ANNÉE AVEC ALAIN JUPPÉ?

31 Mai 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

UNE ANNÉE AVEC ALAIN JUPPÉ?

UN CANDIDAT RÉSOLUMENT CONFIANT DANS SON PROGRAMME ET SES CHANCES D'ÊTRE ÉLU

 

Ce blog est un essai de politique fiction, exercice perilleux car toujours démenti par les faits qui, malicieusement, s'ingénient à déjouer toutes tentatives de pronostic. Je m'y astreint néanmoins, souhaitant décrire un processus dont l'absurdité semble encore échapper à nombre de commentateurs. 

Au préalable, j’assure les lecteurs que le programme que j’attribue au Président Juppé est bien celui que le candidat Juppé a rendu public et qu’il déclare vouloir appliquer mordicus.

Il n’est néanmoins pas certain qu’il soit désigné, seul, candidat du parti « Les Républicains » mais nous allons faire comme si ce favori des sondages réussissait finalement à être élu au deuxième tour des Présidentielles.

À 20 heures donc, le 7 mai 2017, les estimations donnent Alain Juppé élu, sans surprise, avec 64% des votants et une participation électorale honorable. Belle victoire pour lui, une partie importante des Républicains, les centristes et les socialistes ayant voté pour lui.

Sa victoire est attribuée au caractère rassurant de ce personnage réputé modéré et à sa détermination affichée de réformer la France. D’ailleurs, dés 21 heures, Alain Juppé, visiblement ému, déclare qu’il a été élu pour mettre en œuvre son programme, qu’il ne fera pas de second mandat et qu’il sera le Président de tous les Français. Sur l’une des chaines de TV, Bayrou rabroue un journaliste qui lui demande qui sera,  à son avis, le successeur de Juppé en 2022. Car la question se pose dés le premier jour.

Les élections législatives ont lieu les 11 et 18 juin 2017. Le Président Juppé a entretemps chargé Emmanuel Macron de former un gouvernement, qui, vraie surprise, comprend une majorité de femmes. Il a donné son investiture à une alliance comprenant Les Républicains, les centristes et quelques socialistes, qui obtient presque la majorité absolue, tandis que le Parti Socialiste maintenu, les écologistes et une alliance de gauche ont préservé un nombre appréciable de sièges et que le Front National est parvenu à faire élire 17 députés, ce qui lui permet de former un groupe à l’Assemblée Nationale.

L’ouverture de la XVe législature a lieu le mardi 27 juin 2017 qui voit l’élection de François Bayrou à la Présidence de l’Assemblée Nationale.

Le mardi 4 juillet 2017, Le Premier ministre présente devant l'Assemblée nationale sa déclaration de politique générale. Cette déclaration est suivie d'un débat puis d'un vote qui montre que le gouvernement est soutenu, en ce début de mandature, par une majorité  assez confortable.  

Au cours du Conseil des Ministres, le mercredi 5 juillet, le Président Juppé dessine sa vision politique autour de la réforme de la France, qu’il présente comme une nécessité vitale pour le pays, invitant fermement son gouvernement à mettre en œuvre sans attendre l’ensemble des engagements qu’il a pris devant les Français.

Ce programme, le Président le détaille à nouveau devant les téléspectateurs le jeudi 6 juillet, avant qu’ils ne partent en vacances :

Pour le budget, une réduction des dépenses publiques de 100 milliards d’euros sera engagée sur la durée de sa mandature, ce qui implique des économies drastiques, Cette réduction concerne les dépenses de l’État, des administrations publiques locales et des administrations de sécurité sociale,  dépenses qui ont constamment augmenté depuis 1978.

C’est donc une rupture drastique dans la politique de l’État qu’engage consciemment le Président Juppé.

Pour les salariés, l’âge légal de la retraite sera porté à 65 ans, les 35 heures hebdomadaires seront supprimées et portées à 39 heures, un nouveau contrat de travail assoupli sera créé, avec possibilité de travailler le week-end ou en soirée. De plus, les indemnités de licenciement seront plafonnées et le compte de pénibilité institué par le gouvernement Ayrault sera supprimé.

Rien de moins !

En outre, les sans-emplois ne seront pas oubliés, puisque la dégressivité des allocations chômage sera instituée, que les revenus d’assistance seront plafonnés et que les bénéficiaires du RSA seront tenus d'accepter l'emploi ou la formation proposée.

Gros temps en vue pour les personnes inscrites auprès de Pole emploi…

Les fonctionnaires en auront aussi pour leur grade, puisque le nombre des fonctionnaires sera réduit de 200.000 à 250.000. Changement considérable, le statut de la fonction publique sera modifié à partir de 2018, puisque les nouveaux fonctionnaires seront assujettis au régime général des salariés. Une petite mesure accessoire, applicable immédiatement,  consistera à rétablir les deux jours de carence pour les congés maladie.

Le temps des fonctionnaires titulaires de leur empli à vie va vers sa fin.

Quant aux syndicalistes, leur mandat sera limité à deux mandats consécutifs, avec obligation d’assurer la moitié de leur activité en temps de travail.

Fini les permanents syndicalistes !

Les consommateurs seront également appelés à la rescousse avec le relèvement d’un point du  taux de TVA.

Une mesure en apparence indolore.

En contrepartie, souligne le Président Juppé, les entreprises seront encouragées à embaucher, puisque les charges sociales seront supprimées pour les entreprises payant les salariés au SMIC. Le Président ne se prononce pas sur les charges des salariés payés au-dessus du SMIC, mais il précise  que les entreprises affiliées au RSI verront leurs cotisations réduites de 2 milliards d'euros et que toutes les entreprises sous forme de sociétés verront leur impôt sur les sociétés abaissé à 30% de leur bénéfice imposable.

Il reste aux entreprises à embaucher, si toutefois la croissance économique est au rendez-vous.

Les familles des classes moyennes, maltraitées par les gouvernements précédents, verront le plafond du quotient familial relevé de 1500 à 2500 euros par demi part supplémentaire, tandis que, ajoute  discrètement le Président qui sait que la mesure sera impopulaire, les familles aisées bénéficieront de la suppression de l’ISF.

Au moins ces électeurs ne regretteront pas d’avoir voté Juppé…

 

Tandis que les journalistes ne trouvent rien de mieux que de comparer Alain Juppé à Margareth Thatcher, les Français, un peu sonnés par ces annonces inhabituelles, partent comme d’habitude en vacances. À l’opposé, le gouvernement se met immédiatement au travail tandis que le Président se contente d’une semaine de repos non loin de sa bonne ville de Bordeaux.

 

(À SUIVRE)

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La révolte des paysans

27 Mai 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

La révolte des paysans

LE CHANT DU CYGNE DES OUVRIERS FACE À LA RÉVOLTE DES PAYSANS

LA RÉVOLTE DES PAYSANS

 

Le 2 décembre 1851, une nouvelle période historique commence, le IIIe Empire, qui s'explique par celle qui vient de s’écouler entre 1848 et 1851.

 

Notons tout d’abord l’habitude prise d’organiser un coup d’État pour contourner les contraintes constitutionnelles, une habitude qui remonte à 1792.

Depuis cette date, aucun pouvoir politique n’a disposé du temps nécessaire pour s’enraciner avant qu’il ne soit balayé par un coup de vent. Deux groupes politiques se sont disputés alternativement le pouvoir, les anciens jacobins reconvertis en révolutionnaires socialistes et les bourgeois qui sont passés du royalisme raisonné à la république des libertés.

En décembre 1848, un nouvel acteur a changé le jeu, la majorité conservatrice qui n’est jamais parvenue à s’exprimer dans les urnes depuis avril 1797 et qui a saisi cette fois-ci l’opportunité de l’élection du Président de la République pour élire de manière inattendue Louis-Napoléon Bonaparte.

Dès lors que ce dernier s’est emparé des commandes de l’État, il a tout fait pour les garder, avec l’appui de la majorité de la population. C’est pourquoi le coup d’État du 2 décembre 1851 possède paradoxalement un aspect démocratique. 

Pour sa part, Karl Marx dans Le 18 brumaire de L. Bonaparte (Deuxième Édition,1869), à qui j’ai emprunté le titre de ce blog, analyse avec une grande lucidité les causes du coup d’État, lorsqu’il le qualifie de « révolte des paysans » et son analyse est toujours d'actualité ( c'est moi qui souligne) quand il mentionne la force du pouvoir de l'État en France et analyse l'origine de sa puissance :

« Ce pouvoir exécutif, avec son immense organisation bureaucratique et militaire, avec son mécanisme étatique complexe et artificiel, son armée de fonctionnaires d'un demi million d'hommes et son autre armée d'un demi million de soldats, effroyable corps parasite, qui recouvre comme d'une membrane le corps de la société française et en bouche tous les pores, se constitua à l'époque de la monarchie absolue, au déclin de la féodalité, qu'il aida à renverser.

« Les privilèges seigneuriaux des grands propriétaires fonciers et des villes se transformèrent en autant d'attributs du pouvoir d'Etat, les dignitaires féodaux en fonctionnaires appointés, et la carte bigarrée des droits souverains médiévaux contradictoires devint le plan bien réglé d'un pouvoir d'Etat, dont le travail est divisé et centralisé comme dans une usine.

« La première Révolution française, qui se donna pour tâche de briser tous les pouvoirs indépendants, locaux, territoriaux, municipaux et provinciaux, pour créer l'unité civique de la nation, devait nécessairement développer l’œuvre commencée par la monarchie absolue : la centralisation, mais, en même temps aussi, l'étendue, les attributs et l'appareil du pouvoir gouvernemental. Napoléon acheva de perfectionner ce mécanisme d'Etat…

« Toutes les révolutions politiques n'ont fait que perfectionner cette machine, au lieu de la briser. Les partis qui luttèrent à tour de rôle pour le pouvoir considérèrent la conquête de cet immense édifice d'Etat comme la principale proie du vainqueur. Ce n'est que sous le second Bonaparte que l'Etat semble être devenu complètement indépendant…

"C'est ce qui explique le morne désespoir, l'effroyable sentiment de découragement et d'humiliation qui oppresse la poitrine de la France et entrave sa respiration. Elle se sent comme déshonorée. »

Il observe ensuite la nature des appuis dont bénéficie Louis-Napoléon Bonaparte dans la société française de 1851 :

« De même que les Bourbons avaient été la dynastie de la grande propriété foncière et les Orléans la dynastie de l'argent, les Bonaparte sont la dynastie des paysans, c'est-à-dire de la masse du peuple français

« Après que la première Révolution eut transformé les demi-serfs en libres propriétaires fonciers, Napoléon consolida et réglementa les conditions leur permettant d'exploiter tranquillement les terres qui venaient de leur échoir et de satisfaire leur enthousiasme juvénile de propriétaires. » 

 

Or les paysans français ont été tout à fait exclus de la dynamique politique depuis la Révolution, époque à laquelle ils avaient accédé à la propriété foncière. Mais ce sont eux qui élisent Louis-Napoléon président de la République et c’est sur eux que ce dernier s’appuie pour briser d'un côté la résistance des riches, les bourgeois républicains et de l'autre côté celle des révolutionnaires.

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LA MAGIE DE LA DÉCISION

22 Mai 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

LA MAGIE DE LA DÉCISION

L'EXPERT FACE AUX PARAMÈTRES COMPLEXES DE LA DÉCISION

 

Le 18 mars dernier, je concluais par la formule issue du Léviathan de Hobbes : c’est l’autorité, et non pas la vérité, qui fait la loi. 

 

Dans ses remarquables conférences de 1919 sur le Savant et le Politique,  auxquelles j’ai consacré une série de blogs fin 2011, Max Weber avance que la question des valeurs échappe par essence au domaine  de l’objectivité ou de la vérité.

En matière de valeurs, les débats ouvrent nécessairement, faute de pouvoir être tranchés par un savoir, sur une lutte indépassable entre les systèmes évaluatifs des valeurs en question, si bien que, selon cette approche wébérienne, aucune rationalisation de la décision concernant les fins ultimes ne peut être envisagée.

C’est une conviction qui se fonde sur les écrits de Nietzsche et qui a été reprise par Carl Schmitt. Selon ce dernier, l’homme politique, l’homme de pouvoir par excellence, demeure toujours celui qui décide en situation exceptionnelle. C’est dans une telle situation qu’il possède le monopole de la décision ultime, parce que, face à une décision à prendre urgente et importante, il ne se retrouve plus que face à lui-même.

Cette approche « décisionniste » nous conduit à mesurer les limites des efforts accomplis par le rationalisme pour déduire les choix à partir de principes et de normes fondés sur la raison. Car, si nous assignons à l’homme politique la charge du moment d’irrationalité sans lequel il ne saurait y avoir véritablement de décision, ce surcroît de pouvoir sans lequel gouverner serait tout simplement impossible ne procède que de l’autorité personnelle du leader.

Faut-il  en conclure à l’irrationalité foncière du décideur qui se fonde sur son autorité charismatique?

Il faudrait alors admettre que la politique est bien davantage un art qu’une science, et que, selon Aristote, gouverner requiert un don particulier qui consiste à juger correctement de ce qu’il faut faire et quand il faut le faire.

Les conséquences d’une telle approche sont redoutables.

La logique de la décision inclut sans aucun doute un moment de délibération avec soi-même, lorsqu’il s’agit de choix moral et il s’agit presque toujours de faire, au moins en partie, un choix moral pour pratiquement toutes les « décisions » que nous prenons.

Mais dans ces conditions, la perception ultime de ce qu’il « faut faire » relèverait d’un talent mystérieux qu’Aristote nommait la « prudence », sans parvenir jamais à mieux préciser ce qu’il entendait par là. Mais c’est une imprécision inquiétante, puisque Aristote ouvrait ainsi la voie à un absolutisme qui s’appuierait sur la « supériorité » de ceux qui disposent d’un tel talent et donc au culte du chef, si honni par le prêt à penser de notre temps.

En effet, en fondant le pouvoir sur l’autorité personnelle, la confusion des concepts de pouvoir et d’autorité entraîne en retour un pouvoir forcément autoritaire, avec ses horribles dérives qu’ont été la centralisation robespierriste ou les totalitarismes du XXe siècle. Il en résulte que la représentation « décisionniste » de l’acte de gouverner serait aussi incompatible avec les valeurs démocratiques que le techno-bureaucratisme comme fondement de l’autorité.

Il apparaît dés lors que les absolutismes qui se fondent sur la  compétences ou sur la magie de l’acte de décision participent toutes deux de l’effort du détenteur du pouvoir pour accroitre sa capacité à gouverner.

Tous deux tendent à annuler le pouvoir de l’opinion publique, soit au profit des technocrates, soit au bénéfice du chef charismatique, en écartant le recours à une consultation démocratique de l’opinion.

Ce penchant à écarter le peuple de la décision trouve son origine soit du côté de l’absolutisme des compétences, qui prétend  que seuls les experts possèdent l’autorité requise pour apprécier avec justesse les contraintes objectives qui dictent les choix politiques, soit du côté de l’absolutisme de la décision qui soutient que seul le chef dispose d’une perception aussi mystérieuse qu’irrationnelle pour déterminer avec autorité ce qui doit être fait.

Dans ces deux perspectives, le pouvoir ôte toute légitimité au modèle démocratique et le remet à une élite.

Cette logique convergente de l’expert et du leader anti-démocratique conduit à  deux interrogations successives posées par Habermas :

Si l’idée d’une rationalité du pouvoir apparaît comme une illusion, n’est-ce pas parce que la seule figure envisageable de la raison est celle de la raison scientifique ?

Et si l’on fait appel à une raison non scientifique, quelles devraient être les « procédures raisonnables » mais non scientifiques, qui permettraient de trancher les questions soulevées par le gouvernement d’une organisation et à fortiori d’une société, qui dépassent les compétences des experts et qui ne s’en remettent pas à l’intuition d’un chef ?

 

Nécessité de l’autorité, déficience des experts, méfiance des chefs charismatiques, voici donc le pouvoir à la recherche d’une autorité raisonnable pour trouver la force d’agir.

 

 

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